Publiée au Journal officiel de la République française du 11 août 2016, la loi n° 2016-1090 du 8 août 2016 relative aux garanties statutaires, aux obligations déontologiques et au recrutement des magistrats, ainsi qu’au Conseil supérieur de la magistrature (CSM) renforce l’indépendance et l’impartialité des magistrats judiciaires. Elle modifie les modalités de recrutement par voie de concours en facilitant notamment l’intégration directe, et fixe le déroulement de la formation professionnelle destinée aux auditeurs de justice ainsi qu’aux candidats admis aux concours. Elle prévoit la nomination, par décret du Président de la République, des procureurs généraux près les cours d’appel, après avis du CSM, et des juges des libertés et de la détention sur proposition du garde des Sceaux après avis conforme du CSM. Le texte consacre le principe de la liberté syndicale des magistrats et modernise les modalités de leur évaluation professionnelle. En matière de prévention des conflits d’intérêts, il instaure un entretien déontologique obligatoire et impose aux magistrats de soumettre une déclaration d’intérêts à leur hiérarchie dans les deux mois suivant l’installation dans leurs fonctions. Les membres du CSM, soumis à cette obligation, doivent en outre déclarer leur patrimoine au président de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP). Un collège de déontologie est créé, chargé de rendre des avis sur les situations individuelles et d’examiner les déclarations d’intérêts des magistrats.
Dans une décision n°2016-732 du 12 juillet 2016 le Conseil constitutionnel a déclaré contraires au principe d’égalité l’article 72-1 de la loi du 8 août 2016 fixant les conditions de retour de détachement des magistrats, ainsi que certaines dispositions de son article 26 qui imposaient aux seuls hauts magistrats de remettre à la HATVP une déclaration de leur situation patrimoniale. Au titre de sa jurisprudence sur les « cavaliers législatifs », il a également censuré l’article 48 qui imposait le dépôt de déclarations d’intérêts et de patrimoine aux membres du Conseil constitutionnel et l’article 49 qui fixait les conditions de dépôt d’une question prioritaire de constitutionnalité en matière correctionnelle et contraventionnelle.
Cette décision remet en question les dispositions comparables posées par l’article L. 220-9 du code des juridictions financières, créé par la loi n° 2016-483 du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires selon lesquelles « Dans les deux mois qui suivent leur prise de fonctions et dans les deux mois qui suivent la cessation de leurs fonctions, les présidents de chambre régionale des comptes et les procureurs financiers adressent une déclaration de situation patrimoniale au président de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique ». En effet, comme l’a indiqué le Premier président lors de la réunion du Conseil supérieur du 15 septembre, le décret d’application de cette disposition doit être pris en Conseil d’Etat. Or la Haute juridiction administrative ne manquera pas de relever qu’un tel décret contrevient désormais à une jurisprudence du Conseil constitutionnel.
L’obligation de déclaration de patrimoine ne peut désormais être imposée qu’à tous les magistrats. Elle ne peut cibler telle ou telle catégorie d’entre eux. Il est peu vraisemblable que le législateur reprenne sa copie et impose cette obligation à plusieurs milliers de magistrats judiciaires, administratifs et financiers, au risque d’engorger inutilement les services de la HATVP.
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