Le syndicat des juridictions financières, qui représente plus des deux tiers des magistrats des chambres régionales des comptes, s’est procuré le projet d’ordonnance relatif au régime de responsabilité financière des gestionnaires publics, dont l’entrée en vigueur est prévue en 2023. Il déplore son contenu qui programme l’affaiblissement du contrôle externe sur l’usage de l’argent public et conduit à la disparition de facto du statut de juridictions des CRC.

Retrouvez ici le communiqué du SJF publié ce jour (10 février 2022), mis également en ligne sur LinkedIn et Twitter :

Communiqué (10 février 2022) : Le syndicat des magistrats financiers déplore l’affaiblissement du contrôle de la bonne utilisation de l’argent public

Le Syndicat des Juridictions Financières (SJF), qui représente plus des deux tiers des magistrats des chambres régionales des comptes (CRC), s’est procuré le projet d’ordonnance relatif au régime de responsabilité financière des gestionnaires publics, qui devrait être signé en mars pour une entrée en vigueur début 2023.

Outre la quasi-absence de concertation menée sur ce sujet avec les professionnels que sont les magistrats financiers et les personnels de la Cour et des CRC, le syndicat déplore son contenu qui programme l’affaiblissement du contrôle externe sur l’usage de l’argent public et conduit à la disparition de facto du statut de juridictions des CRC.

Les CRC sont des juridictions créées au début des années 1980 pour accompagner la décentralisation. Elles ont pour missions de contrôler les comptes et la gestion des organismes publics locaux et de juger les comptes des comptables publics locaux. Elles publient en moyenne chaque année plus de 600 rapports et rendent près de 400 jugements. Les recommandations qu’elles émettent sont suivies à plus de 75 %.

Dans le cadre de la démarche « Juridictions Financières 2025 » lancée par le Premier Président de la Cour des comptes, un sondage a montré que 7 Français sur 10 faisaient confiance aux CRC et que plus de 80 % des personnes interrogées étaient favorables à ce que la mauvaise gestion des fonds publics puisse être sanctionnée par elles.

La réforme de la responsabilité des gestionnaires publics que le syndicat appelait de ses vœux depuis plusieurs années devait permettre de mettre fin à deux régimes à bout de souffle, celui des dirigeants des organismes publics (appelés ordonnateurs) et celui des comptables, pour créer un régime unique permettant de sanctionner les véritables responsables de fautes de gestion.

La réforme proposée ne réalise que la moitié de ce chemin. Elle supprime les deux régimes existants pour en créer un nouveau qui ne cible pas les véritables responsables (les ordonnateurs élus et les ministres n’en sont pas justiciables) et encadre fortement les pouvoirs du juge, ce qui conduira à un contentieux très réduit et pas toujours équitable.

L’ordonnance s’inscrit aussi à rebours de la décentralisation, en retirant leur mission juridictionnelle aux CRC, juridictions de proximité, et en la recentralisant dans une chambre de la Cour des comptes, à Paris. Elle apparaît aussi dans la continuité de la réduction du réseau des trésoreries du ministère des Finances, ce qui a amoindri leurs capacités de contrôle.

En conséquence, elle affaiblit l’autorité des CRC vis-à-vis des entités publiques locales, limitant leur rôle à de l’audit et de l’évaluation, ce que font déjà différents organes administratifs de contrôle et cabinets privés de conseil. Au final, alors que les Français demandent plus de proximité, de transparence et de responsabilité, le SJF regrette que cette réforme leur offre exactement l’inverse.

Contact presse : Pierre Genève, Président du SJF, sjf@ccomptes.fr / 06.50.71.33.55