Archives : 31 mars 2016

Avant de supprimer le contrôle de légalité, renforçons le contrôle interne !

Dans une tribune publiée dans la Gazette du 21 mars, Alain Lambert propose de supprimer le contrôle de légalité. Constatant sa profonde dégradation, il n’y voit qu’une contrainte administrative qui « inhibe, inquiète, détourne, affecte la décision politique ».

Reconnaissons avec l’ancien ministre du budget que la révision générale des politiques publiques (RGPP) puis la modernisation de l’action publique  (MAP) ont fortement contribué à la détérioration de ce dispositif prudentiel : il a perdu en efficacité au sens où il ne permet plus d’identifier avec un souci d’exhaustivité, par manque de personnels qualifiés, les irrégularités commises par les administrations publiques locales. Pour autant, en l’absence de dispositif prudentiel alternatif, il demeure pertinent car il maintient la possibilité d’un déféré préfectoral sur des délibérations, marchés et autres documents administratifs manifestement non conformes aux obligations légales et règlementaires auxquelles sont soumises les collectivités territoriales et leurs établissements publics.

En fait, un tel dispositif alternatif existe, mais il n’est pas encore arrivé à maturité. La directive 2011/85/UE du Conseil du 8 novembre 2011 dispose que les administrations publiques locales  « sont soumis à un contrôle interne et à un audit indépendant » comme toutes les administrations publiques des Etat membres de l’Union européenne. Mais peu de collectivités se sont à ce jour doté d’un dispositif de contrôle interne pertinent. L’expérimentation de la certification des compte au sein du secteur public local lancée le 26 février 2016 par Michel SAPIN, ministre des Finances et des Comptes publics, Jean-Michel BAYLET, ministre de l’Aménagement du Territoire, de la Ruralité et des Collectivités territoriales, et Christian ECKERT, secrétaire d’État chargé du Budget, vise précisément à organiser les modalités de l’audit externe du contrôle interne des administrations publiques locales.

Pour autant, le dispositif prévu par la direction générale des finances publiques (DGFIP) porte essentiellement sur le contrôle interne comptable (CIC) et délaisse les composantes du contrôle interne visant à prévenir les risques de non-conformité avec les lois et les règlements. En dépit de son intérêt intrinsèque, le projet de création d’une Agence nationale de prévention et de détection de la corruption (ANPDC) présenté le 30 mars en Conseil des ministres par Michel SAPIN, ne compensera pas la suppression du contrôle de légalité qu’Alain Lambert appelle de ses vœux.

Rappelons qu’en application des normes internationales d’audit, le contrôle interne doit être conçu et mis en œuvre « pour répondre aux risques identifiés liés à l’activité et aux risques de fraudes ». Il s’agit d’un processus conçu et mis en place par l’assemblée délibérante, l’ordonnateur et les agents territoriaux en vue de « fournir une assurance raisonnable quant à la réalisation des objectifs de l’entité en ce qui concerne la fiabilité de l’information financière, l’efficacité et l’efficience des opérations, ainsi que la conformité avec les textes législatifs et réglementaires en vigueur ».

L’expérimentation de la certification des comptes des administrations publiques locales doit dès lors reposer sur une conception élargie du contrôle interne et comprendre cinq composantes : l’environnement de contrôle ; le processus d’évaluation des risques de l’entité ; le système d’information afférent à l’information financière et à la communication, y compris les processus opérationnels qui s’y rapportent ; les activités de contrôle ; enfin, le suivi des contrôles internes.

En application de l’article 110 de la loi NOTRe, un bilan de cette expérimentation sera réalisé au terme d’une période de huit ans. Ce bilan donnera lieu à un rapport du Gouvernement transmis au Parlement, avec les observations des collectivités territoriales concernées et de la Cour des comptes. Au regard de ses résultats, le législateur pourra intervenir pour définir le cadre de ce dispositif. Dès lors que celui-ci sera à même de fournir une « assurance raisonnable » du respect des textes législatifs et réglementaires par les collectivités territoriales et leurs établissements publics, une éventuelle suppression du contrôle de légalité pourra être envisagée.

Il serait hasardeux de démunir le secteur public local de ce dispositif prudentiel sans s’assurer au préalable qu’une solution alternative pertinente, conforme aux normes internationales d’audit, soit mise en place. La progression récente du nombre d’affaires transmises au parquet pénal par les chambres régionales des comptes nous rappelle qu’en la matière il ne faut jamais baisser la garde.


Le Gouvernement souhaite nouer un pacte avec les métropoles

Le ministre de l’aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales et la secrétaire d’Etat chargée des collectivités territoriales ont présenté le 25 mars une communication au Conseil des ministres relative à la politique des métropoles.

Ils présentent les métropoles comme une chance pour la France. . Après le temps de la construction institutionnelle, ils appellent de leurs vœux un temps des projets auxquels ils souhaitent associer le Gouvernement dans le cadre d’un partenariat au service du dynamisme de l’ensemble du territoire national.

Les aires métropolitaines françaises représentent aujourd’hui près de 25 millions d’habitants et concentrent plus de la moitié du produit intérieur brut. Ces villes dynamiques, ouvertes sur le monde, terres d’accueil de populations diverses, sièges de grands centres universitaires ou de recherche, d’équipements structurants et de pôles culturels, sont des terres d’innovation et de changement.

Le Gouvernement a pris toute la mesure de cette recomposition urbaine, en organisant, par la loi du 27 janvier 2014, un cadre institutionnel adapté. Dès le 1er janvier 2015, la métropole de Lyon a été créée en tant que collectivité territoriale à statut particulier. A cette même date, Bordeaux, Brest, Grenoble, Lille, Montpellier, Nantes, Rennes, Rouen, Strasbourg et Toulouse ont pu accéder au statut de métropole de droit commun sur la base de critères démographiques et fonctionnels. La métropole de Nice Côte d’Azur les avait précédées dès 2012. Dotées de statuts spécifiques, les métropoles du Grand Paris et d’Aix-Marseille-Provence ont été créées en janvier 2016.

Ces avancées créent les conditions d’un partenariat renforcé entre ces métropoles et l’Etat. C’est pourquoi l’Etat engagera des discussions avec toutes les métropoles, qui pourraient aboutir d’ici juin 2016 à un pacte national.

Après les comités interministériels consacrés au Grand Paris et à Aix-Marseille-Provence, qui ont permis la mobilisation des outils des collectivités, de l’Etat et de leurs partenaires, ces partenariats permettraient de coordonner les moyens nécessaires à un développement harmonieux et équilibré des espaces métropolitains.

Le contenu de ce pacte devra être défini avec les exécutifs métropolitains, mais il pourrait notamment porter sur les thèmes suivants :

– les usages innovants des réseaux (numériques, énergétiques et environnementaux) pour mieux répondre aux besoins des habitants, en créant par exemple des synergies entre les grands opérateurs de réseau et les collectivités ;
– la lutte pour la qualité de l’air, en soutenant les mobilités propres à l’échelle métropolitaine ;
– l’architecture et l’urbanisme, pour concevoir aussi bien des formes nouvelles d’habitat vertical que le périurbain de demain.

Une attention particulière sera accordée aux coopérations à développer entre zones denses et moins denses pour optimiser l’accès de tous aux ressources énergétiques, culturelles, alimentaires, ou tout simplement à la nature, en ville et à la campagne.

L’enjeu, au travers de ce pacte, est non seulement de contribuer à inventer la ville de demain, hospitalière, intelligente, responsable, durable, mais aussi de faire des métropoles de véritables acteurs de l’aménagement du territoire. De nombreuses métropoles sont déjà engagées en ce sens. Il faut les encourager.

Pour structurer ce pacte national, l’Etat va mobiliser l’ensemble de ses réseaux, les grands opérateurs, sa capacité d’ingénierie. Il apportera des financements adaptés aux projets, pour faciliter notamment les réponses des métropoles aux appels à projet européens et internationaux sur ces sujets. Enfin, dans le cadre de ces partenariats, les simplifications normatives et les expérimentations qui apparaîtront opportunes pourront être étudiées.


Le code du travail remis sur l’établi

Présenté en conseil des ministres le 24 mars 2016, le projet de loi visant à instituer de nouvelles libertés et de nouvelles protections pour les entreprises et les actifs a été déposé à l’Assemblée nationale le même jour. Il comporte sept titres. Le titre I, relatif à la refonte de la partie législative du droit du travail, institue une commission d’experts et de praticiens afin de réécrire le code du travail.

Il met en place une architecture du code du travail en trois niveaux : les dispositions d’ordre public, le champ de la négociation collectives et les dispositions supplétives.

Les dispositions du code du travail relatives à la durée et à l’aménagement du temps de travail, aux repos et aux congés, sont refondues en consacrant notamment la primauté de l’accord d’entreprise dans ce domaine.

Le titre II vise à favoriser une culture du dialogue et de la négociation, en prévoyant par exemple que les conventions et accords contiendront un préambule présentant les objectifs et le contenu, qu’ils seront conclus dans des conditions de loyauté, qu’ils sont rendus publics. Il précise leur condition de révision, de contestation et de signature, et notamment les modalités de consultation des employés. L’objectif est de réduire le nombre de branches, et de tendre à la conclusion d’accords collectifs majoritaires.

Le titre III a pour objet de sécuriser les parcours et de construire les bases d’un nouveau modèle social à l’ère du numérique. Il comprend ainsi des dispositions créant le compte personnel d’activité pour les salariés, les travailleurs indépendants et les agents publics, garantissant la portabilité des droits quel que soit le changement d’emploi ou de statut, comprenant notamment un compte d’engagement citoyen recensant les activités bénévoles ou de volontariat et une information sur les droits sociaux et ses droits à formation. Une ordonnance mettra en œuvre ce compte pour les agents publics. S’agissant des adaptations à l’ère du numérique, sont prévus un droit à la déconnexion dans l’utilisation des outils numériques pour assurer le respect des temps de repos et de congés et le lancement d’une concertation sur le développement du télétravail.

Le titre IV contient des mesures de simplification à destination des TPE et PME, prévoyant notamment que les accords de branche peuvent contenir des stipulations spéciales pour les entreprises de moins de cinquante salariés et une définition du motif économique du licenciement.

Enfin, les trois derniers titres ont pour objet la modernisation de la médecine du travail et le renforcement de la lutte contre le détachement illégal et un article prolonge le plan de transformation des contrôleurs du travail en inspecteurs du travail de 2016 à 2019.


Les rémunérations des fonctionnaires de l’Etat ont baissé entre 2013 et 2014

Alors que le Gouvernement a annoncé récemment un coup de pouce de 1,2% sur le point d’indice gelé depuis près de six ans, l’Insee a publié le 24 mars la situation des salaires dans la fonction publique pour 2014. Constat : entre 2013 et 2014, le salaire net moyen augmente de 0,8% en euros constants dans la fonction publique territoriale (FPT), de 0,4% dans la fonction publique hospitalière (FPH), mais baisse de 0,2% dans la fonction publique de l’Etat.

Quant à la « rémunération moyenne des personnes en place » (RMPP), qui mesure l’évolution moyenne de la rémunération des agents présents deux années consécutives, excluant donc les entrants et les sortants, elle est en augmentation dans les trois versants de la fonction publique : + 2,2% en euros courants (+1,6% en euros constants) dans la FPE ; + 2,7% en euros courants (+ 2,1% en euros constants) dans la FPT ; +1,8% en euros courants (+ 1,5% en euros constants) dans la FPH. Les évolutions en euros constants étant calculées par rapport à l’inflation y compris tabac.

Traduites en montant des salaires nets moyens en équivalent temps plein (EQPT), ces évolutions correspondent à : 2.480 euros nets par mois dans la FPE, tous statuts confondus (hors militaires) ; 1.880 euros dans la FPT (hors militaires, assistants maternels et familiaux) ; 2.210 euros dans la FPH (hors internes et externes des hôpitaux).

Par ailleurs, l’échelle des rémunérations se comprime dans la fonction publique d’Etat. Ainsi les salaires mensuels nets moyens des cadres rapportés  aux salaires mensuels nets moyen des ouvriers et employés étaient les suivant en 2013:

– cadres du  privé sur ouvriers employés privés: (4091/1639) soit 2.4 donc plus 140%.

– cadres du public sur ouvriers employés du public Etat: (3054/1949)  soit 1.57 donc plus 57%.

Pour en savoir davantage:

Les chiffres de l’Insee


Rapport du Conseil de l’Europe sur la réforme territoriale française

Le congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l’Europe a rendu ses conclusions sur l’état de la démocratie locale et régionale en France, premier rapport sur la mise en œuvre de la charte de l’autonomie locale dans notre pays.

Ce rapport comporte un historique des réformes de la décentralisation, un descriptif détaillé des niveaux d’administration territoriale, de leur organisation, leurs compétences, leurs moyens humains et financiers. Sur ces aspects, il est assorti d’un projet de recommandation dans lequel le congrès se félicite des efforts réalisés dans le domaine de la coopération entre les collectivités territoriales, notamment la coopération transfrontalière, de l’adoption de la loi n° 2015-366 du 31 mars 2015 visant à faciliter l’exercice, par les élus locaux, de leur mandat, grâce à une compensation financière adéquate, du développement des budgets participatifs dans certaines villes ou encore de la naissance de la métropole du Grand Paris, qualifiée de « mécanisme de coopération judicieux ».

En revanche, les rapporteurs se montrent préoccupés, en ce qui concerne la réforme territoriale, par l’absence de véritable consultation des collectivités locales avant le vote de la loi entrée en vigueur le 1er janvier 2016, ainsi que par le déséquilibre financier entre les collectivités territoriales dû à un système inadapté de péréquation et à une recentralisation au niveau national des décisions fiscales locales. Le congrès relève que l’évolution du coût de la mise en oeuvre des nouvelles compétences transférées aux collectivités territoriales n’a pas été suffisamment prise en compte et propose de créer, au sein du Comité des finances locales, un groupe chargé de calculer les surcoûts supportés par les collectivités territoriales. En outre, il recommande d’améliorer l’efficacité des dispositifs de solidarité en redistribuant les ressources entre des collectivités de niveaux différents et de « réviser le système de péréquation de façon à ce qu’il remplisse effectivement l’objectif de réduction des écarts de ressources entre les collectivités locales ».

Ce rapport ainsi que le projet de recommandation ont été examinés lors de la 30ème session du congrès les 22 et 24 mars 2016.


Réforme du régime applicable aux commissaire aux comptes

Publiée au Journal officiel de la République française du 18 mars 2016, l’ordonnance n°2016-315 du 17 mars 2016 réforme le régime applicable à la profession de commissaire aux comptes, en transposant la directive 2014/56/UE portant sur les contrôles légaux des comptes annuels et des comptes consolidés et en assurant la mise en conformité du droit interne avec le règlement (UE) n°537-2014 relatif aux exigences spécifiques applicables aux contrôle légal des comptes des entités d’intérêt public. L’ordonnance précise que les commissaires aux comptes sont soit des personnes physiques, sans condition de nationalité, remplissant les conditions fixées à l’article L. 822-1-1 du code de commerce, soit des sociétés françaises européennes ou agréées dans un autre Etat de l’Union et remplissant les conditions de l’article L. 822-1-3 dudit code, soit une société tiers remplissant les nouvelles conditions fixées par l’article L. 822-1-4 et suivants.

Dans tous les cas, l’inscription sur la liste nationale des commissaires aux comptes est réalisée par le Haut conseil du commissariat aux comptes, dont les pouvoirs sont modifiés par l’ordonnance afin de tenir compte du renforcement des obligations de déontologie et de contrôle liées à la profession de commissaire aux comptes voulue par le droit européen. Ainsi, le Haut conseil, dont les conditions d’indépendance sont renforcées par l’interdiction faite aux professionnels en exercice de siéger au sein de son organe de direction, est désormais doté d’un pouvoir d’enquête et de sanction. Dans le même esprit, le régime disciplinaire applicable aux commissaires aux comptes est modifié, notamment par la fixation d’une définition légale de la faute disciplinaire.


Quelle stratégie budgétaire pour la France ?

La stratégie de finances publiques de la France vise, grâce à un plan d’économies de 50 milliards d’euros sur la période 2015-2017, à dégager des marges de manœuvre permettant, d’une part, de réduire les déficits, tout en finançant les priorités du Gouvernement, et, d’autre part, de consolider la reprise de la croissance par des baisses d’impôts et de cotisations pour les ménages et les entreprises. Son objectif est de renforcer la soutenabilité des finances publiques en résorbant le poids de l’endettement et de répondre aux engagements européens en revenant sous le seuil des 3% du PIB de déficit public en 2017, à un rythme compatible avec la reprise de l’activité.

Cette stratégie a été explicitée, s’agissant du plan d’économies comme du Pacte de responsabilité et de solidarité, dans le Programme de stabilité d’avril 2014, et déclinée dans les textes financiers adoptés depuis lors. Le Gouvernement entend ainsi démontrer sa capacité à prendre les mesures nécessaires pour assurer une exécution conforme aux plans initiaux, et même meilleure, dans un contexte qui est pourtant défavorable aux finances publiques, compte tenu notamment du faible niveau d’inflation. En 2014, la dépense a ainsi cru à un rythme historiquement bas, à 0,9 % en valeur, hors crédits d’impôt, contre 3,6% en moyenne entre 2002 et 2012. En outre, afin de tenir ces engagements, 4 Md€ d’économies complémentaires en 2015 puis 5 Md€ de plus en 2016 ont été décidées à l’occasion du Programme de stabilité d’avril 2015.

Fin 2015, la quasi-totalité des mesures d’économies prévues dans le cadre du plan d’économies à 50 Md€ avait d’ores et déjà été votée en lois financières, notamment dans le cadre du vote de la loi de finances initiale pour 2016 ou a fait l’objet d’un accord entre les partenaires sociaux (Agirc-Arrco).

S’agissant des économies prévues en 2016, L’Etat et ses agences en assumeront 4,9 Md€. Une nouvelle diminution des dotations de l’État aux collectivités locales, pour 3,5 Md€, conjuguée à un abaissement de l’ objectif d’évolution de la dépense locale (ODEDEL) à 1,2 % sur le total de leurs dépenses, induira un effort accru de maîtrise de leurs dépenses de fonctionnement (avec un objectif de baisse de 1,6 %). Cet outil de pilotage indicatif de la dépense locale a été créé par l’article 11 de la loi de programmation des finances publiques (LPFP) pour la période 2014-2019.  Il dispose que « les collectivités territoriales contribuent à l’effort de redressement des finances publiques, selon des modalités à l’élaboration desquelles elles sont associées. Il est institué un objectif d’évolution de la dépense publique locale, exprimé en pourcentage d’évolution annuelle et à périmètre constant ». Pour que cet objectif soit réalisé, l’accompagnement des collectivités locales est poursuivi avec la mise en oeuvre, depuis le 1er janvier 2016, de la réforme de l’organisation territoriale. Celle-ci vise à réaliser des économies d’échelle par la mutualisation des moyens. La trajectoire des administrations de sécurité sociale repose, quant à elle, sur un nouveau ralentissement de l’objectif national des dépenses d’assurance maladie (ONDAM), qui passe de 2,0 % à 1,75 %, alors même que sa croissance tendancielle est de 3,6 % (soit 3,4 Md€ d’économies). L’ODEDEL et l’ONDAM deviennent ainsi progressivement, aux cotés de la loi de finance de l’Etat, les principaux instruments de maîtrise des dépenses publiques en France.

En 2017, le plan d’économies se poursuivra à hauteur de 15,6 Md€, dont 5,3 Md€ pour l’Etat et ses opérateurs. La norme de dépense de l’Etat hors dette et pensions, dont la tenue a toujours été assurée depuis sa création, sera encore abaissée. La réduction des concours aux collectivités locales de 3,7 Md€ se poursuivra et la réappropriation par celle-ci de l’ODEDEL fera l’objet d’un accompagnement renforcé. Concernant les administrations de sécurité sociale, l’ONDAM maintenu à 1,75 % permettra encore de réaliser environ 3,4 Md€ d’économies par rapport à la tendance tandis que les autres mesures d’économies dans le champ de la protection sociale représenteraient 3,1 Md€. En particulier, les réformes d’ores et déjà actées du cumul emploi-retraite ainsi que le décalage de revalorisation des pensions d’avril à octobre continueront à générer des économies, de même que l’accord Agirc-Arrco signé le 30 octobre 2015 qui montera en charge. En outre, la nouvelle convention d’assurance chômage négociée en 2016 devrait apporter une économie supplémentaire de 0,8 Md€ en 2017. Il convient également de noter que l’accord Agirc-Arrco intègre notamment des mesures de nature à influer sur les comportements de départ en retraite, de sorte que le solde des régimes complémentaires de retraite devrait s’améliorer de 6,1 Md€ à horizon 2020. Les effets induits sur le régime de base devraient en outre majorer ce rendement.

La trajectoire du projet de plan budgétaire a été construite sur une hypothèse de croissance de 1,0 % en 2015, qualifiée de « prudente » par le Haut Conseil des finances publiques (HCFP) dans son avis relatif au PLFR, et de 1,5 % en 2016, qualifiée d’ « atteignable » par le HCFP (avis relatif au PLF 2016). Depuis, le chiffre de croissance du troisième trimestre 2015 est ressorti à 0,3 %. La prévision de croissance sur laquelle le budget 2015 avait été construit est ainsi atteinte au bout de trois trimestres, et la croissance pourrait dépasser 1,0%, comme l’estiment l’Insee, le FMI ou la Commission. Les derniers développements économiques apparaissent ainsi confirmer le réalisme du cadrage économique retenu par le Gouvernement.

Cette stratégie dans la gestion budgétaire permet de financer les priorités du Gouvernement. A la suite des attentats survenus à Paris le 13 novembre, des dépenses supplémentaires ont ainsi été engagées au titre du renforcement des moyens de sécurité et de défense. Elles représenteront 750 M€ de crédits supplémentaires en 2016 (hors charges de retraite) et un montant supérieur en 2017, par rapport à la LPFP.  Par ailleurs, les montants nécessaires au financement du plan européen d’assistance humanitaire aux réfugiés en Turquie ont été pris en compte.

Ces dépenses supplémentaires ne remettent cependant pas en cause les objectifs de déficit public fixés par la recommandation du Conseil européen de mars 2015 puisque la loi de finances initiale (LFI) pour 2016 maintient une cible de déficit de 3,3 % du PIB, cette cible permettant de ménager une marge par rapport à la recommandation du Conseil pour cette année.

Pour en savoir davantage:


La stratégie d’assainissement budgétaire de la France passe par le secteur public local

Selon la Commission européenne, la stratégie d’assainissement budgétaire de la France mise davantage sur une réduction générale des dépenses que sur une stratégie ciblée visant à permettre des gains d’efficacité, en particulier au sein du secteur public local. Elle invite en conséquence les pouvoirs publics à se montrer plus exigeants vis-à-vis des collectivités territoriales.

Un document de travail des services de la Commission publié le 26 février 2016 rappelle  le  rôle important des administrations publiques locales françaises dans les dépenses nationales consacrées aux affaires économiques et au logement, ainsi qu’aux loisirs et à la culture. Leurs dépenses ont représenté 11,9 % du PIB en 2013 en France. Sur la période 2003-2013, les dépenses au niveau local ont crû de 1,8 point de pourcentage (pp) du PIB, augmentation due pour la moitié à une hausse des dépenses de protection sociale.

Par rapport à la moyenne de la zone euro, les dépenses des administrations publiques locales françaises sont supérieures d’environ 1,5 pp du PIB, mais leur part dans les dépenses publiques totales est comparable (20 %). Néanmoins, les compétences des autorités locales peuvent fortement différer d’un pays à l’autre. En France, les principales catégories de dépenses sont les affaires économiques, la protection sociale et les services généraux des administrations publiques. Les administrations publiques locales françaises dépensent plus que la moyenne de la zone euro dans les domaines des affaires économiques, du logement et des équipements collectifs ainsi que des loisirs et de la culture, mais considérablement moins dans le domaine de la santé.

La hausse des dépenses des collectivités locales s’explique en partie par la décentralisation de 1980 et en partie par la structure des administrations locales en France. La hausse de 3,3 pp du PIB affichée par les dépenses des collectivités locales entre 1983 et 2013 peut s’expliquer[1], jusqu’à 60 %, par le transfert des compétences entre l’État et le niveau local, notamment en ce qui concerne la protection sociale. Les 40 % restants sont le fait des collectivités locales, dont le nombre de fonctionnaires a connu une augmentation sans mesure avec les compétences qui leur ont été transférées. Le nombre et la diversité des niveaux infranationaux de gouvernement (État, 22 régions jusqu’en 2015, 101 départements, plus de 36 000 municipalités) sont toutefois supérieurs à ceux des autres pays de l’UE, ce qui crée un risque d’inefficience dû à la duplication de certaines fonctions.

Selon les auteurs de cette étude, les dépenses des collectivités locales ne sont pas efficientes. Ils citent à cet égard une étude sur l’efficience des dépenses des départements français selon laquelle celles-ci seraient perfectibles[2]. Le Gouvernement a pris des mesures pour optimiser les activités des collectivités locales, au moyen de la réforme territoriale lancée en 2014 et menée en trois étapes[3] ; le nombre des collectivités locales a ainsi été rationalisé dans une certaine mesure, et le chevauchement de certaines fonctions, limité. À titre d’exemple, la clause de compétence générale a été abolie pour les départements et les régions (mais pas pour les autres collectivités territoriales). La mise en œuvre de cette réforme est maintenant déterminante pour recueillir les gains d’efficience envisagés. Par ailleurs, des mesures ont été prises pour rationaliser les fonctions administratives et fusionner des regroupements de communes et des régions (dont le nombre a été ramené de 22 à 13 en 2016).

Une nouvelle norme indicative de dépenses pour les collectivités locales, bien que non contraignante, complète depuis peu la réglementation existante applicable aux dépenses des collectivités locales. L’objectif d’évolution de la dépense publique locale (ODEDEL), introduit par la loi du 29 décembre 2014 de programmation des finances publiques pour la période 2014-2019, vise à devenir un instrument puissant pour orienter les dépenses au niveau local, en particulier parce qu’à partir de 2016, l’objectif général pour les collectivités locales sera lui-même décliné en objectifs fixés pour les régions, les départements et les municipalités. Cette norme de dépenses complète la contribution des collectivités locales au plan national d’économies de 50 milliards d’EUR sur la période 2015-2017, qui se traduira par une réduction de 10,7 milliards d’EUR des transferts de l’État vers les collectivités locales au cours de la même période. Cette diminution des transferts de l’État modifie les schémas de dépenses des collectivités locales, en particulier en ce qui concerne les investissements (comme en témoigne le recul des investissements au niveau local en 2014, plus marqué que ce que le cycle électoral aurait normalement induit). Par ailleurs, les collectivités locales ne pourront pas creuser leur dette pour compenser la raréfaction des ressources, puisqu’elles ne peuvent emprunter que pour financer des investissements, ce à quoi veillent les chambres régionales et territoriales des comptes.

La baisse des concours financiers de l’Etat aux collectivités locales a cependant donné lieu à une mobilisation générale des élus locaux, dont une journée nationale d’action le 19 septembre dernier organisée par l’Association des maires de France (AMF), durant laquelle les élus étaient appelés à sensibiliser leurs administrés sur les conséquences possibles de la baisse des dotations, parmi lesquelles étaient avancées : une remise en cause du niveau des services, des coupes dans les subventions aux associations locales, une augmentation des impôts locaux, une diminution des investissements avec à la clé des menaces sur l’emploi, notamment dans le secteur des travaux publics.

Dans ce contexte,  la préparation du 99e Congrès des maires de France qui a lieu du 31 mai au 2 juin s’annonce particulièrement délicate pour le Gouvernement.

[1] Examens de l’OCDE sur la gouvernance publique: France: Une perspective internationale sur la Révision générale des politiques publiques, Éditions OCDE, 2012.

[2] Seifert, S., et Nieswand, M., What Drives Intermediate Local Governments’ Spending Efficiency: The Case of French Départements, Local Government Studies, Vol. 40(5), pp. 766-790.

[3] MAPTAM, nouvelle carte des régions et loi NOTRe.


Obligations de contrôle du comptable public

Saisi d’un pourvoi à l’encontre un arrêt de la Cour des comptes, le Conseil d’Etat s’est prononcé, dans une décision du 9 mars 2016, sur les obligations de contrôle incombant au comptable public en l’absence de nomenclature spécifique des pièces justificatives dans un établissement public. En effet, responsable personnellement et pécuniairement sur le fondement de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 de finances pour 1963, dans sa rédaction issue de l’article 90 de la loi du 28 décembre 2011 de finances rectificative pour 2011, le comptable est tenu d’effectuer des contrôle en matière de dépense au regard notamment de pièces justificatives recensées dans des nomenclatures établies ou agréées par le ministres des finances. Dans ce cadre, il lui appartient d’apprécier la validité des créances en vérifiant si les pièces justificatives « présentent un caractère suffisant pour justifier la dépense engagée ». Ce caractère suffisant s’évalue au regard, d’une part, de l’exhaustivité des pièces fournies au titre de la nomenclature comptable applicable et d’autre part, de la complétude, la précision et la cohérence de ces pièces en raison de la catégorie, la nature et l’objet de la dépense. Selon le Conseil d’Etat « la circonstance qu’une opération n’a pas été prévue par la nomenclature des pièces justificatives applicable à l’organisme public concerné ne saurait dispenser le comptable public d’exercer tous les contrôles qui lui incombent ». Il appartient donc au comptable de réclamer auprès de l’ordonnateur, les pièces justificatives pertinentes et nécessaires au titre des contrôles lui incombant.

Pour en savoir davantage:

Conseil d’Etat, 9 mars 2016, Ministre des finances et des comptes publics, n° 380105


En 30 ans, les dépenses totales des régions ont été multipliées par 7,9

En 2015, les dépenses totales, hors remboursements de la dette, sont estimées à 27,5 milliards d’euros contre 3,5 milliards d’euros en 1986, soit une multiplication par 7,9 (4,7 en euros constants).

Cette évolution est retracée dans un document d’analyse rétrospective sur les trente dernières années réalisé par la Banque postale Collectivités locales, « Regard financier sur les régions ».Elle résulte notamment de nombreux transferts et créations de compétences réalisés durant cette période ainsi que la hausse de la population (+ 17%) et la mise en place de nouveaux services à son attention (création de nouveaux lycées, développement de l’offre de transports comme le TER, élargissement des compétences liées à la formation professionnelle, etc.).

Ce document décrit aussi le contexte institutionnel, rappelle la chronologie des faits marquants depuis les premières lois de décentralisation et présente l’évolution des dépenses d’investissement, qui devraient s’élever à 9,3 milliards d’euros (hors remboursement de dette) en 2015, soit trois fois plus qu’il y a 30 ans.

Puis le document dresse un panorama des nouvelles régions à partir des apports de la loi NOTRe en décrivant notamment la substitution des compétences d’attribution au détriment de la clause de compétence générale et le transfert de certaines compétences départementales, obligatoires ou facultatives. Par ailleurs, le nouveau périmètre des régions consécutif au regroupement de certaines régions « a fait progresser automatiquement la moyenne des dépenses totales (hors remboursement de la dette) », avec le résultat suivant: « le budget moyen d’une région (hors Corse et Île-de-France) passe de 1 milliard d’euros à 1,9 milliard d’euros ».

Enfin, la publication dresse un tableau de l’activité économique et des entreprises dans les régions, celles-ci voyant leur rôle renforcé en matière de développement économique et de formation professionnelle.

Pour en savoir davantage:

Le document « Regard financier sur les régions »