Le code des juridictions financières « 2017 » est publié

Au terme de 14 mois d’un long processus de consultation, de rédaction et de relecture, auquel notre organisation syndicale a été étroitement associée,  le « nouveau » code des juridictions financières est entré en vigueur début mai, à quelques jours de la fin du quinquennat présidentiel, ce qui évite aux juridictions financières d’éventuelles mésaventures propres à certains débuts de mandature. Tant la partie réglementaire que la partie législative sont profondément remaniées de façon à renforcer la clarté et la concision de ce qui constitue, après tout, notre principal outil de travail. Quelles sont les principales modifications apportées à ce code?

La partie législative du code des juridictions financières

En premier lieu, ce texte intègre, outre les dispositions introduites par  la loi n° 2016-483 du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires, celles prises par ordonnance du 13 octobre 2016 modifiant la partie législative du code : Elles modernisent les missions et l’organisation des juridictions financières, ainsi que les procédures applicables ; elles simplifient le code en proposant une architecture plus claire, en y repositionnant les dispositions pertinentes et en abrogeant celles devenues inutiles.

En deuxième lieu, le statut des membres des juridictions financières est modifié. Le champ d’application des normes professionnelles, fixées par le Premier président, auxquelles sont tenus de se conformer les magistrats, les conseillers maîtres et référendaires en service extraordinaire, les conseillers experts, ainsi que les rapporteurs extérieurs de la Cour et des chambres régionales et territoriales des comptes, est précisé.

Enfin, des clarifications relatives aux règles d’organisation et de procédure applicables à la Cour de discipline budgétaire et financière, qui dataient pour la plupart de 1948, sont apportées afin de tenir compte des règles de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme, de l’adaptation des pratiques et d’évolutions jurisprudentielles établies.

 

La partie réglementaire du code des juridictions financières

En premier lieu, le plan de la partie réglementaire du code des juridictions financières est rationalisé sur le modèle de ce qui a été fait dans la partie législative, au vu des évolutions des missions et procédures de la Cour des comptes depuis la codification en 2000. Les dispositions introduites dans la partie législative par l’ordonnance  du 13 octobre 2016 dans certains domaines particuliers, en particulier les conditions dans lesquelles se déroulent les instructions et délibérés, sont mises en oeuvre. La partie réglementaire du code des juridictions financières comprend aussi des dispositions d’application d’autres textes législatifs comme notamment la loi précitée du 20  avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires.

En deuxième lieu, un travail de modernisation, de clarification et de suppression des dispositions obsolètes du code des juridictions financières entamé par l’ordonnance du 13 octobre 2016 est réalisé. La procédure spécifique aux entreprises publiques et à leurs filiales est simplifiée. Le rôle et la place de certaines formations internes à la Cour des Comptes et aux chambres régionales des comptes sont clarifiées. Les règles relatives à la mobilité interne à la Cour des comptes sont modernisées. Sur le plan statutaire, le texte rationalise les dispositions relatives aux rapporteurs extérieurs de la Cour et améliore la gestion des magistrats des chambres régionales des comptes. Il clarifie les règles relatives aux activités juridictionnelles (forme et contenu des arrêts, simplification de la procédure d’apurement administratif des comptes des collectivités territoriales). Il clarifie les procédures non juridictionnelles notamment en simplifiant celles relatives à la notification des contrôles de la Cour et en améliorant la lisibilité de la procédure de contrôle des comptes et de la gestion applicable aux chambres régionales.

En troisième lieu, la partie réglementaire du code des juridictions financières apporte des clarifications relatives aux règles d’organisation et de procédure applicables à la Cour de discipline budgétaire et financière.

Les observations de notre organisation syndicale

Notre organisation syndicale se félicite notamment de l’attribution d’une force légale à la pratique des chambres régionales et territoriales des comptes consistant à formuler des recommandations aux entités qu’elles contrôlent et des précisions apportées sur les modalités de fonctionnement des formations inter-juridictions de type 1 et de type 2. En revanche, elle regrette que l’opportunité de mettre en cohérence les compétences des juridictions financières avec les définitions adoptées par le système européen des comptes nationaux  (SEC 2010) n’ait pas été saisie. Les esprits n’étaient sans doute pas assez mûrs pour procéder à une telle mise en cohérence.

Actuellement les chambres régionales et territoriales des comptes sont compétentes pour le contrôle des collectivités territoriales et leur établissements publics locaux. La Cour des comptes est compétente pour l’Etat, ses établissements publics, la sécurité sociale, les entreprises publiques, les organismes faisant appel à la générosité du public, plus une énumération d’organismes divers. La Cour peut déléguer certaines de ses attributions aux CRTC.  Le projet Seguin visait, dans la perspective de l’unité organique, de réattribuer toutes ces compétences à la Cour, unifiée, de façon à avoir les moyens juridiques d’évaluer les politiques publiques articulant des compétences Etat, des compétences sécurité sociale et des compétences locales (décentralisées).

La refonte actuelle du code des juridictions financières, dans ses parties législative et réglementaire n’est pas revenue, fondamentalement, sur ces dispositions.

Lors de la discussion sur la partie législative du code, notre organisation syndicale avait proposé d’articuler les compétences des juridictions financières avec celles qui résultent des dispositions du règlement du Parlement européen et du Conseil du 21 mai 2013 relatif au système européen des comptes nationaux et régionaux  (SEC 2010) de l’Union européenne, lequel définit l’administration centrale (à l’exclusion des administrations de sécurité sociale), les administrations locales et les administrations de sécurité sociale de la façon suivante:

  • Administration centrale (S.1311) :

Ce sous-secteur comprend tous les organismes administratifs de l’État et autres organismes centraux dont la compétence s’étend normalement sur la totalité du territoire économique, à l’exception des administrations de sécurité sociale de l’administration centrale. Font partie du sous-secteur S.1311 les institutions sans but lucratif qui sont contrôlées par l’administration centrale et dont la compétence s’étend à l’ensemble du territoire économique. Les organismes régulateurs du marché qui, à titre principal ou exclusif, distribuent des subventions sont classés dans le sous-secteur S.1311. Ceux qui ont pour activité principale ou exclusive d’acheter, de stocker et de vendre des produits agricoles ou alimentaires relèvent du secteur S.11.

Ce sous-secteur revêt, pour l’essentiel, des lois de finances, lesquelles  « déterminent, pour un exercice, la nature, le montant et l’affectation des ressources et des charges de l’État, ainsi que l’équilibre budgétaire et financier qui en résulte » (art. 1 de la loi organique relative aux lois de finances du 1er août 2001). Ce sont des lois ordinaires, mais qui sont adoptées selon une procédure de vote spéciale.

 

  • Administrations locales (S.1313) :

Ce sous-secteur rassemble toutes les administrations publiques dont la compétence s’étend seulement sur une subdivision locale du territoire économique, à l’exception des administrations de sécurité sociale des administrations locales. Font partie du sous-secteur S.1313 les institutions sans but lucratif qui sont contrôlées par les administrations locales et dont la compétence est limitée au territoire économique du ressort de celles-ci.

Selon l’inventaire PDE consolidé des sources et méthodes de la France, les administrations publiques locales (APUL) comprennent les collectivités locales et les organismes divers d’administration locale (ODAL).

Les collectivités locales regroupent des collectivités territoriales à compétence générale : communes, départements et régions (budgets principaux et budgets annexes) ; des syndicats intercommunaux, communautés urbaines, communautés d’agglomération et communautés de communes. L’existence de ces organismes traduit soit l’élargissement à plusieurs communes de l’assiette financière nécessaire aux travaux d’équipement (syndicats intercommunaux d’aménagement de zones industrielles), soit l’exploitation sous tutelle de certains services publics (régies de transport). Les opérations de ces organismes sont en général en étroite relation avec celles des communes et des départements.

Les organismes divers d’administration locale (ODAL) regroupent des unités institutionnelles dont le degré d’indépendance par rapport aux collectivités locales est variable : unités non marchandes émanant directement des communes et départements : centres communaux d’action sociale, caisses des écoles, services départementaux d’incendie et de secours, etc. ; unités chargées de l’aménagement du territoire, émanant souvent de l’Etat mais dont le financement est local : sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural, établissements publics d’aménagement des villes nouvelles, etc. ; organismes consulaires : chambres de commerce et d’industrie, chambres de métiers, chambres d’agriculture ; associations culturelles financées par les collectivités locales (théâtres communaux, maisons de la culture etc.) ; lycées et collèges (établissements publics) sont depuis 1986 des établissements publics locaux d’enseignement (EPLE), financés par les régions et les départements (hors rémunération des fonctionnaires).

La création par l’article 11 de la loi de programmation des finances publiques (LPFP) pour la période 2014-2019 d’un objectif d’évolution de la dépense publique locale (ODEDEL), fixant de manière indicative un taux d’évolution de la dépense locale en valeur, permet de renforcer la transparence et la confiance entre les collectivités territoriales et l’État en formalisant un engagement partagé sur le rythme d’évolution des dépenses des collectivités.  Sa déclinaison par niveau de collectivités, effectuée à l’occasion du projet de loi de finances pour 2016, permet de renforcer son caractère incitatif en fournissant à chaque niveau de collectivités un objectif pertinent, prenant en compte sa situation particulière. L’ODEDEL est déterminé après consultation du comité des finances locales et fait ensuite l’objet d’un suivi, au cours de l’exercice, en lien avec ce comité.

Une loi organique pourrait organiser la maîtrise des dépenses publiques locales aux termes de de la loi de programmation, fin 2019. Les chambres régionales et territoriales des comptes pourraient alors se voir confier la responsabilité de réaliser un rapport annuel sur l’atteinte de l’objectif pertinent de l’ODEDEL – ou de son équivalent organique – dans le ressort de la chambre (analyse statistique illustrée de monographies tirées de contrôles organiques de la gestion d’administrations publiques locales).

 

  • Administrations de sécurité sociale (S.1314) :

Le sous-secteur des administrations de sécurité sociale (S.1314) réunit les unités institutionnelles centrales, fédérées et locales dont l’activité principale consiste à fournir des prestations sociales et qui répondent aux deux critères suivants: a) certains groupes de la population sont tenus de participer au régime ou de verser des cotisations en vertu des dispositions légales ou réglementaires; b) indépendamment du rôle qu’elles remplissent en tant qu’organismes de tutelle ou en tant qu’employeurs, les administrations publiques sont responsables de la gestion de ces unités pour ce qui concerne la fixation ou l’approbation des cotisations et des prestations. Il convient de noter qu’il n’existe habituellement aucun lien direct entre le montant des cotisations versées par un individu et les risques auxquels il est exposé.

La loi de financement de la Sécurité sociale (LFSS), catégorie de loi créée par la révision de la Constitution du 22 février 1996, vise à maîtriser les dépenses sociales et de santé. Elle détermine les conditions nécessaires à l’équilibre financier de la Sécurité sociale et fixe les objectifs de dépenses en fonction des prévisions de recettes.

La plupart des agrégats statistiques utilisés dans le cadre de la gouvernance économique de l’Union, en particulier la procédure concernant les déficits excessifs et la procédure concernant les déséquilibres macroéconomiques, sont définis en référence au SEC 2010.  Le SEC 2010 est appelé à se substituer graduellement à tout autre système en tant que cadre de référence des normes, définitions, nomenclatures et règles comptables communes destiné à l’élaboration des comptes des États membres pour les besoins de l’Union, permettant ainsi d’obtenir des résultats comparables entre les États membres.

Les juridictions financières pourraient se réapproprier ces définitions, à l’occasion d’une nouvelle refonte du code des juridictions financières, à venir.

En l’absence d’unité organique des juridictions financières, les compétences respectives de la Cour des comptes et des chambres régionales et territoriales des comptes en seraient ainsi clarifiées: la première serait compétente pour assurer le contrôle des administrations centrale et de sécurité sociale, les secondes pour assurer le contrôle des administrations locales. Les juridictions financières, qui sont chacune indépendantes les unes des autres, seraient ainsi, dans leur ensemble,  compétentes pour contrôler l’ensemble des administrations publiques en France.

En cas de la réalisation de l’unité organique des juridictions financières, les chambres régionales et territoriales des comptes seraient compétentes pour contrôler les administrations publiques qui ont leur siège social situé dans leur ressort ainsi que les administrations déconcentrées de l’Etat et de sécurité sociale du ressort. Les compétences des CRTC seraient plus étendues et les délégations de compétences de la Cour aux CRTC ne seraient plus nécessaires. La Cour des comptes serait compétente pour évaluer les politiques publiques au niveau national, les chambres régionales et territoriales pour les évaluer au niveau de leur ressort.

Pour en savoir davantage:

Code des juridictions financières 2017

La partie réglementaire du code des juridictions financières présentée au Conseil des ministres

Le code des juridictions financières doit être rénové sans être bouleversé

La stratégie d’assainissement budgétaire de la France passe par le secteur public local

 


Synthèses des observations des CRC concernant le patrimoine des collectivités territoriales

L’inspection générale de l’administration, le contrôle général économique et financier et l’inspection générale des finances ont réalisé une intéressante synthèse des travaux des chambres régionales et territoriales des comptes sur le patrimoine des collectivités territoriales, en annexe de leur rapport consacré à ce sujet, au titre d’une revue de dépenses réalisée dans le cadre du dispositif  d’évaluation des dépenses publiques, instauré par l’article 22 de la loi de programmation des finances publiques 2014- 2109.

Notre organisation syndicale se félicite de la reconnaissance de nos travaux par ces trois corps d’inspection. Elle regrette toutefois que la Cour des comptes ne se soit pas engagée, de manière proactive, à réaliser une enquête inter-juridictions sur ce thème. La programmation des enquêtes inter-juridictions souffre de lacunes importantes en ce qu’elle répond davantage à des enjeux de positionnement des acteurs internes aux juridictions financières qu’à des enjeux institutionnels forts, en lien direct avec le redressement de la trajectoire des dépenses publiques de la France.

L’une des principales innovations des revues de dépenses par rapport aux autres exercices d’évaluation des politiques publiques tient à leur articulation étroite avec le calendrier budgétaire annuel. Ces modalités de mise en œuvre sont directement prévues par la loi de programmation des finances publiques et constituent un élément clé de l’efficacité du dispositif.

La synthèse opérée par ces trois inspections illustre ce que pourraient être des évaluations de politiques publiques réalisées directement par les chambres régionales et territoriales des comptes, hors la tutelle désuète de la rue Cambon :

Depuis la fin des années 1970, le patrimoine des collectivités territoriales et de leurs groupements s’est fortement développé et diversifié au gré des investissements nouveaux et des transferts d’équipements dans le cadre de la décentralisation. Sa valeur, également tirée par l’augmentation des prix de l’immobilier, a été multipliée par 3,4 en euros constants depuis 1978 et est évaluée en 2014 par l’INSEE à 1 333 Mds€, soit 10 % du patrimoine non financier de la Nation.

Certaines collectivités sont engagées dans une gestion dynamique de leur patrimoine, fondée sur une connaissance précise et la définition d’une stratégie permettant de réaliser des arbitrages, d’optimiser l’occupation des locaux disponibles et, partant, de rationaliser les dépenses associées au patrimoine. Cette démarche n’est toutefois pas généralisée. Le niveau de connaissance par les collectivités de leur patrimoine et de son état est inégal et la diversité des statuts juridiques des biens peut en complexifier la gestion, en particulier au niveau intercommunal.

L’importance de ce patrimoine pose la question de la capacité financière des collectivités à l’entretenir. Les besoins de gros entretien et de réhabilitation s’accroissent à mesure que le patrimoine des collectivités se développe. Le besoin théorique de réhabilitation évalué par l’INSEE (mesuré par la consommation de capital fixe qui correspond en comptabilité nationale à la dépréciation du patrimoine existant) représenterait en moyenne entre 2010 et 2014 près de 40 Mds€ par an, soit environ 80 % des dépenses d’investissement des administrations publiques locales sur la période. Or, d’après les évaluations de la mission, entre 40 % et 50 % des dépenses d’investissement des collectivités seraient consacrées à des projets d’équipement neufs. Dégager les ressources financières nécessaires à l’entretien du patrimoine existant suppose que les collectivités internalisent sa dépréciation. À cet égard, la mission considère qu’un renforcement des règles d’amortissement comptable pour les investissements nouveaux serait souhaitable. Elle reprend sur ce point les analyses du rapport d’Alain Lambert et Martin Malvy (Pour un redressement des finances publiques fondé sur la confiance mutuelle et l’engagement de chacun, avril 2014), avec des préconisations adaptées selon la taille des communes.

En outre, l’évaluation préalable des projets d’équipements nouveaux serait d’autant plus utile qu’ils ont un effet d’entraînement fort sur les dépenses de fonctionnement des collectivités : d’après des modélisations économiques (Comprendre les finances publiques locales, Alain Guengant et Yann Le Meur, édition Le Moniteur, 2015), pour un nouvel investissement de 100 €, une collectivité territoriale doit supporter en moyenne un surcoût annuel en termes de dépenses de fonctionnement de 14 €. Les dépenses de fonctionnement courant associées au patrimoine sont évaluées par la mission à 28 Mds€, dont la moitié de masse salariale affectée à la gestion et l’entretien du patrimoine. Hors masse salariale, ces dépenses, rapportées au nombre d’habitants, sont caractérisées par une forte hétérogénéité, même entre collectivités de taille comparable, ce qui révèle des marges d’optimisation que la mission évalue entre 450 M€ et près de 1 Md€.

Enfin, l’importance du patrimoine des collectivités territoriales pose également la question de sa valorisation et celle des cessions. En 2014, la valorisation du patrimoine local (revenus locatifs, recettes domaniales, etc.) a rapporté 5 Mds€ et les produits de cessions 3 Mds€. Qu’il s’agisse d’opérations de cessions ou de la passation de conventions d’occupation domaniales, la mission propose un renforcement des obligations de publicité permettant une mise en concurrence, tant dans un souci de transparence que de meilleure valorisation. Par ailleurs, l’ouverture aux collectivités de la possibilité d’un déclassement anticipé serait de nature à leur donner plus de souplesse pour la conduite de leurs opérations de cessions.

 

Pour en savoir davantage:

Le patrimoine des collectivités territoriales, revue de dépenses par l’inspection générale de l’administration, le contrôle général économique et financier et l’inspection générale des finances, 2016.


La partie réglementaire du code des juridictions financières présentée au Conseil des ministres

Le Premier ministre a présenté au Conseil des ministres réuni le 19 avril 2017 un décret modifiant la partie réglementaire du code des juridictions financières. Ce texte est pris en application de l’ordonnance n° 2016-1360 du 13 octobre 2016 modifiant la partie législative du code des juridictions financières.

En premier lieu, le décret a pour principal objectif de permettre l’entrée en vigueur et la mise en œuvre de l’ordonnance du 13 octobre 2016. Il rationalise le plan du code des juridictions financières, sur le modèle de ce qui a été fait dans la partie législative, au vu des évolutions des missions et procédures de la Cour des comptes depuis la codification en 2000. Il met en œuvre les dispositions de l’ordonnance dans certains domaines particuliers, en particulier les conditions dans lesquelles se déroulent les instructions et délibérés. Le décret comprend des dispositions d’application d’autres textes législatifs comme la loi du 20  avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires.

En deuxième lieu, le décret poursuit le travail de modernisation, de clarification et de suppression des dispositions obsolètes du code des juridictions financières entamé par l’ordonnance du 13 octobre 2016. Il simplifie la procédure spécifique aux entreprises publiques et à leurs filiales. Il clarifie le rôle et la place de certaines formations internes à la Cour des Comptes et aux chambres régionales des comptes. Il modernise les règles relatives à la mobilité interne à la Cour des comptes. Sur le plan statutaire, le texte rationalise les dispositions relatives aux rapporteurs extérieurs de la Cour et améliore la gestion des magistrats des chambres régionales des comptes. Il clarifie les règles relatives aux activités juridictionnelles (forme et contenu des arrêts, simplification de la procédure d’apurement administratif des comptes des collectivités territoriales). Il clarifie les procédures non juridictionnelles notamment en simplifiant celles relatives à la notification des contrôles de la Cour et en améliorant la lisibilité de la procédure de contrôle des comptes et de la gestion applicable aux chambres régionales.

En troisième lieu, le décret apporte des clarifications relatives aux règles d’organisation et de procédure applicables à la Cour de discipline budgétaire et financière.

Le syndicat a été consulté préalablement à la présentation de ce texte au Conseil des ministres. S’il a obtenu satisfaction sur de nombreux points, il regrette que ses propositions visant à décontingenter les échelons spéciaux des premiers conseillers et des présidents de section n’aient pas été pris en comptes alors que les administrateurs territoriaux ont obtenu satisfaction sur ce point.

Afin de faciliter le déroulement de carrière des magistrats de CRTC et éviter un maintien dans l’emploi principalement motivé par l’accès aux échelons spéciaux, le syndicat avait proposé de modifier l’article R. 224-1  de la façon suivante :

« Les grades du corps des magistrats des chambres régionales des comptes comportent le nombre d’échelons suivant :

1° Président de section de chambre régionale des comptes : quatrecinq échelons et deuxun échelons spécialux ;

2° Premier conseiller de chambre régionale des comptes : septhuit échelons et un échelon spécial ;

3° Conseiller de chambre régionale des comptes : sept échelons. ».

De même, l’article R. 224-2 pourrait être modifié de la façon suivante :

« Le temps à passer dans chacun des échelons des différents grades pour accéder à l’échelon supérieur est fixé comme suit :

1° Un an pour les quatre premiers échelons du grade de conseiller et pour les deux premiers échelons du grade de premier conseiller ;

2° Deux ans pour les 5e et 6e échelons du grade de conseiller, pour les 3e et 4e échelons du grade de premier conseiller et pour le premier échelon du grade de président de section ;

3° Trois ans pour les 5e et 6eet 7e échelons du grade de premier conseiller et pour les 2e, et 3e, 4e  et 5e échelons du grade de président de section. ».

Enfin, il était proposé de supprimer l’article R. 224-3-1 et de le remplacer par un paragraphe rédigé de la façon suivante :

  1. # Pour les premiers conseillers ayant au moins quinze années d’ancienneté dans le corps et au moins sept ans d’ancienneté au 7e échelon de leur grade, l’avancement à l’échelon spécial du grade de premier conseiller se fait dans la limite d’un pourcentage des effectifs du grade fixé par arrêté conjoint du Premier ministre, du ministre chargé du budget et du ministre chargé de la fonction publique. L’accès à cet échelon spécial s’effectue par ordre d’ancienneté dans le 7e échelon.

Pour l’application du premier alinéa, les services accomplis dans les corps ou cadres d’emplois mentionnés à l’article L. 212-5 sont assimilés à des services effectifs dans le corps des magistrats de chambre régionale des comptes.

  1. # Pour les présidents de section ayant atteint le 4e échelon de ce grade depuis au moins cinq ans, l’avancement au premier échelon spécial du grade de président de section se fait dans la limite d’un pourcentage des effectifs du grade fixé par arrêté conjoint du Premier ministre, du ministre chargé du budget et du ministre chargé de la fonction publique. L’accès à cet échelon spécial s’effectue par ordre d’ancienneté dans le 4e échelon.

III. # Pour les présidents de section ayant atteint le premier échelon spécial depuis au moins cinq ans, l’avancement au deuxième échelon spécial du grade de président de section se fait dans la limite d’un pourcentage des effectifs du premier échelon spécial fixé par arrêté conjoint du Premier ministre, du ministre chargé du budget et du ministre chargé de la fonction publique. L’accès à ce deuxième échelon spécial s’effectue par ordre d’ancienneté dans le premier échelon spécial.

Peuvent accéder au choix à l’échelon spécial du grade de président de section, dans la limite d’un pourcentage des effectifs de ce grade fixé par arrêté conjoint du Premier ministre, du ministre chargé de la fonction publique et du ministre chargé du budget, les présidents de section inscrits sur un tableau d’avancement ayant au moins quatre ans d’ancienneté au 5ème échelon de leur grade. L’accès à cet échelon spécial s’effectue par ordre d’ancienneté dans le 5e échelon. ».

Pour en savoir davantage :


Un outil pour développer la gestion des compétences au sein de l’Etat

La troisième édition du répertoire interministériel des métiers de l’État (RIME), publiée le 19 avril 2017 par la direction générale de l’administration et de la fonction publique (DGAFP), présente la diversité croissante des emplois de l’État et l’adaptation permanente des métiers de l’administration.

Enrichie de deux domaines fonctionnels et de 72 nouveaux métiers, cette nouvelle édition valorise également les compétences et les acquis de l’expérience en prenant en compte désormais les compétences managériales et les savoir-être associés à chaque métier.

Le RIME, parce qu’il permet d’objectiver l’identification des emplois, des activités et des compétences, est d’une incontestable utilité pour l’organisation des services et la gestion des parcours professionnels des agents publics. C’est également un outil de communication essentiel à destination des agents publics, des candidats à la fonction publique et plus largement du grand public.

282 emplois-référence (ER) (261 dans l’édition 2010) sont répartis en 28 domaines fonctionnels (DF) (26 en 2010)

Les principaux emplois du domaine fonctionnel « contrôle externe » sont les suivant:

Fruit d’un travail collaboratif avec l’ensemble des directions des ressources humaines des ministères, ce nouvel outil a vocation à être intégré dans les répertoires des métiers ministériels afin de consolider le chaînage des métiers dans le cadre de filières professionnelles, du niveau le plus générique (celui de l’emploi-référence du RIME) au niveau le plus fin (celui du poste de travail).

Afin de faciliter son accès et sa diffusion, une version dématérialisée du nouveau RIME est accessible sur le portail de la fonction publique.

En complément, pour la première fois dans la fonction publique, un moteur de recherche est mis en place à partir du RIME, permettant pour tout agent public ou candidat à la fonction publique d’identifier, en fonction de ses savoir-faire ou de ses savoir-être les emplois référence qui lui correspondent. Ce nouvel outil, accessible sur le portail de la fonction publique, permet à chacun de construire son projet professionnel.

Découvrez-le en cliquant ici :

http://www.fonction-publique.gouv.fr/biep/repertoire-interministeriel-des-metiers-de-letat


La France toujours en déséquilibres excessifs

Selon la commission européenne, la France présente toujours des déséquilibres excessifs mais un certain nombre de développements économiques et de réformes mises en œuvre laissent entrevoir qu’ils sont en cours de correction progressive.

Dans une communication du 22 février 2017, la commission estime que l’importance de la dette publique et la faiblesse de la compétitivité peuvent entraîner des risques pour l’avenir la France, dans un contexte de faible croissance de la productivité. Certes, la compétitivité a commencé à s’améliorer, et les parts de marché à l’exportation se sont stabilisées ces dernières années. La faible croissance de la productivité empêche cependant un rétablissement plus rapide de la compétitivité-coûts en dépit des mesures prises pour réduire le coût de la main-d’œuvre et d’une évolution modérée des salaires. Les marges bénéficiaires des sociétés non financières se sont quelque peu redressées depuis 2013, mais continuent à peser sur l’investissement. La dette publique continue de croître, quoiqu’à un rythme plus faible, et les risques en termes de soutenabilité à moyen terme sont élevés. Les actions visant à améliorer le fonctionnement des marchés des produits et du travail ainsi que la compétitivité des PME n’ont pas encore produit les effet attendus.

La commission reconnaît que les réformes entreprises récemment constituent un progrès notable.  Pour autant, elle considère que les pouvoirs publics doivent encore remédier à certains problèmes et prendre de nouvelles mesures, notamment pour accroître l’efficience des dépenses publiques et de la fiscalité, pour réformer le salaire minimum et le système d’allocations de chômage, et pour améliorer le système d’éducation et l’environnement des entreprises.

Des efforts supplémentaires restent donc nécessaires pour arriver à une correction durable des déséquilibres. Un nouveau programme national de réforme sera vraisemblablement rédigé par le futur gouvernement. S’il répond aux observations de la commission, il devrait permettre de réviser  le classement de la France, de «déséquilibres excessifs» à «déséquilibres».

Pour en savoir davantage:

Déficits excessifs : La France bénéficie d’un traitement privilégié

La procédure visant à corriger les déséquilibres macroéconomiques excessifs est-elle efficace?

L’assouplissement des règles de réduction des déficits publics est contesté par la BCE

 


Rappel des objectifs initiaux du projet de loi portant réforme des juridictions financières


De nombreux collègues ont vécu de façon extrêmement intense les différents soubresauts du projet de loi portant réforme des juridictions financières, jusqu’à sa mise en œuvre partielle voire partiale.  Nombreux sont aussi, désormais, les collègues qui n’étaient pas encore dans les chambres à cette époque. Aussi convient-il de rappeler, alors que nous réfléchissons à un livre blanc sur l’avenir des juridictions financières, que ce projet devait unifier les chambres régionales des comptes  et la Cour des comptes, créer des chambres interrégionales des comptes, et renforcer le rôle de tous les magistrats financiers en matière d’évaluation des politiques publiques.

Après son examen au Conseil d’Etat, le projet de loi portant réforme des juridictions financières  a été  adopté en Conseil des ministres le 28 octobre 2009. Texte alors très attendu, d’ampleur considérable, il devait unifier les chambres régionales des comptes et la Cour des comptes en une seule entité, les CRC devenant de simples chambres de la Cour. Dans ce cadre, des chambres interrégionales des comptes devaient voir le jour. Il s’agissait, notamment, pour le Premier président d’alors, d’atteindre la masse critique permettant une spécialisation des magistrats et d’homogénéiser leurs méthodes afin de favoriser des comparaisons entre collectivités territoriales.

Si les auteurs de ce texte affirmaient que l’examen de gestion des collectivités locales conserverait toute son importance, le projet de loi visait clairement à conforter le travail de tous les magistrats en matière d’évaluation des politiques publiques. Par ailleurs, il faisait de la Cour des comptes la juridiction unique en matière de surveillance et de sanction de la discipline budgétaire et financière. Il créait une juridiction d’appel, ainsi qu’un tribunal de cassation financier. Enfin, une expérimentation de la certification des comptes des collectivités locales par la Cour devait être lancée avec des collectivités volontaires.

Le projet initial a fait l’objet d’une discussion en commission des lois de l’Assemblée nationale. Celle-ci l’a profondément modifié. La réforme devenant impossible, aux yeux du Gouvernement, la décision fut prise de l’abandonner pour l’essentiel et d’incorporer quelques éléments de celle-ci dans un autre texte devenu la loi du 13 décembre 2011 relative à la répartition des contentieux et à l’allègement de certaines procédures juridictionnelles. Depuis lors, d’autres dispositions du projet de loi ont été introduites à l’occasion d’examen de projets législatifs connexes à nos missions, notamment celui de la loi Déontologie, droits et obligations des fonctionnaires :

1) Une unité organique de l’ensemble des juridictions financières

L’article 5 du projet visait à établir l’unité organique de l’ensemble des juridictions financières. Autrement dit, il était proposé d’unifier Cour et chambres régionales des comptes pour en faire une seule et même entité. Les chambres régionales des comptes devaient cesser d’être des juridictions autonomes et devaient devenir des composantes de la Cour, au même titre que ses actuelles chambres. Elles devaient prendre le nom de chambres des comptes. La programmation, les méthodes et la conduite des contrôles concernant les politiques partagées devaient ainsi être unifiées. «Les contrôles seraient ainsi plus homogènes et mieux ciblées», faisaient alors valoir les auteurs du projet de loi. Mais, précisaient-ils, «cela ne remettrait nullement en cause le traditionnel contrôle organique, l’examen de gestion, qui garderait toute son importance». La commission des loi de l’Assemblée nationale s’est prononcée contre cette unité organique.

L’article 2 du projet de loi concernait d’ailleurs la compétence que devait exercer la Cour des comptes dans le contrôle organique des principaux acteurs locaux, dénommé à l’heure actuelle, pour quelques mois encore, «examen de gestion», et «qu’il s’agit (indiquait l’exposé des motifs) de consacrer et de renforcer davantage compte tenu de son importance dans le fonctionnement harmonieux d’une république désormais décentralisée». Les procédures applicables en la matière, de même que les modalités de mise en œuvre de cette compétence devaient être fixées par ordonnance. On se souvient à cet égard que, récemment, le projet initial d’ordonnance n° 2016-1360 du 13 octobre 2016 modifiant la partie législative du code des juridictions financières introduisait de façon subreptice une disposition prévoyant une telle extension des compétences de la Cour aux dépens de celles des chambres régionales et territoriales des comptes. Notre organisation syndicale avait obtenu le retrait de cette disposition.

Le projet de loi proposait la création de chambres interrégionales, visant «à constituer des équipes ayant la masse critique pour mener des travaux complexes et divers, et permettre aux magistrats de se spécialiser». Il s’agissait également «de favoriser l’homogénéité des méthodes de contrôle, de rendre plus faciles les comparaisons entre collectivités, et de conduire à des économies d’échelle par la mutualisation des moyens et des fonctions support». Nous avons connu depuis lors les normes professionnelles (1), le centre d’appui méthode (CAM) et le regroupement des chambres (2), lesquelles ont vu leurs moyens humains d’appui se réduire considérablement à cette occasion, au risque de conduire les magistrats à effectuer des tâches administratives auparavant assurées par un secrétariat dédié.

La détermination des ressorts interrégionaux devait relever du pouvoir réglementaire, ce qui a finalement été décidé (2). Il était précisé, par ailleurs, que les futures chambres régionales pourraient comporter des antennes régionales, implantées dans les sièges des CRC, «afin de favoriser les transitions». Il était également proposé de créer un cadre statutaire unique et commun aux magistrats exerçant au siège et en région. Ces deux projets de dispositions sont en revanche restés lettre morte.

2) Une fonction d’évaluation des politiques publiques affirmée

L’article 3 du projet de loi portait sur l’évaluation des politiques publiques. «La légitimité de l’auditeur en matière d’évaluation doit être plus affirmée», estimaient les auteurs de ce texte. «La répartition actuelle des compétences entre la Cour et les chambres régionales, ainsi que les modalités de programmation, cloisonnées, ne permettent pas d’organiser efficacement, et de façon homogène, l’évaluation des politiques conduites, tant au niveau national que local», était-il constaté. «La conduite d’une enquête commune aux deux niveaux de juridiction prend au moins deux ans. Son organisation est tributaire du choix de chaque CRC, juridiction autonome, de participer ou non au travail en commun. Ceci rendait difficile pour la Cour des comptes de répondre aux demandes d’évaluation, lorsque celles-ci portaient sur des politiques dont la mise en œuvre était en partie décentralisée, ce qui recouvre désormais les cas les plus nombreux et les plus importants». Ont depuis lors été créées les formation inter juridictions (3), puis, plus récemment, à la demande de notre organisation syndicale, la distinction entre FIJ1 et FIJ2 (4).

Le projet de loi décrivait également, dans son exposé des motifs, des ressorts régionaux actuels trop nombreux et trop dissemblables. «Souvent trop restreints, ils ne donnent pas les éléments de comparaison nécessaires, spécialement pour les grandes collectivités.». Il ont ultérieurement été limité à 20 puis à 13 en métropole (2).

3°) La Cour des comptes juridiction budgétaire et financière unique

Le I de l’article 1 du projet de loi faisait de la Cour des comptes la juridiction unique en matière de surveillance et de sanction de la discipline budgétaire et financière. Une juridiction unique de laquelle aurait relevé, en plus des comptables, les ordonnateurs, et gestionnaires, qui sont aujourd’hui du ressort de la Cour de discipline budgétaire et financière (CDBF). «La situation actuelle est en effet celle d’une responsabilité de plus en plus partagée entre l’ordonnateur et le comptable public, tant en termes de tenue des comptes qu’en termes de contrôle de la dépense», indiquait l’exposé des motifs du projet de loi. «Dès lors, la dualité actuelle des juridictions (Cour des comptes pour les comptables, CDBF pour les ordonnateurs), ne se justifie plus» affirmaient les auteurs du projet de loi. Cette unification devait permettre en outre «d’accroître la cohérence, la transparence et la lisibilité des mécanismes de sanction vis-à-vis de l’administration, du parlement, et de l’opinion publique».

Le 1 de l’article 6 devait instituer une cour d’appel des juridictions financières, afin que l’ensemble des justiciables se voit reconnaître la possibilité d’accéder à un juge d’appel. Un tribunal de cassation financier devait être également institué «pour assurer sur l’ensemble des juridictions financières l’homogénéité de jurisprudence souhaitable». Cette proposition avait vivement été contestée par le Conseil d’Etat, seul habilité, selon lui, à casser une décision de la Cour des comptes, juridiction administrative.

La responsabilité des ordonnateurs locaux et nationaux, à l’exception des ministres, qui devaient devenir justiciable de la Cour des comptes (et non plus uniquement de la Cour de discipline budgétaire et financière)  dans le projet de loi de 2009 relatif à la réforme des juridictions financières a été l’objet d’une tentative de sauvetage partiel par amendement lors de l’examen du projet de loi relative à la répartition des contentieux et à l’allègement de certaines procédures juridictionnelles. Le dispositif faisait l’objet d’un article 24 quater qui fut en définitive expurgé de la loi lors de sa lecture à l’Assemblée nationale.

4°) Expérimentation de la certification des comptes des collectivités

Le 1 de l’article 4 de ce projet consacrait le rôle de la Cour des comptes dans le processus de certification des comptes publics. Il était proposé que la Cour coordonne une expérimentation légale de la certification des comptes des collectivités locales, qui devait être menée avec certaines collectivités volontaires. Ce projet a finalement pris corps avec l’article 110 de la loi NOTRé (5). Une telle expérimentation devait  impliquer un certain nombre de conditions préalables, qui devaient être précisées, comme l’établissement d’un compte financier unique, l’adoption de référentiel de normes comptables, le développement du contrôle interne, ce qui – déjà – justifiait un commencement de mise en œuvre de cette mesure différé de trois ans après la promulgation de la loi.

Le Conseil d’Etat avait alors rappelé que l’activité de certification des comptes des administrations autres que l’Etat constitue une activité marchande, qui doit respecter les règles de la commande publique et de la libre prestation de services. Au terme de l’expérimentation, la Cour des comptes était appelée à proposer ses services de certification aux administrations publiques autres que l’Etat dans le respect de ces obligations et, notamment, en respectant leur liberté de choix et en assurant la facturation de ses travaux dans les conditions du marché.

En définitive, seules la responsabilité des gestionnaires et l’unité organique des juridictions financières, y compris dans son volet statutaire, nécessitent encore aujourd’hui une attention soutenue.

Notes:

  1. Article 38 de la loi relative à la répartition des contentieux et à l’allègement de certaines procédures juridictionnelles du 13 décembre 2011;
  2. L’article 46 de la loi relative à la répartition des contentieux et à l’allègement de certaines procédures juridictionnelles du 13 décembre 2011 limite à vingt le nombre de chambre régionale des comptes (CRC) et renvoie à un décret en Conseil d’État le soin de fixer leurs sièges et leurs ressorts. Dès 2012, les juridictions financières avaient engagé une réforme du périmètre des CRC en métropole, les faisant passer de 22 à 15. La loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République a ramené ce nombre à 13 depuis le 1er janvier 2016 ;
  3. Article 40 de la loi relative à la répartition des contentieux et à l’allègement de certaines procédures juridictionnelles du 13 décembre 2011;
  4. Ordonnance n° 2016-1360 du 13 octobre 2016 modifiant la partie législative du code des juridictions financières prise en application de la loi Déontologie, droits et obligations des fonctionnaires;
  5. Loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République.

Un maire peut-il embaucher son conjoint ou ses enfants?

La réponse est bien évidemment non. Les conditions de recrutement au sein de la fonction publique territoriale sont en premier lieu, comme pour les autres fonctions publiques, présidées par le principe d’égal accès aux emplois publics. Ensuite, elles sont encadrées par la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, laquelle prévoit que les emplois publics territoriaux sont prioritairement pourvus par la voie du concours. Ce n’est que dans des cas limitativement énumérés que les collectivités peuvent avoir recours au recrutement d’un agent non titulaire. Quelle que soit l’hypothèse envisagée, c’est l’exécutif qui détient le pouvoir de nomination et à qui il revient de choisir la candidature retenue pour pourvoir l’emploi vacant.

S’agissant du cas où un maire souhaiterait recruter un parent, la voie contractuelle et celle du recrutement direct sans concours sont indissociables d’un risque pénal résultant de l’intérêt moral qu’aurait ce maire à recruter un membre de sa famille. En effet, il convient de faire une lecture combinée des dispositions statutaires applicables à la fonction publique territoriale et celles résultant, d’une part, de l’article 432-12 du code pénal définissant la prise illégale d’intérêt et, d’autre part, de l’article L. 2131-11 du code général des collectivités territoriales, lesquelles tendent à écarter ce type de recrutement.

En ce qui concerne l’état actuel de la jurisprudence de la Cour de cassation, le « délit est caractérisé par la prise d’un intérêt matériel ou moral, direct ou indirect, et se consomme par le seul abus de la fonction, indépendamment de la recherche d’un gain ou de tout autre avantage personnel » (Cour de cassation n° 99-86871 du 21 /06/2000). C’est ainsi que le juge pénal sanctionne l’élu qui a recruté ses deux enfants comme agents non titulaires de la collectivité. En privilégiant les intéressés au mépris des prescriptions légales, il a pris un intérêt moral dans l’attribution de ces deux postes, alors qu’il avait la surveillance de ces opérations et en assurait le paiement. La circonstance que de tels recrutements auraient constitué une pratique courante dans les collectivités territoriales n’exonère pas l’élu du respect de la loi (Cour de cassation n° 05-85276 du 08/03/2006).

Par ailleurs, si la qualification pénale du délit de prise illégale d’intérêt relève, au cas par cas, de la seule appréciation du juge pénal, les juges administratifs censurent l’acte administratif qui expose l’élu à l’application de la sanction pénale. Ainsi, le juge administratif peut être amené à prendre en compte le droit pénal, non pour dire si une infraction a été commise ni pour prononcer une condamnation, mais pour déterminer si un acte administratif a respecté les prescriptions établies par ce droit (C.E. n° 167 502 du 06/12/1996). À titre d’illustration, dans un jugement rendu le 20/12/1995 (n 951390) par le tribunal administratif de Besançon, les juges ont considéré « qu’un conseil municipal ne peut légalement prendre une délibération qui, ayant pour objet d’autoriser un acte tel que le recrutement d’un agent conjoint du maire, exposerait celui-ci, en cas de réalisation effective de cet acte, à l’application de l’article 432-12 du code pénal ; que par suite, Mlle… et M…. sont fondés à soutenir que la délibération attaquée décidant du recrutement de la propre épouse du maire est illégale ». L’arrêt du Conseil d’État, statuant au contentieux, en date du 27/07/2005 (n° 263 714) a ainsi confirmé un jugement initial pris par le tribunal administratif de Papeete du 1210/1999 qui se fondait sur le motif de la filiation des personnes recrutées avec les maire et adjoints de la commune et jugeait qu’il résultait des dispositions de l’article 432-12 du code pénal que l’autorité de tutelle pouvait légalement prononcer l’annulation des actes de recrutement litigieux.

Pour en savoir davantage:

Q.E. n° 75 550 J.O. A.N. du 17/08/2010


La commission nationale des sanctions publie son deuxième rapport annuel

La Commission nationale des sanctions est une institution indépendante chargée de sanctionner les manquements aux obligations issues du dispositif de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme commis par les professions soumises à ce dispositif mais qui n’appartiennent pas au secteur bancaire et financier et qui ne disposent pas d’un ordre professionnel ou d’un organisme disciplinaire.Elle a été instituée par la loi auprès du Ministre de l’économie et est régie par les dispositions du code monétaire et financier. Sa création répond à la volonté des autorités françaises d’assurer, conformément à leurs engagements européens et internationaux, la pleine application et le plein respect du dispositif de lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme par les professions qui y sont soumises.

Présidée par Francis Lamy, la Commission nationale des sanctions a commencé à siéger à la fin de l’année 2014. L’année 2016 aura donc été sa deuxième année de fonctionnement. Elle a remis son deuxième rapport à Michel Sapin le 31 janvier 2017.

Sur saisine du ministre de l’économie, onze affaires examinées ont concerné des agences immobilières et neuf des entreprises de domiciliation. Elles ont consisté principalement en des avertissements et des interdictions temporaires d’exercice de l’activité allant de trois mois à trois ans. Ces interdictions ont été assorties de sursis. Les sanctions pécuniaires se sont échelonnées de 1 000 à 200 000 euros avec sept sanctions d’un montant compris entre 10 000 et 20 000 euros. Les sanctions les plus graves étaient plus élevées que l’année précédente. Cela a pu tenir à la gravité des manquements mais aussi au fait, comme la Commission l’avait indiqué dans son précédent rapport, que l’ignorance de leurs obligations par les professionnels peut plus difficilement être invoquée comme circonstance atténuante avec les années qui passent.

En 2016, pour la première fois, la Commission nationale des sanctions a eu à connaître, sur saisine du ministre de l’intérieur, de deux cas de casinos et de cercles de jeux. Elle a constaté à cette occasion qu’à la différence des autres professionnels, la loi ne prévoyait de sanction pour méconnaissance des obligations applicables qu’à l’égard des personnes physiques, les personnes morales ne pouvant être sanctionnées. L’ordonnance du 1er décembre 2016 renforçant le dispositif français de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme a mis fin à cette exception.

Pour en savoir davantage:

Rapport de la Commission nationale des sanction 2016


Un projet de loi vise à ratifier l’ordonnance du 13 octobre 2016 avant les élections présidentielles

Lors du conseil des ministres du mercredi 4 janvier, le Premier ministre a présenté un projet de loi ratifiant l’ordonnance n° 2016-1360 du 13 octobre 2016 modifiant la partie législative du code des juridictions financières.

L’ordonnance qu’il s’agit de ratifier, prise sur le fondement du II de l’article 86 de la loi n° 2016-483 du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires, modernise, en premier lieu, les dispositions relatives aux missions et à l’organisation des juridictions financières, ainsi que les procédures applicables. Elle simplifie le code des juridictions financières en proposant une architecture plus claire, en y repositionnant les dispositions pertinentes et en abrogeant celles devenues inutiles.

En deuxième lieu, l’ordonnance modifie le statut des membres des juridictions financières. Elle précise le champ d’application des normes professionnelles fixées par le Premier président auxquelles sont tenus de se conformer les magistrats, les conseillers maîtres et référendaires en service extraordinaire, les conseillers experts à la Cour des comptes, ainsi que les rapporteurs extérieurs de la Cour et des chambres régionales et territoriales des comptes.

Enfin, l’ordonnance apporte des clarifications relatives aux règles d’organisation et de procédure applicables à la Cour de discipline budgétaire et financière, qui dataient pour la plupart de 1948, afin de tenir compte des règles de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme, de l’adaptation des pratiques et d’évolutions jurisprudentielles établies.

Le projet de partie réglementaire du code sera présenté pour avis au membres du Conseil supérieur réunis le 1 er février 2017.

Pour en savoir davantage:


Faits et chiffres des trois fonctions publiques en 2016

L’édition 2016 du rapport annuel sur l’état de la fonction publique rassemble les chiffres et les analyses sur les ressources humaines des trois versants de la fonction publique.

L’année 2015-2016 a été marquée par plusieurs temps forts, en particulier le rendez-vous salarial du 17 mars 2016 consacré à la revalorisation du point d’indice ; la mise en œuvre du protocole sur les parcours professionnels, les carrières et les rémunérations ; la publication de la loi n° 2016-483 du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires ; la construction d’une politique d’ensemble pour garantir l’égalité d’accès aux emplois publics et lutter contre les discriminations ; le déploiement du régime indemnitaire lié aux fonctions et à l’engagement professionnel.

Le rapport est construit autour de deux titres :
– le titre 1, « Politiques et pratiques de ressources humaines », expose les principales évolutions de la fonction publique en 2015-2016 et décline les mesures mises en place pour répondre aux objectifs de sa modernisation :
– le titre 2, « Faits et chiffres », est destiné à partager le plus largement possible les données et les analyses sur les ressources humaines des trois versants de la fonction publique – emploi, recrutements et parcours professionnels, retraites, formation, rémunérations, conditions de travail et politique sociale – qui permettent d’alimenter le dialogue social et de nourrir le débat public.

Enfin, deux dossiers présentent les résultats d’études inédites sur la mobilité dans la fonction publique de 2011 à 2014, d’une part, et sur la mobilité des 50 ans et plus dans le secteur public et entre secteurs public et privé, d’autre part.

Pour en savoir davantage:

Politiques et pratiques de ressources humaines

Faits et chiffres : l’essentiel sur l’état de la fonction publique

Faits et chiffres : les chiffres clés 2016

Les chiffres clés de la fonction publique (dossier de presse)

Le dossier « Mobilité et restructuration dans la fonction publique de 2011 à 2014 »

Le dossier « Changer de type d’employeur après 50 ans, au sein de la fonction publique ou entre secteurs public et privé »