Mise en oeuvre du télétravail dans la fonction publique et la magistrature

Pris en application de la loi n°2012-387 du 22 mars 2012 relative à la simplification du droit et à l’allégement des démarches administratives, le décret n°2016-151 du 11 février 2016 relatif aux conditions et modalités de mise en œuvre du télétravail dans la fonction publique et la magistrature a été publié au Journal officiel de la République française du 12 février 2016. Il définit le télétravail comme « toute forme d’organisation du travail dans laquelle les fonctions qui auraient pu être exercées par un agent dans les locaux de son employeur sont réalisées hors de ces locaux de façon régulière et volontaire en utilisant les technologies de l’information et de la communication », le télétravail étant organisé au domicile de l’agent ou dans des locaux professionnels distincts de ceux de son employeur public.

Le texte prévoit que la quotité des fonctions pouvant être exercées sous forme de télétravail ne peut être supérieure à trois jours par semaine et que le temps de présence sur le lieu d’affectation ne peut être inférieur à deux jours par semaine. L’organisation du travail sous forme de télétravail ne peut résulter que d’une demande écrite de l’agent. L’autorisation est accordée par le chef de service, l’autorité territoriale ou l’autorité investie du pouvoir de nomination pour une durée maximale d’un an et peut être refusée en cas d’incompatibilité du télétravail avec la nature des activités exercées, si l’intérêt du service le justifie ou si les installations au domicile du demandeur ne sont pas conformes aux spécifications techniques précisées par l’administration. Les agents exerçant leurs fonctions en télétravail bénéficient des mêmes droits et obligations que les agents exerçant sur leur lieu d’affectation. Après avis du comité technique, des textes d’application préciseront notamment la liste des activités éligibles au télétravail, les modalités de prise en charge obligatoire, par l’administration, des coûts découlant directement de l’exercice du télétravail (matériels, logiciels, abonnements, communications…).

Pour en savoir plus:

Rapport de Michel Rasera sur Le Télétravail dans les juridictions financières, 2012.

Rapport de LARTAIL Michel, SIBEN Cédric et BETTINELLI Benoît sur les Perspectives de développement du télétravail dans la fonction publique, Conseil général de l’industrie, de l’énergie et des technologies, 2011.


Publication et transmission des actes des collectivités territoriales

Le décret n° 2016-146 du 11 février 2016 relatif aux modalités de publication et de transmission, par voie écrite et par voie électronique, des actes des collectivités territoriales et des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) a été publié au Journal officiel de la République française le 12 février 2016. Pris en application de la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe), il prévoit que la diffusion des recueils des actes administratifs des communes, EPCI, départements et régions, sous format papier, « peut être effectuée à titre gratuit ou par vente au numéro ou par abonnement » et que le compte rendu des séances d’un conseil municipal « est affiché, par extraits, à la porte de la mairie et est mis en ligne sur le site internet de la commune, lorsqu’il existe ». Les actes des communes, départements et régions, publiés sous format électronique, doivent être mis à la disposition du public sur le site internet de ces collectivités, « dans leur intégralité, sous un format non modifiable et dans des conditions propres à en assurer la conservation, à en garantir l’intégrité et à en effectuer le téléchargement ». La version électronique de ces actes comporte, par ailleurs, « la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de leur signataire ».


Commande publique : le bloc communal, principal donneur d’ordre

L’Assemblée des communautés de France (AdCF) et la Caisse des dépôts et consignations (CDC) ont souhaité constituer un outil analytique de l’évolution de la commande publique et des investissements de l’Etat et des collectivités dans les régions et les territoires. Les deux partenaires ont fait appel aux données de  la société Vecteur Plus qui analyse l’ensemble des procédures de marchés publics soumises aux règles de mise en concurrence et de publicité, soit audessus des seuils légaux de 15 k€ (jusqu’au 1er janvier 2016).

L’analyse AdCF – CDC de la commande publique met en lumière l’identité des « donneurs d’ordre » et leur évolution de leur comportement d’achat depuis 2012. Sans surprise, les collectivités locales et leurs opérateurs (EPL, bailleurs sociaux…) portent  l’essentiel de la commande (74% en moyenne entre 2012 et 2015). Au sein de cette « sphère » des administrations publiques locales (APUL), le bloc communal (communes+ communautés + syndicats) est de loin le principal donneur d’ordre. A lui seul, il contribue pour près de la moitié du montant total de la commande publique, avec plus de 30 milliards d’€ en 2015 sans comptabiliser la commande propre de leurs opérateurs tels que les entreprises publiques locales (EPL) et les bailleurs sociaux ; ceux-ci pouvant être rattachés à différents niveaux de collectivités.

Pour en savoir plus: La note de l’AcDF sur l’évolution de la commande publique

 


La Haute Autorité pour la transparence de la vie publique publie son premier rapport d’activité

Chargée notamment de recevoir et de contrôler les déclarations de situation patrimoniale et les déclarations d’intérêts des principaux responsables publics, la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) a présenté, le 5 février 2016, son premier rapport d’activité. Elle y rappelle les conditions de sa création et les défis auxquels elle a été confrontée concernant l’identification des personnes assujetties aux déclarations, la gestion des obligations déclaratives des déclarants et leur accompagnement dans les démarches à effectuer.

En 2014 et 2015, la HATVP a reçu près de 18 000 déclarations émanant de l’ensemble des membres du Gouvernement, d’élus ou de hauts fonctionnaires, dont 2 000 ont été publiées sur internet ou mises à disposition en préfecture. Ses deux premières années d’activité lui ont permis de mettre en œuvre l’ensemble des prérogatives lui ayant été confiées par le législateur en matière de contrôle des situations fiscales et patrimoniales des membres du Gouvernement et des parlementaires, ainsi que de contrôle des intérêts des responsables publics. Si des difficultés sont apparues, notamment dans l’articulation entre les compétences de l’administration fiscale et celles de la Haute autorité, ces deux années ont aussi permis à la HATVP de préciser son interprétation de la notion de conflit d’intérêts et les critères caractérisant cette situation.

Présentant des propositions pour renforcer son action et préciser certaines dispositions des lois du 11 octobre 2013 relatives à la transparence de la vie publique, notamment quant aux obligations déclaratives pesant sur les présidents et directeurs généraux de certaines entreprises, organismes ou établissements publics, la HATVP recommande de permettre la pleine information du Président de la République et du Premier ministre en cas de difficulté dans la situation d’un membre du Gouvernement ou d’une personne pressentie pour occuper une telle fonction ; de rendre obligatoire la télédéclaration et de simplifier et améliorer la liste des informations demandées aux déclarants ; de doter la Haute autorité d’un droit de communication propre et de lui donner accès aux applications de l’administration fiscale afin de mener à bien ses contrôles.


Le décret sur le télétravail enfin publié

Le décret n° 2016-151 du 11 février 2016 relatif aux conditions et modalités de mise en œuvre du télétravail dans la fonction publique et la magistrature  précise les conditions de mise en œuvre du télétravail, modalité d’organisation du travail prévue par l’article 133 de la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 relative à l’accès à l’emploi titulaire et à l’amélioration des conditions d’emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique. Le télétravail est un mode d’organisation du travail dont l’objectif est de mieux articuler vie personnelle et vie professionnelle. Les autres formes de travail à distance (travail nomade, travail en réseau…) n’entrent pas dans le champ d’application du décret ». Le décret concerne les « fonctionnaires, agents publics civils non fonctionnaires, magistrats ».

Définition du télétravail (article 2)

« Le télétravail désigne toute forme d’organisation du travail dans laquelle un travail qui aurait également pu être exécuté dans les locaux de l’employeur est effectué par un agent hors de ces locaux de façon régulière et volontaire, en utilisant les technologies de l’information et de la communication. Il se pratique en priorité au domicile de l’agent ou, le cas échéant, dans des locaux professionnels distincts de ceux de son employeur public et de son lieu d’affectation. Les périodes d’astreintes mentionnées à l’article 5 du décret du 25 août 2000 susvisé, à l’article 5 du décret du 12 juillet 2001 susvisé et à l’article 20 du décret du 4 janvier 2002 susvisé, ne constituent pas du télétravail au sens du présent décret ».

Quotité possible d’exercice en télétravail (article 3)

« La quotité de travail ouverte au télétravail est plafonnée à trois jours par semaine. Le temps de présence sur le lieu d’affectation ne peut être inférieur à deux jours par semaine. Les seuils définis au premier alinéa peuvent s’apprécier sur une base mensuelle. A la demande des agents dont l’état de santé le justifie et après avis du médecin de prévention ou du médecin du travail, il peut être dérogé pour six mois maximum aux premier et deuxième alinéas. Cette dérogation est renouvelable une fois après avis du médecin de prévention ou du médecin du travail. ».

Procédure à suivre pour l’agent (article 4)

« L’exercice des activités en télétravail est accordé sur demande écrite de l’agent. Le chef de service apprécie la compatibilité de la demande avec la nature des fonctions exercées et l’intérêt du service. La demande précise les jours que l’agent souhaite consacrer au télétravail ainsi que le ou les lieux d’exercice y afférents. L’autorisation est accordée sous réserve de la conformité des installations électriques et de l’accès à internet, attestés par l’agent par tout moyen, ainsi que du respect des règles applicables en matière de sécurité et de protection de la santé. La durée de l’autorisation est d’un an maximum. Elle est renouvelable par décision expresse, après entretien avec le supérieur hiérarchique direct qui émet un avis. En cas de changement de fonctions, la demande de télétravail doit être renouvelée par l’agent concerné. L’arrêté individuel ou l’avenant au contrat de travail mentionné à l’article 7 peut prévoir une période d’adaptation de trois mois maximum. L’autorisation de télétravail est réversible. En dehors de la période d’adaptation prévue à l’alinéa précédent, il peut être mis fin à cette forme d’organisation du travail, à tout moment et par écrit, à l’initiative de l’agent, moyennant un délai de prévenance de deux mois. Dans le cas où il est mis fin à l’autorisation de télétravail à l’initiative de l’administration, le délai de prévenance peut-être réduit en cas de nécessité du service dûment motivée . Pendant la période d’adaptation, ce délai est ramené à un mois. Les refus opposés à une demande initiale ou de renouvellement de télétravail formulée par un agent exerçant des activités éligibles fixées par l’un des actes mentionnés à l’article 6, ainsi que l’interruption du télétravail à l’initiative l’administration, doivent être précédés d’un entretien et motivés dans les conditions définies par la loi du 11 juillet 1979 susvisée.

Les droits de l’agent « télétravailleur » (article 5)

Les agents exerçant leurs fonctions en télétravail bénéficient des mêmes droits et obligations que les agents exerçant leurs fonctions sur leur lieu d’affectation. L’employeur prend en charge les coûts découlant directement de l’exercice du télétravail, notamment le coût des matériels, logiciels, abonnements, communications et outils ainsi que de la maintenance de ceux-ci.

Procédure à suivre par l’employeur (article 6)

Un arrêté ministériel, une délibération de l’assemblée délibérante, une décision du directeur de l’établissement public, pris après avis du comité technique compétent et le cas échéant du CHSCT, précise : – les activités éligibles au télétravail, – le cas échéant, la liste et la localisation des locaux professionnels mis à disposition par l’administration pour l’exercice du télétravail, le nombre de postes de travail qui y sont disponibles et leurs équipements, – les règles à respecter en matière de sécurité des systèmes d’information et de protection des données, – les règles à respecter en matière de temps de travail, de sécurité et de protection de la santé, – les modalités d’accès des autorités compétentes sur le lieu d’exercice du télétravail afin de s’assurer de la bonne application des règles applicables en matière d’hygiène et de sécurité, – les modalités de contrôle et de comptabilisation du temps de travail, – les modalités de prise en charge, par l’employeur, des équipements et des coûts découlant directement de l’exercice du télétravail, notamment le coût de l’utilisation, du renouvellement et de la maintenance des matériels, logiciels, abonnements et communications, – les modalités de formation aux équipements et outils nécessaires à l’exercice du télétravail, – le cas échéant, la durée de l’autorisation mentionnée à l’article 4 si elle est inférieure à un an. II. – Après consultation du comité technique compétent et le cas échéant du CHSCT, une décision du chef de service peut expliciter et adapter les conditions de mise en œuvre du télétravail prévues au I dans les services placés sous son autorité. III. – Dans les directions départementales interministérielles, les conditions de mise en œuvre du télétravail prévues au I font l’objet d’un arrêté du Premier ministre, pris après avis du comité technique des directions départementales interministérielles et le cas échéant du CHSCT.

Documents actant le télétravail (article 7)

« L’accord du chef de service à la demande de télétravail est formalisé soit par un arrêté individuel, soit par un avenant au contrat de travail. L’arrêté ou l’avenant mentionne les activités de l’agent exercées dans le cadre du télétravail, le lieu ou les lieux d’exercice du télétravail, la date de prise d’effet de la situation de télétravail et sa durée, ainsi que, le cas échéant, la période d’adaptation prévue à l’article 4 et sa durée. Il comporte en annexe les journées de référence consacrées au télétravail et au travail sur cycle, compte tenu du cycle de travail applicable à l’agent, et les plages horaires durant lesquelles l’agent exerçant ses fonctions en télétravail est à la disposition de son employeur et peut-être contacté, par référence au cycle de travail de l’agent ou aux amplitudes horaires habituelles. Lors de la notification de l’arrêté individuel ou de la signature de l’avenant au contrat de travail, le chef de service remet à l’agent un document d’information indiquant les conditions d’application à sa situation professionnelle de l’acte mentionné à l’article 6, notamment : – la nature et le fonctionnement des dispositifs de contrôle et de comptabilisation du temps de travail, – la nature des équipements mis à disposition de l’agent exerçant ses fonctions en télétravail et leurs conditions d’installation et de restitution, les conditions d’utilisation, de renouvellement et de maintenance de ces équipements, de fourniture, par l’employeur, d’un service d’appui technique. Ce document d’information remis à l’agent comprend également une copie de l’acte mentionné à l’article 6 et un rappel de ses droits et obligations en matière de temps de travail et d’hygiène et de sécurité.


L’influence française au sein de l’Union européenne

Le 2 février 2016, la commission des affaires européennes de l’Assemblée nationale a examiné le rapport d’information, déposé par les députés Christophe Caresche et Pierre Lequiller, relatif à l’influence française au sein de l’Union européenne (UE). L’affaiblissement de cette influence résulte en partie des vagues d’élargissements successifs qui ont dilué la présence française au sein des institutions européennes et contribué à la diminution de l’usage du français dans le fonctionnement de l’administration européenne (la part des textes rédigés en français à la Commission européenne est passé de 16,5% en 2005 à 5% en 2015). Il est relevé que le déficit public excessif de la France a conduit à affaiblir son poids politique sur la scène européenne. Par ailleurs, la faiblesse de la position française au Parlement européen et la diminution de la présence des Français dans l’administration européenne demeurent des facteurs majeurs de cette perte d’influence. En revanche, le rapport relève la bonne adaptation de l’administration française aux enjeux européens et la faculté croissante des collectivités territoriales et des entreprises françaises à défendre leurs intérêts à Bruxelles. 30 propositions visant à accroître la présence française sont formulées : renforcer les effectifs de la Représentation permanente et du SGAE en charge du suivi de la présence française, mettre en place un système de bourses pour la préparation des concours européens, instaurer une obligation de mobilité européenne pour les postes de la fonction publique d’État avec une forte dimension européenne, clarifier le positionnement du SGAE, placer le ministre des affaires européennes sous l’autorité du Premier ministre plutôt que du ministre des affaires étrangères ou encore créer un « Conseil stratégique sur l’Europe » réunissant autour du Président de la République, le Premier ministre, le ministre des affaires étrangères, le ministre de l’économie et des finances, le ministre en charge des affaires européennes et tout autre ministre ayant à connaître de l’ordre du jour.


Décentralisation : sortons de la confusion

Dans un rapport intitulé « Décentralisation : sortons de la confusion« , l’Institut Montaigne a exploré cinq pans de l’action publique locale qui souffrent plus particulièrement de l’éclatement des politiques publiques : les aides sociales, l’investissement, le développement économique territorial, l’emploi et la formation professionnelle et l’apprentissage.

Par la mise en lumière des imbrications et des incohérences dont ces politiques font l’objet, le rapport propose de nouvelles pistes de réformes :

• la rationalisation de la mise en œuvre des principales politiques publiques à l’échelle locale, la meilleure organisation des différents acteurs entre eux et l’efficacité des dispositifs. La simplification de la répartition des compétences sera permise par la constitution d’opérateurs uniques, le transfert de compétences au profit d’une seule entité et la décentralisation complète de certaines politiques. La mise en place de structures nouvelles ne doit plus se faire sans réduction et rationalisation préalable de l’existant.

• la poursuite d’une meilleure répartition du pouvoir normatif, associant davantage les collectivités. Ce rééquilibrage entre pouvoir central et pouvoir local se fera par la systématisation de l’évaluation ex post des réformes, l’élévation du pouvoir règlementaire des collectivités au même niveau que celui de l’État et le renforcement des possibilités d’expérimentation.

• l’identification des principaux leviers de redressement des finances publiques locales. La maîtrise des finances publiques nécessite un renforcement de la règle d’or pour les collectivités, la maîtrise des dépenses de fonctionnement – avec une attention toute particulière portée aux frais de personnels – et le maintien d’un investissement public local concerté et cohérent.

Pour en savoir davantage:

 


La gestion de la crise financière par la Commission n’a pas été optimale

En 2008, l’Europe a été confrontée à une crise financière qui s’est muée en crise de la dette souveraine. Celle-ci s’explique par une conjonction de facteurs, comme la faiblesse de la surveillance bancaire, l’application de mauvaises politiques budgétaires et les difficultés rencontrées par de grandes institutions financières (dont le coûteux sauvetage a dû être financé avec l’argent du contribuable). La crise a déferlé sur les États membres de l’Union européenne en deux temps: elle a d’abord touché les pays situés en dehors de la zone euro (en 2008-2009), avant de s’étendre à cette dernière. Au total, huit États membres ont été contraints de demander une assistance macrofinancière: la Hongrie, la Lettonie, la Roumanie, l’Irlande, le Portugal, la Grèce, l’Espagne et Chypre.

 

Dans un rapport spécial n° 18/2015, intitulé «L’assistance financière aux pays en difficulté», la Cour européenne des comptes a cherché à déterminer si la Commission avait géré les programmes d’assistance financière de manière appropriée. Pour ce faire, La Cour a répondu aux questions ci-après: i) L’accroissement des risques budgétaires a-t-il été détecté à temps?; ii) Les procédures étaient-elles suffisamment bien pensées pour contribuer pleinement aux décisions relatives aux programmes?; iii) La Commission a-t-elle emprunté aux meilleurs taux possibles et conformément aux meilleures pratiques en matière d’émission de dette?; iv) Les programmes d’assistance financière ont-ils atteint leurs objectifs principaux?

 

Selon ce rapport publié le 26 janvier, la Commission européenne n’était pas préparée aux premières demandes d’assistance financière lors de l’éclatement de la crise de 2008 parce que les signes avant-coureurs étaient passés inaperçus. L’auditeur externe de l’UE a constaté qu’en dépit de son manque d’expérience, la Commission a réussi à gérer les programmes d’assistance qui ont conduit à des réformes, et souligne un certain nombre d’effets positifs. Il pointe toutefois plusieurs problèmes liés à certaines faiblesses relevées dans la gestion de la crise par la Commission: les différences de traitement d’un pays à l’autre, le contrôle de la qualité limité, les faiblesses dans le suivi de la mise en œuvre et les insuffisances dans la documentation.

«Les effets de la crise se font toujours sentir aujourd’hui et les programmes de prêts lancés pour tenter d’y remédier se chiffrent désormais en centaines de milliards», a déclaré M. Baudilio Tomé Muguruza, le Membre de la Cour des comptes européenne responsable du rapport. «Il est donc impératif que nous tirions les enseignements des erreurs commises.»

La Cour a analysé la gestion, par la Commission, de l’assistance financière fournie à cinq États membres (Hongrie, Lettonie, Roumanie, Irlande et Portugal). Elle a constaté que la Commission avait réussi à assumer ses nouvelles responsabilités de gestion, ce qu’elle considère comme un tour de force vu le calendrier serré. À mesure que la crise prenait de l’ampleur, la Commission a mobilisé de plus en plus d’expertise au niveau interne et a noué un dialogue avec de nombreuses parties prenantes dans les pays concernés. Les réformes mises en place par la suite ont également permis de renforcer la surveillance macroéconomique.

Tout en soulignant un certain nombre d’effets positifs importants, le rapport d’audit détaillé relève quatre grandes pierres d’achoppement dans la gestion de la crise par la Commission, à savoir les différences dans les approches suivies, le caractère limité du contrôle de la qualité, les faiblesses dans le suivi de la mise en œuvre et les insuffisances dans la documentation.

Les auditeurs de la Cour ont pu constater que les programmes ont bien atteint leurs objectifs. À quelques exceptions près, les objectifs de déficit révisés ont été respectés. Les déficits structurels se sont améliorés, mais à un rythme variable. Les États membres ont satisfait à la plupart des conditions énoncées dans leurs programmes, moyennant toutefois quelques retards. Les programmes ont conduit à des réformes. En règle générale, les pays ont poursuivi dans la voie des réformes requises par les conditions des programmes et, dans quatre des cinq pays concernés, le redressement de la balance courante a été plus rapide que prévu.

Les auditeurs de la Cour ont relevé plusieurs cas où des pays n’ont pas été traités de la même manière, alors qu’ils se trouvaient dans une situation comparable. Dans certains programmes, les conditions de l’assistance étaient moins strictes, ce qui permettait de les respecter plus aisément. Les réformes requises n’étaient pas toujours proportionnelles aux problèmes rencontrés ou empruntaient des voies très différentes. Les objectifs de déficit de certains pays étaient plus souples qu’ils n’auraient dû l’être au regard de la situation économique.

L’examen des principaux documents par les équipes de programme de la Commission était insuffisant à plusieurs égards. Les calculs sous-jacents n’ont été examinés par aucun vérificateur extérieur à l’équipe, les travaux des experts n’ont fait l’objet d’aucun contrôle approfondi et le processus de réexamen n’était pas bien documenté.

La Commission a utilisé des objectifs de déficit en comptabilité d’exercice, dont la réalisation ne peut être vérifiée qu’après un certain temps. Cette approche assure une cohérence avec la procédure concernant les déficits excessifs, mais elle implique aussi que, lorsqu’une décision doit être prise à propos de la poursuite des programmes, la Commission ne peut certifier que l’État membre bénéficiaire a atteint l’objectif de déficit fixé.

La Commission utilisait un outil de prévision existant, qui se présentait sous forme de feuilles de calcul et qui était plutôt complexe. La documentation ne facilitait pas un retour en arrière pour évaluer les décisions prises. La disponibilité des pièces s’est améliorée avec le temps, mais même pour les programmes les plus récents, certains documents clés étaient manquants. Les conditions prévues dans les protocoles d’accord n’étaient pas toujours suffisamment axées sur les conditions de politique économique générale fixées par le Conseil.

 

La Cour des comptes européenne recommande à la Commission européenne:

• de mettre en place, à l’échelle de l’institution, un cadre permettant une mobilisation rapide de son personnel et de son expertise dès lors qu’un programme d’assistance financière se dessine;
• de soumettre son processus prévisionnel à un contrôle de la qualité plus systématique;
• d’améliorer la conservation des documents et d’y prêter attention lors de l’examen de la qualité;
• de veiller à la mise en place de procédures appropriées pour examiner la qualité de la gestion des programmes et du contenu des documents relatifs à ces derniers;
• d’inclure, dans les protocoles d’accord, des variables qu’elle peut obtenir dans des délais courts;
• d’opérer une distinction entre les conditions en fonction de leur importance et de cibler les réformes véritablement essentielles;
• de formaliser la coopération interinstitutionnelle avec les autres partenaires du programme;
• de rendre le processus de gestion de la dette plus transparent;
• d’analyser de manière plus approfondie les principaux aspects de l’ajustement des pays après la clôture des programmes.

La Cour n’a pas contrôlé les décisions prises au niveau politique de l’UE. Elle n’a pas pris en considération le scénario contrefactuel d’une absence d’assistance financière, pas plus qu’elle n’a examiné la faisabilité d’une résolution des crises par d’autres moyens. Elle n’a pas non plus évalué la soutenabilité de la dette ni la probabilité du remboursement des prêts. Par ailleurs, elle n’a pas étudié la question de savoir si le Conseil avait choisi les objectifs de déficit ou les conditions structurelles les plus appropriés pour résoudre la crise. Enfin, lorsque la Cour a examiné la coopération entre la Commission et les autres partenaires, elle ne s’est pas demandé si leur participation était justifiée.
Hongrie 
L’effondrement de l’entreprise Lehman Brothers a ébranlé la confiance des investisseurs au début du mois d’octobre 2008. Il s’en est suivi une liquidation des titres d’État, une vente aux enchères ratée d’obligations et une dépréciation monétaire marquée. L’inquiétude régnant sur les marchés des changes a déclenché une pression sur la liquidité des banques, qui ont éprouvé des difficultés à renouveler leurs swaps de change. La Hongrie a demandé une assistance financière parce qu’elle redoutait de voir le vent de panique déstabiliser les mécanismes de marché au point de saper brusquement la capacité de financement extérieur du pays.
Lettonie
Au cours des trois mois qui ont précédé la demande d’assistance, les dépôts avaient reculé de 10 %. Ce phénomène était dû à des retraits massifs à la banque Parex, qui a été confrontée à de graves problèmes de liquidité après avoir perdu plus d’un quart de ses dépôts. Durant la même période, les réserves officielles avaient fondu de près de 20 % à la suite de la vente, par la banque centrale de Lettonie, de devises étrangères pour défendre l’ancrage de la monnaie locale. En novembre 2008, le gouvernement a décidé d’intervenir et de nationaliser la banque Parex et, un mois plus tard, il soumettait à des restrictions les retraits des dépôts relatifs à celle-ci. Selon le premier ministre, la Lettonie avait besoin d’une assistance financière pour trois raisons: gérer la banque Parex, financer le déficit budgétaire et stabiliser le marché financier. Les inquiétudes croissantes suscitées par le système financier et la dette extérieure du pays ont déclenché une crise de la balance des paiements et une crise bancaire.

Roumanie 
Avec l’éclatement de la crise financière mondiale en 2008, les marchés financiers et le système bancaire roumains se sont retrouvés sous une forte pression. L’accès au financement extérieur était limité, provoquant une flambée des taux d’intérêt. Le ralentissement des mouvements de capitaux s’est traduit par une dépréciation des taux de change de plus de 15 %, avec, pour corollaire, une détérioration de la qualité des actifs et une nouvelle dégradation des bilans des banques. La banque centrale est intervenue pour stabiliser la devise roumaine. La notation de la Roumanie a été ramenée sous le seuil de la catégorie «investissement», ce qui a eu pour effet d’accroître la prime de risque et le coût de l’emprunt. Les rendements des obligations souveraines ont grimpé à 9 %. En raison du net renforcement de l’aversion pour le risque, des pressions accrues sur les taux de change et d’un accès de plus en plus limité au marché obligataire pour les emprunts publics, les autorités roumaines ont adressé une demande d’assistance financière en mars 2009.
Irlande 
Dès la fin de 2007, la confiance des investisseurs dans le secteur immobilier irlandais s’était envolée sous l’effet de la crainte d’une offre excédentaire et d’une bulle des prix. L’Irlande avait alors été confrontée à un double problème: une chute des recettes cycliques dans le secteur de la construction et l’apparition soudaine de pertes importantes au niveau du système bancaire national. Au cours de la période 2008-2010, le gouvernement a pris des mesures fortes pour consolider le secteur bancaire. Il a garanti les dettes des institutions bancaires nationales. Il a injecté des capitaux pour un montant équivalant à pas moins de 20 % du PIB dans le secteur bancaire. La National Asset Management Agency a racheté les actifs fonciers et de promotion immobilière des banques en difficulté. Toutefois, les engagements pris par le gouvernement en faveur du secteur financier ont propulsé les écarts de rendement sur les obligations d’État à des sommets historiques et ont considérablement réduit l’accès du pays aux marchés financiers.
Portugal 
La période qui a précédé la demande d’assistance financière a été marquée par une évolution défavorable des finances publiques et par une détérioration des perspectives économiques. Il s’en est suivi une érosion de la confiance et des pressions croissantes de la part des marchés sur la dette portugaise, encore accentuées par une spirale négative sur les marchés des obligations souveraines dans la zone euro. À mesure que l’accès aux marchés se rétrécissait, le gouvernement a recouru de plus en plus à l’émission d’obligations à plus court terme et à d’autres types de financement (comme les placements privés, les émissions syndiquées et un important financement à court terme par les institutions bancaires nationales). Au début du mois de mai 2011, les écarts de rendement à 10 ans des obligations portugaises avaient grimpé pour atteindre 650 points de base. Après plusieurs déclassements successifs de ses obligations souveraines par les agences de notation, le Portugal s’est retrouvé dans l’impossibilité de se refinancer à des taux compatibles avec la viabilité budgétaire à long terme.
Grèce
L’assistance accordée par l’UE à la Grèce au cours de la crise fera l’objet de deux rapports spéciaux distincts de la Cour des comptes européenne. Le premier répondra à la question de savoir si l’assistance technique coordonnée par la Commission a contribué de manière positive à la mise en œuvre des programmes et au processus de réforme en Grèce. Sa publication est prévue au premier trimestre 2016. Le second, qui sera publié plus tard, consistera en une évaluation de la conception, du suivi et des résultats du programme d’ajustement économique pour la Grèce.


Programme d’échanges Bellevue : comment développer un esprit européen chez les fonctionnaires

Comme chaque année depuis 2011, la France participe au programme d’échanges de fonctionnaires Bellevue. Coordonné par la Direction générale de l’administration et de la fonction publique (DGAFP), le dispositif s’adresse plus particulièrement à des fonctionnaires en début ou milieu de carrière, relevant de la catégorie A et exerçant au sein de la fonction publique de l’Etat. Les candidats doivent justifier d’au moins six ans d’expérience professionnelle, dont quatre dans la fonction publique.

En 2016, le calendrier est le suivant :
– 18 mars : date limite de transmission à la DGAFP par chaque DRH ministérielle ;
– 15 avril : communication aux ministères par la DGAFP des candidats présélectionnés pour les auditions finales ;
– du 18 au 20 mai : auditions des candidats présélectionnés par le jury de Bellevue à Stuttgart.

Initié en 2004 par la présidence fédérale d’Allemagne, le programme Bellevue est un programme d’échange de fonctionnaires auquel participent neufs pays européens : l’Allemagne, l’Espagne, la France, la Hongrie, l’Italie, l’Irlande, la Pologne, le Portugal, la Slovénie. Le programme est géré par la Fondation Robert Bosch de Stuttgart, qui organise la sélection finale des candidats et qui finance les cours de langue, ainsi qu’un certain nombre d’activités communes.

Ces échanges visent à « développer un esprit européen chez les fonctionnaires retenus. Ils doivent permettre de familiariser les participants avec les structures administratives du pays d’accueil et visent à établir un réseau de relations étroites et durables entre les administrations des Etats membres participant au programme ».

Quant aux modalités, les candidats doivent présenter un dossier à leur ministère. Chaque DRH ministérielle adresse les candidatures retenues à la DGAFP, bureau de l’expertise internationale, de la Prospective et de l’Analyse comparative des politiques RH, avant le 18 mars 2016. Celle-ci retient un maximum de quatre dossiers qu’elle transmet à la Fondation Bosch.

Toute question peut être adressée au bureau de l’expertise internationale au 01 55 07 42 81 ou via un formulaire de contact.

Aller plus loin

Le programme Bellevue sur le site Internet de la Fondation Robert Bosch (en anglais)


Un milliard d’euros pour l’investissement local

Le Premier ministre, Manuel Valls, vient de transmettre aux préfets de région une circulaire détaillant les modalités de mise en œuvre du fonds de soutien à l’investissement local de 1 milliard d’euros, destiné aux communes et intercommunalités. Le milliard d’euros est réparti de la façon suivante :
– 500 millions consacrés à de grandes priorités d’investissement pour l’application de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte et l’accord de Paris sur le climat. Ils seront dédiés à la réalisation de projets de rénovation thermique, de transition énergétique, de développement des énergies renouvelables, de mise aux normes des équipements publics, de développement d’infrastructures en faveur de la mobilité ou de l’accueil de populations nouvelles (construction de logements et d’équipements publics…). Sont éligibles toutes les communes et groupements de communes de métropole et des régions d’Outre-mer ;
– 300 millions dédiés au soutien de projets en faveur de la revitalisation ou du développement des bourgs-centres. Sont concernées les communes de moins de 50.000 habitants ;
– 200 millions ajoutés aux crédits de la dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR), qui se maintiendra en 2016 à son niveau de 816 millions d’euros, renforçant, dans chaque département, ainsi le soutien aux projets portés par les petites communes.

Le Premier ministre rappelle par ailleurs certaines mesures en complément de ce fonds : renforcement du fonds de compensation de la taxe sur la valeur ajoutée/FCTVA (6,047 milliards d’euros devraient être versés par l’Etat aux collectivités en 2016, soit 85 millions d’euros de plus qu’en 2015), déploiement des contrats de plan Etat-région, financement de la Caisse des dépôts et de consignation.

En annexe de la circulaire figurent les instructions relatives à la dotation de soutien à l’investissement local et la répartition des enveloppes régionales.