Edouard Philippe demande à ses ministres de faire du Lean Management

Lors d’une rencontre à l’Elysée, le 15 septembre dernier, M. Fabrice Aubert, conseiller institutions, action publique et transition numérique du président de la République avait annoncé aux représentants de notre organisation syndicale la prochaine mise en oeuvre d’un grand plan de « transformation de l’action publique ». Par une lettre circulaire du 26 septembre, le Premier ministre, Edouard Philippe, dévoile les grands axes de ce plan. Il invite les membres du Gouvernement à  poursuivre, dans le cadre d’un programme intitulé « Action publique 2022 »,  trois objectifs prioritaires :

  • améliorer la qualité des services publics, en développant la relation de confiance entre les usagers et les administrations, et en travaillant prioritairement sur la transformation numérique ;
  • offrir aux agents publics un environnement de travail modernisé en les impliquant pleinement dans la définition et le suivi des transformations ;
  • accompagner rapidement la baisse des dépenses publiques avec un engagement ferme à réduire de trois points la part de la dépense publique dans le PIB d’ici 2022.

Edouard Philippe demande à chacun de ses ministres d’engager les travaux visant à construire un plan de transformation dans leurs champs de compétences respectifs. Ce plan de transformation ministériel sera nourri par les trois grands volets du programme Action publique 2022 : les travaux d’un « Comité Action publique 2022 », un Grand Forum de l’action publique à l’écoute des agents publics et des usagers et cinq chantiers transversaux de transformation.

Il a plus particulièrement chargé le ministre de l’action et des comptes publics, Gérald Darmanin, de préparer et suivre, à ses côtés, l’ensemble de ces travaux.

Concrètement, le programme du Premier ministre consiste notamment à renforcer l’impact de revues de dépenses et à déployer la pratiques du « Lean Management » au sein de l’administration.

Renforcer l’impact des revues de dépenses

Les objectifs ambitieux qu’il se fixe en matière de réduction de la dépense publique impliquent de revoir profondément et durablement les missions de l’ensemble des acteurs publics que sont l’État, les opérateurs, mais aussi les collectivités territoriales et les organismes de sécurité sociale. Afin d’appuyer les réflexions de ses ministres dans cet exercice « indispensable d’examen des politiques publiques », il a décidé de mettre en place un comité de revue des missions et des dépenses publiques.  Edouard Philippe répond ainsi à une recommandation du Conseil de l’Union européenne qui l’avait récemment invité  à renforcer l’impact des revues de dépenses :

Le niveau des dépenses publiques en France est en effet l’un des plus élevés de l’Union européenne [UE]. Le ratio des dépenses au PIB devrait atteindre 56,2 % en 2017, soit 9,7 points de pourcentage de plus que pour l’UE. La France a suivi une stratégie d’assainissement axée sur les dépenses qui a principalement reposé sur la baisse des taux d’intérêt et sur des coupes dans les investissements publics. Il est peu probable que l’environnement de taux bas perdure à moyen terme, tandis que les coupes dans les investissements productifs pourraient nuire au potentiel économique futur. En revanche, les revues de dépenses ont mis en évidence un certain nombre de gains d’efficience possibles qui n’ont pas été mis en œuvre. Les revues de dépenses ont permis de trouver une faible partie (moins de 2 %) des réductions de dépenses d’un montant total de 50 milliards d’EUR prévues sur la période 2015-2017. Cependant, une partie seulement de ces économies possibles se sont traduites par des mesures concrètes dans le budget 2016, tandis que les mesures de la loi de finances de 2017 ont reposé sur les possibilités d’économies déjà repérées lors de l’exercice de revue de dépenses de 2015. Les économies découlant des revues de dépenses pourraient être nettement augmentées si les domaines de dépenses examinés étaient élargis et si une stratégie pluriannuelle était mise en œuvre afin que les possibilités d’économies identifiées se traduisent par des mesures budgétaires concrètes.

Source : Recommandation du Conseil de l’Union européenne concernant le programme national de réforme de la France pour 2017 et portant avis du Conseil sur le programme de stabilité de la France pour 2017, 22 mai 2017.

Composé de personnalités qualifiées françaises ou étrangères, de chefs d’entreprises, de parlementaires, d’élus locaux et de hauts fonctionnaires, un Comité Action publique 2022 (CAP 22) sera chargé de produire un rapport d’ici la fin du 1 er trimestre 2018 identifiant des réformes structurelles et des économies significatives et durables, sur l’ensemble du champ des administrations publiques.

À cette fin, ce Comité s’interrogera sur l’opportunité du maintien et le niveau de portage le plus pertinent de chaque politique publique. Cela pourra notamment le conduire à proposer des transferts entre les différents niveaux de collectivités publiques, des transferts au secteur privé, voire des abandons de missions. Il identifiera également les chevauchements et les doublons de compétences qui sont source de coûts injustifiés.

À partir de feuilles de route notifiées à chaque ministre, Edouard Philippe souhaite – pour orienter les travaux du Comité et lancer le dialogue avec lui – que chaque ministre élabore une contribution initiale synthétique qui aura pour objectif de proposer des réformes structurelles et de transformation à horizon 2022 sur quatre points spécifiques :

  • le périmètre souhaitable des politiques publiques dont le ministre a la charge,
  • le niveau de portage le plus pertinent pour chacune d’entre elles (suppression des chevauchements de compétences ; transfert entre collectivités, au secteur privé, voire abandon de missions) ;
  • les économies durables et structurelles ;
  • les pistes d’amélioration de la qualité du service.

Déployer une démarche de « Lean Management » au sein de l’administration

Parallèlement aux travaux du Comité, cinq chantiers transversaux seront conduits sur les thématiques suivantes : la simplification administrative et l’amélioration de la qualité de service, la transformation numérique, la rénovation du cadre des ressources humaines, l’organisation territoriale des services publics et la modernisation de la gestion budgétaire et comptable. Notre organisation syndicale souhaite tout particulièrement que ses propositions regroupées au sein du Livre blanc des juridictions financières soient retenues à cette occasion.

Ces chantiers sont un levier pour la transformation des différentes administrations. Edouard Philippe demande à ses ministres de veiller à ce que leurs services y contribuent activement. Pour conduire ces travaux, chaque ministre pourra solliciter l’appui du secrétariat général pour la modernisation de l’action publique sur les aspects méthodologiques, en tant que de besoin. Chaque ministre sera ensuite auditionné par le Comité sur la base de ses contributions et échangera avec lui tout au long du processus de revue des missions, jusqu’à la remise de ses conclusions finales avant la fin du premier trimestre 2018.

Enfin, afin d’impliquer l’ensemble des Français, Edouard Philippe a également décidé d’organiser un Grand Forum de l’action publique dont l’ambition sera de recueillir les attentes et propositions des citoyens sur la transformation du service public et de réfléchir avec les agents publics à un cadre de travail modernisé. Il demande à ses ministres de s’engager activement dans cet événement en animant personnellement un des treize forums régionaux des services publics organisés entre novembre et décembre 2017.

À la suite de la phase de diagnostic alimentée par les trois volets d’Action publique 2022, (octobre 2017 — mars 2018), chaque ministre devra soumettre son projet de plan de transformation ministériel pour arbitrage. Ces plans seront présentés, par chacun des ministres, en conseil des ministres d’ici l’été 2018.

 

Pour en savoir davantage:

Quelles mesures adopter pour mettre fin à la situation de déficit excessif?

Une délégation du SJFu reçue à l’Elysée

Le SJFu reçu au cabinet du ministre de l’action et des comptes publics

 


Quelles mesures adopter pour mettre fin à la situation de déficit excessif?

La France connaît des déséquilibres macroéconomiques excessifs. Son économie se caractérise par un faible niveau de compétitivité et une dette publique élevée, voire en augmentation, dans un contexte de faible croissance de la productivité. Le risque de retombées négatives sur l’économie française est particulièrement important.

Les administrations publiques (administrations centrales, de sécurité sociale et locales) sont donc directement concernées par le volet correctif du pacte de stabilité et de croissance. Dans son programme de stabilité de 2017, le précédent Gouvernement prévoyait de corriger le déficit excessif en 2017, conformément à la recommandation du Conseil de l’Union européenne [le Conseil] du 10 mars 2015, avec un déficit nominal de 2,8 % du PIB. Le déficit nominal devrait ensuite continuer de diminuer pour atteindre 1,3 % du PIB en 2020. L’objectif budgétaire à moyen terme – un déficit structurel de 0,4 % du PIB – devrait être atteint d’ici à 2019.

Cependant, le solde structurel, tel que recalculé par la Commission européenne [la Commission], devrait atteindre -1,2 % du PIB en 2020, et l’objectif à moyen terme ne devrait pas être atteint d’ici là. Selon le programme de stabilité, le ratio de la dette publique au PIB devrait passer de 95,9 % du PIB en 2018 à 93,1 % du PIB en 2020. Le scénario macroéconomique sur lequel reposent ces projections budgétaires est plausible. Cependant, les mesures présentées par la France à la Commission pour garantir le respect des objectifs fixés en matière de déficit à partir de 2018 ne sont pas, selon cette dernière, suffisamment détaillées.

Le 10 mars 2015, le Conseil avait recommandé à la France de mettre fin à la situation de déficit excessif en 2017 au plus tard et d’atteindre un déficit public de 2,8 % du PIB, correspondant à une amélioration du solde structurel de 0,9 % du PIB, en 2017. Selon les prévisions du printemps 2017 de la Commission, le déficit nominal devrait atteindre 3,0 % du PIB en 2017, ce qui dépasse l’objectif recommandé par le Conseil. Pour 2018, dans l’hypothèse de politiques inchangées, le déficit nominal devrait atteindre 3,2 % du PIB et donc dépasser la valeur de référence du traité, ce qui suggère des risques entourant la correction durable du déficit excessif. En outre, l’effort budgétaire recommandé ne devrait pas être fourni sur la période couverte par la procédure de déficit excessif, la stratégie d’assainissement budgétaire de la France reposant principalement sur l’amélioration de la conjoncture et la persistance de taux d’intérêt bas, lesquelles sont hors du contrôle du Gouvernement.

Pour 2018, si la France devait finalement parvenir à une correction durable et en temps voulu de son déficit, elle serait alors soumise au volet préventif du pacte de stabilité et de croissance et aux dispositions transitoires en matière de dette. Étant donné sa situation budgétaire et notamment le niveau de sa dette, la France devrait poursuivre l’ajustement en direction de son objectif budgétaire à moyen terme, soit un déficit structurel de 0,4 % du PIB. Selon la matrice d’ajustement prévue dans le pacte de stabilité et de croissance, cet ajustement correspond à l’exigence d’un taux de croissance nominale des dépenses publiques primaires nettes[1] ne dépassant pas 1,2 % en 2018. Cela correspondrait à un ajustement structurel annuel de 0,6 % du PIB. Dans l’hypothèse de politiques inchangées, il existe un risque d’écart significatif par rapport à cette exigence en 2018. Il existe également un risque que la France ne respecte pas les dispositions transitoires en matière de dette en 2018, une détérioration du solde structurel de 0,5 % du PIB étant prévue, au lieu de l’ajustement structurel linéaire minimal de 0,4 % du PIB.

Dès lors, la France doit dès 2018, à la lumière des conditions conjoncturelles, adopter des mesures supplémentaires pour assurer le respect des dispositions du pacte de stabilité.  Le projet de plan budgétaire de la France pour 2018, c’est à dire, concrètement, le projet de loi de finance, l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (ONDAM) inscrit dans la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) et l’objectif d’évolution de la dépense publique locale (ODELEL)[3] devront dûment tenir compte de l’objectif consistant à parvenir à une orientation budgétaire qui contribue aussi bien à conforter la reprise actuelle qu’à garantir la viabilité des finances publiques du pays.

Dans cette perspective, le Conseil a récemment invité le nouveau Gouvernement à infléchir la politique de la France dans les directions suivantes:

Renforcer l’impact des revues de dépenses

Le niveau des dépenses publiques en France est l’un des plus élevés de l’Union européenne [UE]. Le ratio des dépenses au PIB devrait atteindre 56,2 % en 2017, soit 9,7 points de pourcentage de plus que pour l’UE. La France a suivi une stratégie d’assainissement axée sur les dépenses qui a principalement reposé sur la baisse des taux d’intérêt et sur des coupes dans les investissements publics. Il est, selon la Commission, peu probable que l’environnement de taux bas perdure à moyen terme, tandis que les coupes dans les investissements productifs pourraient nuire au potentiel économique futur. En revanche, les revues de dépenses ont mis en évidence un certain nombre de gains d’efficience possibles qui n’ont pas été mis en œuvre. Les revues de dépenses ont permis de trouver une faible partie (moins de 2 %) des réductions de dépenses d’un montant total de 50 milliards d’EUR prévues sur la période 2015-2017. Cependant, une partie seulement de ces économies possibles se sont traduites par des mesures concrètes dans le budget 2016, tandis que les mesures de la loi de finances de 2017 ont reposé sur les possibilités d’économies déjà repérées lors de l’exercice de revue de dépenses de 2015. Les économies découlant des revues de dépenses pourraient être nettement augmentées si les domaines de dépenses examinés étaient élargis et si une stratégie pluriannuelle était mise en œuvre afin que les possibilités d’économies identifiées se traduisent par des mesures budgétaires concrètes.

Simplifier les dispositifs  de réduction du coût de la main-d’œuvre en les transformant en réductions permanentes des cotisations sociales

Un niveau élevé de charges sociales et de taxes pesant sur les sociétés peut décourager l’investissement privé et brider la croissance des entreprises et l’embauche de nouveaux salariés. Des mesures destinées à réduire le coût de la main d’œuvre ont continué à être mises en œuvre, avec le lancement, en avril 2016, de la deuxième phase de baisse des cotisations patronales prévue dans le cadre du pacte de responsabilité et de solidarité. En outre, l’ancien gouvernement avait augmenté le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE), qui passe de 6 % à 7 % en 2017. Ces mesures de réduction de la pression fiscale sur le travail ont amélioré la compétitivité de la France depuis 2013, mais les pertes précédemment accumulées n’ont pas encore été récupérées. Pour le salaire moyen, la France affichait en 2015 les cotisations sociales patronales les plus élevées de l’UE en pourcentage du coût total de la main-d’œuvre payé par l’entreprise, bien que leur niveau soit en baisse. Les évaluations récentes de ces mesures ont montré leur effet positif sur l’emploi et sur les marges bénéficiaires des entreprises, mais de nouvelles évaluations sont nécessaires afin d’estimer pleinement leur impact sur les salaires, l’investissement, l’emploi et les marges des entreprises. De récentes évaluations suggèrent également que le regroupement de tous les dispositifs de réduction du coût de la main-d’œuvre et leur transformation en réductions permanentes des cotisations sociales permettraient d’optimiser leurs effets sur l’emploi et l’investissement.

Augmenter l’impôt sur la consommation, simplifier les impôts sur les revenus

À 38,4 % en 2016, le taux moyen d’impôt effectif sur les sociétés était le plus élevé de l’UE, d’autres taxes sur la production étant également particulièrement élevées. Pour infléchir cette tendance, le précédent Gouvernement avait annoncé des mesures visant à ramener le taux normal de l’impôt sur les sociétés à 28 % en 2020. Parallèlement, la charge fiscale continue de moins peser sur la consommation que dans les autres États membres de l’UE. En 2014, la France occupait le 27e rang de l’UE pour les recettes provenant des impôts sur la consommation en pourcentage des recettes fiscales totales. Le système de TVA se caractérise par un taux normal de niveau moyen et des taux réduits faibles appliqués à une large assiette. La complexité du système fiscal fait entrave au bon fonctionnement de l’environnement des entreprises. La France a une pression fiscale élevée qui coexiste avec de nombreux allégements fiscaux, des taux réduits et un grand nombre de régimes fiscaux, ce qui entraîne des incertitudes et des coûts de mise en conformité accrus. Les dépenses fiscales totales sont importantes en France, à plus de 3 % du PIB. Le coût administratif, pour le fisc, de la collecte des impôts est également élevé et se situe au-dessus de la moyenne de l’UE.

Faire coïncider les possibilités de formation avec les besoins économiques et les perspectives d’emploi

En 2016, le taux de chômage a reculé à 10,1 %. Il est plus élevé chez les jeunes, les travailleurs peu qualifiés et les personnes qui ne sont pas nées dans l’UE. Les réformes de la gouvernance qui sont en cours sont essentielles pour faire coïncider les possibilités de formation avec les besoins économiques et les perspectives d’emploi. Parallèlement, les demandeurs d’emploi, les travailleurs peu qualifiés et les salariés de PME rencontrent des difficultés persistantes à accéder à des formations.

Réduire les inégalités d’accès à la formation initiale et continue

Pour faire en sorte qu’ils puissent participer à des formations et que les formations proposées soient pertinentes, un renforcement des mesures existantes et un rééquilibrage des ressources pourraient être nécessaires. Entrer sur le marché du travail reste difficile pour les jeunes, en particulier pour les moins qualifiés. Dans ce contexte, les mesures prises en faveur de l’apprentissage ont jusqu’à présent donné des résultats positifs. Mais l’offre d’enseignement et de formation professionnels initiaux qui est proposée, en particulier dans certains secteurs tertiaires et lorsque cet enseignement se déroule en milieu scolaire, n’est pas suffisamment liée aux possibilités d’emploi. En outre, les élèves issus de milieux défavorisés sont plus souvent dirigés vers l’enseignement professionnel initial, où se concentre la grande majorité des décrochages scolaires, ce qui contribue aux fortes inégalités dans le domaine de l’éducation. L’impact du statut socio-économique sur les performances des étudiants est le plus élevé des pays de l’OCDE.

Augmenter le taux d’emploi en réduisant les discriminations à l’embauche

En 2016, seules 54,5 % des personnes nées en dehors de l’UE et en âge de travailler avaient un emploi. Le taux d’emploi des femmes (45,4 %) était l’un des plus faibles de l’UE. L’écart entre le taux d’emploi des personnes nées en dehors de l’UE et celui des personnes nées en France s’est creusé à 17,5 points de pourcentage en 2016 (23,7 points de pourcentage pour les femmes). La mauvaise performance des personnes nées en dehors de l’UE tire le taux d’emploi global vers le bas et représente une sous-utilisation chronique de la main-d’œuvre. Les immigrés de deuxième génération sont également confrontés à des perspectives d’emploi défavorables, qui ne s’expliquent pas par des différences d’âge, de formation ou de compétences. En outre, les écarts en matière de réussite scolaire sont persistants, les immigrés de deuxième génération ne les comblant que partiellement. Pour remédier à ce problème, une stratégie globale est nécessaire, qui comprenne notamment des mesures ciblées en matière de compétences linguistiques, de mise à niveau, de formation et d’orientation professionnelle, ainsi que d’autres politiques actives ciblées du marché du travail. Pour favoriser la participation au marché du travail, il est essentiel de garantir l’accès effectif aux services et d’agir contre les pratiques discriminatoires limitant l’embauche de personnes nées en dehors de l’UE et d’immigrés de deuxième génération.

Faciliter l’accès à l’emploi des travailleurs peu qualifiés

Depuis 2013, le salaire minimum en France a suivi les règles d’indexation qui lui sont applicables. Dans un contexte de faible inflation et de ralentissement de la croissance des salaires, son augmentation a été plus faible que celle des salaires de référence. Le salaire minimum est élevé par rapport au salaire médian, mais le coût du travail au salaire minimum a été réduit par des exonérations de cotisations sociales. Une augmentation du salaire minimum entraîne des augmentations salariales pour la plupart des catégories de travailleurs et comporte le risque de compresser les salaires vers le haut. Si l’indexation du salaire minimum est importante pour préserver le pouvoir d’achat des travailleurs, le mécanisme d’indexation actuel pourrait contribuer à retarder le nécessaire ajustement global des salaires. En outre, dans le contexte actuel de chômage élevé, le coût du travail au salaire minimum risque de restreindre les perspectives d’emploi des personnes peu qualifiées.

Améliorer la capacité d’adaptation des entreprises aux cycles économiques et à réduire la segmentation du marché du travail

Avec la loi de juillet 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels, la France a instauré des mesures visant à améliorer la capacité d’adaptation des entreprises aux cycles économiques et à réduire la segmentation du marché du travail. Cette loi clarifie les règles applicables au licenciement individuel pour motif économique, accorde une place plus importante aux accords majoritaires d’entreprise et augmente l’efficacité de la négociation collective. La persistance de taux de chômage élevés a mis à mal la soutenabilité du système d’assurance-chômage. À cet égard, les partenaires sociaux ont conclu en mars 2017 un accord sur une nouvelle convention d’assurance chômage, devant être agréée par le gouvernement français, qui vise à réduire le déficit annuel de 1,2 milliard d’EUR.

Simplifier l’environnement juridique des entreprises

Bien que la France ait amélioré ses performances globales en matière de réglementation, l’environnement des entreprises continue de se classer à un niveau moyen par rapport à ses principaux concurrents. En particulier, malgré de constants efforts de simplification, les entreprises restent confrontées à de lourdes contraintes réglementaires et à une législation qui change rapidement. C’est l’un des principaux obstacles à l’investissement privé. Dans le cadre de son programme de simplification, la France a pris des mesures afin de réduire les lourdeurs administratives auxquelles sont confrontées les entreprises, mais un grand nombre de mesures adoptées avant 2016 n’ont pas encore été mises en œuvre. Dans le même temps, des effets de seuil continuent de limiter le développement des entreprises, ce qui a des implications pour leurs performances économiques et de marché. Les obligations sociales et fiscales accrues qui leur incomberaient au-delà d’un certain nombre de salariés peuvent dissuader les entreprises d’atteindre une taille qui leur permettrait d’exporter et d’innover. Ces effets de seuil peuvent alors avoir un effet négatif sur la productivité, la compétitivité et l’internationalisation des entreprises. En effet, d’après des données empiriques, les seuils de 10 et de 50 salariés sont particulièrement coûteux pour les employeurs, tandis que l’économie française se caractérise par une proportion particulièrement faible d’entreprises au-dessus de ces seuils, ce qui suggère un lien entre ces deux phénomènes.

Lever les barrières qui limitent l’accès à certaines professions

La concurrence dans les services s’est améliorée dans un certain nombre de secteurs, mais certains secteurs importants sur le plan économique, tels que la comptabilité, l’architecture, les services à domicile, les services d’hébergement et de restauration, les services de taxi et de location de véhicules avec chauffeur, restent caractérisés par une faible concurrence et/ou des obstacles réglementaires. Des obstacles demeurent pour ces services, notamment des exigences réglementaires excessives, qui découragent l’entrée sur le marché ou limitent l’essor d’une concurrence effective. La réduction de ces obstacles pourrait permettre aux entreprises existantes, ou à de nouvelles venues, de profiter des nouvelles évolutions technologiques et numériques pour renforcer leur compétitivité et/ou pénétrer sur des marchés, ce qui, en faisant baisser les prix et en améliorant la qualité des services, serait bénéfique aux consommateurs.

Simplifier l’accès aux aides publiques à l’innovation

Les résultats de la France dans le domaine de l’innovation ne sont pas à la hauteur de ceux des champions européens en la matière. Un degré élevé de complexité demeure et la coordination générale pose problème. Le décalage, en France, entre les aides publiques à l’innovation et les résultats moyens obtenus en la matière soulève des questions quant à l’efficience des mécanismes de soutien public. En particulier, la coopération entre la recherche publique et les entreprises n’est pas optimale, ce qui pèse sur le résultat économique du système d’innovation.

 

[1] Les dépenses publiques nettes sont constituées des dépenses publiques totales diminuées des dépenses d’intérêt, des dépenses liées aux programmes de l’Union qui sont intégralement couvertes par des recettes provenant de fonds de l’Union et des modifications non discrétionnaires intervenant dans les dépenses liées aux indemnités de chômage. La formation brute de capital fixe financée au niveau national est lissée sur une période de 4 ans. Les mesures discrétionnaires en matière de recettes ou les augmentations de recettes découlant de mesures législatives sont prises en compte. Les mesures exceptionnelles, tant sur le front des recettes que des dépenses, sont déduites.

[3]  La loi n° 2014-1653 du 29 décembre 2014 de programmation des finances publiques a fixé des objectifs d’évolution de la dépense publique locale pour les années 2014 et 2019 : l’article 11 dispose que « les collectivités territoriales contribuent à l’effort de redressement des finances publiques, selon des modalités à l’élaboration desquelles elles sont associées ». L’objectif d’évolution de la dépense publique locale (ODELEL), exprimé en pourcentage d’évolution annuelle et à périmètre constant, est déterminé après consultation du comité des finances locales et fait l’objet d’un suivi national, en lien avec ce comité.

 

Pour en savoir davantage:

Recommandation du Conseil de l’Union européenne concernant le programme national de réforme de la France pour 2017 et portant avis du Conseil sur le programme de stabilité de la France pour 2017, 22 mai 2017.

Les réformes engagées sont elles suffisantes pour sortir la France de la procédure pour déficit excessif?

Vademecum du semestre européen

Tristes stratèges européens

 


Selon le Coe-Rexecode, la croissance mondiale pourrait ralentir dès 2019

Une fois par an, l’équipe conjoncture du Centre d’observation économique et de Recherche pour l’Expansion de l’économie et le Développement des Entreprises (Coe-Rexecode) élargit ses prévisions pour l’économie mondiale à un horizon de 5 ans. Selon ces prévisions, disponibles sur le site Internet de ce centre d’études économiques de la Chambre de Commerce et d’Industrie de Paris, une croissance mondiale un peu plus vive se dessinerait à court terme. Associée à la relance américaine, elle fabriquerait toutefois les conditions de son retournement dès 2019. Selon les analystes du Coe-Rexecode trois éléments pèseront de façon significative sur la croissance à moyen terme : le fléchissement des croissances potentielles, la sortie des politiques monétaires exceptionnelles, dites de « Quantitative Easing » (QE), et le retour de mesures protectionnistes. D’ici 2021, les rythmes de croissance seront partout inférieurs à ceux d’avant crise.

Derrière la relative euphorie que dépeignent les indicateurs de climat des affaires à l’échelle mondiale, les risques macroéconomiques qui s’accumulent pourraient faire caler la petite reprise économique.

Dix ans après la grande récession (2007 – 2017), le paysage économique mondial s’est, selon les économistes du Coe-Rexecode, profondément modifié :

  • Les rythmes de croissance potentielle ont fléchi partout avec la combinaison du vieillissement, des pertes durables de capital physique et humain durant la crise et la faible incidence du numérique sur la productivité.
  • La sortie progressive des politiques monétaires exceptionnelles dictera en grande partie le tempo du cycle économique. Le levier budgétaire prendra sûrement le relais, mais pour plusieurs économies dont la France, la question clé sera celle de la soutenabilité de la dette publique. Le taux d’intérêt des obligations souveraines françaises à 10 ans s’est tendu, dans le sillage des taux américains. Plus inquiétant, l’écart entre le taux français et le taux allemand a atteint courant février un niveau inédit depuis la crise des dettes souveraines de 2011-12. La hausse des taux d’intérêt, telle qu’anticipée par les économistes du Coe-Rexecode,  devrait compliquer sensiblement la situation des finances publiques françaises, davantage que celles des autres grands pays européens.
  • Les échanges mondiaux ont ralenti, le monde « rétrécit ». Si les barrières commerciales n’ont joué qu’un rôle secondaire dans le fléchissement récent du commerce mondial relativement à la croissance, une nouvelle phase semble s’ouvrir avec des réflexes protectionnistes de plus en plus assumés. Une mauvaise nouvelle pour la croissance potentielle vu les gains d’efficacité-coût associés aux échanges. Certes, le ralentissement du commerce international est davantage lié à celui de la croissance mondiale et à des tendances plus profondes tels que le rééquilibrage chinois ou la dynamique affaiblie des chaînes de valeur mondiale, qu’au retour rampant du protectionnisme depuis la crise. Toutefois, la prolifération des mesures protectionnistes ou un scénario plus extrême d’escalade des tensions commerciales fait peser un risque élevé sur l’économie mondiale.

Les économistes du Coe-Rexecode estiment par ailleurs que si des risques s’atténuent depuis un an, d’autres apparaissent :

  • Le risque lié à la déstabilisation des producteurs de matières premières énergétiques s’est atténué. Mais d’autres restent bien présents : le risque de formation d’une bulle d’actifs alimentée par les banques centrales, l’accumulation de dettes dans les économies émergentes, ou encore les divergences européennes, accentuées par le Brexit. Le scénario de référence du Coe-Rexecode pour la zone euro suppose la persistance de déséquilibres intra-européens et une divergence durable des niveaux de vie qui se poursuivrait sans heurts à horizon 2021. Mais les économistes du Coe-Rexecode estiment qu’un scénario de rupture au sein de la zone euro ne peut pas être écarté. Il pourrait se matérialiser en raison de facteurs politiques échappant à la seule analyse économique, mais aussi à la suite d’une normalisation monétaire trop brutale de la Banque centrale européenne (BCE).
  • De nouveaux risques liés à la politique économique américaine et au protectionnisme. Une fois l’arme budgétaire déchargée, la croissance américaine pourrait buter sur la combinaison d’inflation, de hausses de taux et d’appréciation (modérée) du dollar qu’engendreraient les mesures protectionnistes et anti-migratoires. La croissance américaine pourrait ainsi s’essouffler en 2019.

En définitive, la croissance mondiale sera probablement plus vive en 2017 qu’en 2016, mais sans accélération en 2018. Elle risque surtout de fabriquer les ingrédients qui pourraient la ralentir dès 2019 :

  • Si la normalisation des taux d’intérêt est acquise, l’inconnue reste sa vitesse et son point d’arrivée. Avec le surcroît de croissance attendu aux Etats-Unis, l’activité dépassera son niveau potentiel, ne laissant d’autre choix à sa banque centrale que de remonter ses taux pour tempérer le risque inflationniste. Le niveau des taux à long terme se rapprocherait alors de la croissance nominale américaine, mais pas d’ici la fin 2018.
  • La remontée généralisée des taux est porteuse de risques de déstabilisation financière pour les économies émergentes. Leurs devises se sont déjà dépréciées, leur capacité d’endettement se réduira. Les pays exportateurs de pétrole bénéficieront d’un surcroît de recettes si l’accord de contingentement de la production est bien appliqué. Mais le potentiel de rebond des prix du pétrole demeure réduit.

Rappel des objectifs initiaux du projet de loi portant réforme des juridictions financières


De nombreux collègues ont vécu de façon extrêmement intense les différents soubresauts du projet de loi portant réforme des juridictions financières, jusqu’à sa mise en œuvre partielle voire partiale.  Nombreux sont aussi, désormais, les collègues qui n’étaient pas encore dans les chambres à cette époque. Aussi convient-il de rappeler, alors que nous réfléchissons à un livre blanc sur l’avenir des juridictions financières, que ce projet devait unifier les chambres régionales des comptes  et la Cour des comptes, créer des chambres interrégionales des comptes, et renforcer le rôle de tous les magistrats financiers en matière d’évaluation des politiques publiques.

Après son examen au Conseil d’Etat, le projet de loi portant réforme des juridictions financières  a été  adopté en Conseil des ministres le 28 octobre 2009. Texte alors très attendu, d’ampleur considérable, il devait unifier les chambres régionales des comptes et la Cour des comptes en une seule entité, les CRC devenant de simples chambres de la Cour. Dans ce cadre, des chambres interrégionales des comptes devaient voir le jour. Il s’agissait, notamment, pour le Premier président d’alors, d’atteindre la masse critique permettant une spécialisation des magistrats et d’homogénéiser leurs méthodes afin de favoriser des comparaisons entre collectivités territoriales.

Si les auteurs de ce texte affirmaient que l’examen de gestion des collectivités locales conserverait toute son importance, le projet de loi visait clairement à conforter le travail de tous les magistrats en matière d’évaluation des politiques publiques. Par ailleurs, il faisait de la Cour des comptes la juridiction unique en matière de surveillance et de sanction de la discipline budgétaire et financière. Il créait une juridiction d’appel, ainsi qu’un tribunal de cassation financier. Enfin, une expérimentation de la certification des comptes des collectivités locales par la Cour devait être lancée avec des collectivités volontaires.

Le projet initial a fait l’objet d’une discussion en commission des lois de l’Assemblée nationale. Celle-ci l’a profondément modifié. La réforme devenant impossible, aux yeux du Gouvernement, la décision fut prise de l’abandonner pour l’essentiel et d’incorporer quelques éléments de celle-ci dans un autre texte devenu la loi du 13 décembre 2011 relative à la répartition des contentieux et à l’allègement de certaines procédures juridictionnelles. Depuis lors, d’autres dispositions du projet de loi ont été introduites à l’occasion d’examen de projets législatifs connexes à nos missions, notamment celui de la loi Déontologie, droits et obligations des fonctionnaires :

1) Une unité organique de l’ensemble des juridictions financières

L’article 5 du projet visait à établir l’unité organique de l’ensemble des juridictions financières. Autrement dit, il était proposé d’unifier Cour et chambres régionales des comptes pour en faire une seule et même entité. Les chambres régionales des comptes devaient cesser d’être des juridictions autonomes et devaient devenir des composantes de la Cour, au même titre que ses actuelles chambres. Elles devaient prendre le nom de chambres des comptes. La programmation, les méthodes et la conduite des contrôles concernant les politiques partagées devaient ainsi être unifiées. «Les contrôles seraient ainsi plus homogènes et mieux ciblées», faisaient alors valoir les auteurs du projet de loi. Mais, précisaient-ils, «cela ne remettrait nullement en cause le traditionnel contrôle organique, l’examen de gestion, qui garderait toute son importance». La commission des loi de l’Assemblée nationale s’est prononcée contre cette unité organique.

L’article 2 du projet de loi concernait d’ailleurs la compétence que devait exercer la Cour des comptes dans le contrôle organique des principaux acteurs locaux, dénommé à l’heure actuelle, pour quelques mois encore, «examen de gestion», et «qu’il s’agit (indiquait l’exposé des motifs) de consacrer et de renforcer davantage compte tenu de son importance dans le fonctionnement harmonieux d’une république désormais décentralisée». Les procédures applicables en la matière, de même que les modalités de mise en œuvre de cette compétence devaient être fixées par ordonnance. On se souvient à cet égard que, récemment, le projet initial d’ordonnance n° 2016-1360 du 13 octobre 2016 modifiant la partie législative du code des juridictions financières introduisait de façon subreptice une disposition prévoyant une telle extension des compétences de la Cour aux dépens de celles des chambres régionales et territoriales des comptes. Notre organisation syndicale avait obtenu le retrait de cette disposition.

Le projet de loi proposait la création de chambres interrégionales, visant «à constituer des équipes ayant la masse critique pour mener des travaux complexes et divers, et permettre aux magistrats de se spécialiser». Il s’agissait également «de favoriser l’homogénéité des méthodes de contrôle, de rendre plus faciles les comparaisons entre collectivités, et de conduire à des économies d’échelle par la mutualisation des moyens et des fonctions support». Nous avons connu depuis lors les normes professionnelles (1), le centre d’appui méthode (CAM) et le regroupement des chambres (2), lesquelles ont vu leurs moyens humains d’appui se réduire considérablement à cette occasion, au risque de conduire les magistrats à effectuer des tâches administratives auparavant assurées par un secrétariat dédié.

La détermination des ressorts interrégionaux devait relever du pouvoir réglementaire, ce qui a finalement été décidé (2). Il était précisé, par ailleurs, que les futures chambres régionales pourraient comporter des antennes régionales, implantées dans les sièges des CRC, «afin de favoriser les transitions». Il était également proposé de créer un cadre statutaire unique et commun aux magistrats exerçant au siège et en région. Ces deux projets de dispositions sont en revanche restés lettre morte.

2) Une fonction d’évaluation des politiques publiques affirmée

L’article 3 du projet de loi portait sur l’évaluation des politiques publiques. «La légitimité de l’auditeur en matière d’évaluation doit être plus affirmée», estimaient les auteurs de ce texte. «La répartition actuelle des compétences entre la Cour et les chambres régionales, ainsi que les modalités de programmation, cloisonnées, ne permettent pas d’organiser efficacement, et de façon homogène, l’évaluation des politiques conduites, tant au niveau national que local», était-il constaté. «La conduite d’une enquête commune aux deux niveaux de juridiction prend au moins deux ans. Son organisation est tributaire du choix de chaque CRC, juridiction autonome, de participer ou non au travail en commun. Ceci rendait difficile pour la Cour des comptes de répondre aux demandes d’évaluation, lorsque celles-ci portaient sur des politiques dont la mise en œuvre était en partie décentralisée, ce qui recouvre désormais les cas les plus nombreux et les plus importants». Ont depuis lors été créées les formation inter juridictions (3), puis, plus récemment, à la demande de notre organisation syndicale, la distinction entre FIJ1 et FIJ2 (4).

Le projet de loi décrivait également, dans son exposé des motifs, des ressorts régionaux actuels trop nombreux et trop dissemblables. «Souvent trop restreints, ils ne donnent pas les éléments de comparaison nécessaires, spécialement pour les grandes collectivités.». Il ont ultérieurement été limité à 20 puis à 13 en métropole (2).

3°) La Cour des comptes juridiction budgétaire et financière unique

Le I de l’article 1 du projet de loi faisait de la Cour des comptes la juridiction unique en matière de surveillance et de sanction de la discipline budgétaire et financière. Une juridiction unique de laquelle aurait relevé, en plus des comptables, les ordonnateurs, et gestionnaires, qui sont aujourd’hui du ressort de la Cour de discipline budgétaire et financière (CDBF). «La situation actuelle est en effet celle d’une responsabilité de plus en plus partagée entre l’ordonnateur et le comptable public, tant en termes de tenue des comptes qu’en termes de contrôle de la dépense», indiquait l’exposé des motifs du projet de loi. «Dès lors, la dualité actuelle des juridictions (Cour des comptes pour les comptables, CDBF pour les ordonnateurs), ne se justifie plus» affirmaient les auteurs du projet de loi. Cette unification devait permettre en outre «d’accroître la cohérence, la transparence et la lisibilité des mécanismes de sanction vis-à-vis de l’administration, du parlement, et de l’opinion publique».

Le 1 de l’article 6 devait instituer une cour d’appel des juridictions financières, afin que l’ensemble des justiciables se voit reconnaître la possibilité d’accéder à un juge d’appel. Un tribunal de cassation financier devait être également institué «pour assurer sur l’ensemble des juridictions financières l’homogénéité de jurisprudence souhaitable». Cette proposition avait vivement été contestée par le Conseil d’Etat, seul habilité, selon lui, à casser une décision de la Cour des comptes, juridiction administrative.

La responsabilité des ordonnateurs locaux et nationaux, à l’exception des ministres, qui devaient devenir justiciable de la Cour des comptes (et non plus uniquement de la Cour de discipline budgétaire et financière)  dans le projet de loi de 2009 relatif à la réforme des juridictions financières a été l’objet d’une tentative de sauvetage partiel par amendement lors de l’examen du projet de loi relative à la répartition des contentieux et à l’allègement de certaines procédures juridictionnelles. Le dispositif faisait l’objet d’un article 24 quater qui fut en définitive expurgé de la loi lors de sa lecture à l’Assemblée nationale.

4°) Expérimentation de la certification des comptes des collectivités

Le 1 de l’article 4 de ce projet consacrait le rôle de la Cour des comptes dans le processus de certification des comptes publics. Il était proposé que la Cour coordonne une expérimentation légale de la certification des comptes des collectivités locales, qui devait être menée avec certaines collectivités volontaires. Ce projet a finalement pris corps avec l’article 110 de la loi NOTRé (5). Une telle expérimentation devait  impliquer un certain nombre de conditions préalables, qui devaient être précisées, comme l’établissement d’un compte financier unique, l’adoption de référentiel de normes comptables, le développement du contrôle interne, ce qui – déjà – justifiait un commencement de mise en œuvre de cette mesure différé de trois ans après la promulgation de la loi.

Le Conseil d’Etat avait alors rappelé que l’activité de certification des comptes des administrations autres que l’Etat constitue une activité marchande, qui doit respecter les règles de la commande publique et de la libre prestation de services. Au terme de l’expérimentation, la Cour des comptes était appelée à proposer ses services de certification aux administrations publiques autres que l’Etat dans le respect de ces obligations et, notamment, en respectant leur liberté de choix et en assurant la facturation de ses travaux dans les conditions du marché.

En définitive, seules la responsabilité des gestionnaires et l’unité organique des juridictions financières, y compris dans son volet statutaire, nécessitent encore aujourd’hui une attention soutenue.

Notes:

  1. Article 38 de la loi relative à la répartition des contentieux et à l’allègement de certaines procédures juridictionnelles du 13 décembre 2011;
  2. L’article 46 de la loi relative à la répartition des contentieux et à l’allègement de certaines procédures juridictionnelles du 13 décembre 2011 limite à vingt le nombre de chambre régionale des comptes (CRC) et renvoie à un décret en Conseil d’État le soin de fixer leurs sièges et leurs ressorts. Dès 2012, les juridictions financières avaient engagé une réforme du périmètre des CRC en métropole, les faisant passer de 22 à 15. La loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République a ramené ce nombre à 13 depuis le 1er janvier 2016 ;
  3. Article 40 de la loi relative à la répartition des contentieux et à l’allègement de certaines procédures juridictionnelles du 13 décembre 2011;
  4. Ordonnance n° 2016-1360 du 13 octobre 2016 modifiant la partie législative du code des juridictions financières prise en application de la loi Déontologie, droits et obligations des fonctionnaires;
  5. Loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République.

La commission nationale des sanctions publie son deuxième rapport annuel

La Commission nationale des sanctions est une institution indépendante chargée de sanctionner les manquements aux obligations issues du dispositif de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme commis par les professions soumises à ce dispositif mais qui n’appartiennent pas au secteur bancaire et financier et qui ne disposent pas d’un ordre professionnel ou d’un organisme disciplinaire.Elle a été instituée par la loi auprès du Ministre de l’économie et est régie par les dispositions du code monétaire et financier. Sa création répond à la volonté des autorités françaises d’assurer, conformément à leurs engagements européens et internationaux, la pleine application et le plein respect du dispositif de lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme par les professions qui y sont soumises.

Présidée par Francis Lamy, la Commission nationale des sanctions a commencé à siéger à la fin de l’année 2014. L’année 2016 aura donc été sa deuxième année de fonctionnement. Elle a remis son deuxième rapport à Michel Sapin le 31 janvier 2017.

Sur saisine du ministre de l’économie, onze affaires examinées ont concerné des agences immobilières et neuf des entreprises de domiciliation. Elles ont consisté principalement en des avertissements et des interdictions temporaires d’exercice de l’activité allant de trois mois à trois ans. Ces interdictions ont été assorties de sursis. Les sanctions pécuniaires se sont échelonnées de 1 000 à 200 000 euros avec sept sanctions d’un montant compris entre 10 000 et 20 000 euros. Les sanctions les plus graves étaient plus élevées que l’année précédente. Cela a pu tenir à la gravité des manquements mais aussi au fait, comme la Commission l’avait indiqué dans son précédent rapport, que l’ignorance de leurs obligations par les professionnels peut plus difficilement être invoquée comme circonstance atténuante avec les années qui passent.

En 2016, pour la première fois, la Commission nationale des sanctions a eu à connaître, sur saisine du ministre de l’intérieur, de deux cas de casinos et de cercles de jeux. Elle a constaté à cette occasion qu’à la différence des autres professionnels, la loi ne prévoyait de sanction pour méconnaissance des obligations applicables qu’à l’égard des personnes physiques, les personnes morales ne pouvant être sanctionnées. L’ordonnance du 1er décembre 2016 renforçant le dispositif français de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme a mis fin à cette exception.

Pour en savoir davantage:

Rapport de la Commission nationale des sanction 2016


La France demeure sous la surveillance de la Commission européenne

La procédure concernant les déséquilibres macroéconomiques (PDM) de l’Union européenne vise à déceler les déséquilibres qui entravent le bon fonctionnement des économies des États membres et à formuler des recommandations. La Commission désigne les États membres qui devraient faire l’objet de bilans approfondis afin de déterminer s’ils sont touchés par des déséquilibres nécessitant l’adoption de telles mesures après avoir pris connaissance d’un tableau de bord d’indicateurs assorti de seuils indicatifs et d’indicateurs auxiliaires.

Au regard de ce tableau de bord, la France connait toujours des déséquilibres macroéconomiques excessifs, avec notamment une dette publique élevée et croissante, conjuguée à une faible croissance de la productivité et à une compétitivité dégradée. Un certain nombre d’indicateurs dépassent encore le seuil indicatif, à savoir la dette publique, la dette du secteur privé, le chômage et l’évolution du chômage à long terme. Les indicateurs de déséquilibres externes et de compétitivité se sont largement stabilisés, comme le reflètent une balance courante proche de l’équilibre, le ralentissement des pertes cumulées de parts de marché à l’exportation, qui sont désormais en deçà du seuil, ainsi que la croissance maîtrisée des coûts salariaux unitaires. Cependant, la faiblesse de la croissance de la productivité du travail est un facteur de risque pour l’évolution des coûts salariaux unitaires. La dette publique, dont le niveau élevé ne cesse d’augmenter et devrait encore croître dans les années à venir, selon les prévisions, reste une source majeure de vulnérabilité. Le faible potentiel de croissance et la faible inflation aggravent les risques liés à la dette publique élevée en rendant plus difficile le désendettement. La dette du secteur privé dépasse le seuil, mais les pressions de désendettement semblent contenues. Les prix réels des logements ont amorcé une lente correction, et les crédits du secteur privé se sont stabilisés à des niveaux légèrement positifs.

Au troisième trimestre 2016, le taux de chômage en France progresse de 0,1 point sur trois mois, à 9,7% en métropole, soit 2,8 millions de personnes au chômage (au sens du BIT) dans un contexte de faible croissance. Un chiffre toutefois en baisse sur un an, avec 0,4 point de moins qu’au troisième trimestre 2015. Le chômage touche particulièrement les jeunes, les ressortissants de pays tiers et les travailleurs peu qualifiés. La dualité du marché du travail ne cesse d’augmenter, avec d’un côté, les travailleurs diplômés de l’enseignement supérieur embauchés en contrats à durée indéterminée et de l’autre, une proportion constante de travailleurs occupant des emplois peu qualifiés de plus en plus précaires. La hausse du chômage de longue durée s’est poursuivie.

Dans l’ensemble, la lecture économique du tableau de bord met en lumière des problèmes liés principalement à des déséquilibres intérieurs, notamment l’endettement public dans le contexte d’une faible croissance de la productivité et d’une faible compétitivité. La Commission juge donc utile, compte tenu également du déséquilibre excessif, d’examiner plus avant la persistance de risques macroéconomiques et de suivre les progrès réalisés dans la correction des déséquilibres excessifs. La France demeure donc sous la surveillance de la Commission européenne.

Pour en savoir davantage:

Rapport sur le mécanisme d’alerte 2017

Annexe statistique

 


Tristes stratèges européens

En 2008, l’Europe a été confrontée à une crise financière qui s’est muée en crise de la dette souveraine. Celle-ci s’explique par une conjonction de facteurs, comme la faiblesse de la surveillance bancaire, l’application de mauvaises politiques budgétaires et les difficultés rencontrées par de grandes institutions financières (dont le coûteux sauvetage a dû être financé avec l’argent du contribuable). La crise a déferlé sur les États membres de l’Union européenne en deux temps: elle a d’abord touché les pays situés en dehors de la zone euro (en 2008-2009), avant de s’étendre à cette dernière. Au total, huit États membres ont été contraints de demander une assistance macrofinancière: la Hongrie, la Lettonie, la Roumanie, l’Irlande, le Portugal, la Grèce, l’Espagne et Chypre.

Pour juguler cette crise, le Conseil européen du 17 juin 2010 a adopté la  stratégie de croissance  Europe 2020 pour les dix années alors à venir. Dans un monde en mutation, l’Union devait devenir une économie intelligente, durable et inclusive. Ces trois priorités devaient se renforcer mutuellement pour aider l’Union et ses États membres à assurer des niveaux élevés d’emploi, de productivité et de cohésion sociale. L’Union européenne s’était alors fixé cinq objectifs – qualifiés d’ambitieux – à atteindre d’ici 2020 en matière d’emploi, d’innovation, d’éducation, d’inclusion sociale et d’énergie (ainsi que de lutte contre le changement climatique). Chaque État membre avait adopté ses propres objectifs nationaux dans chacun de ces domaines. Des actions concrètes devaient être menées aux niveaux européen et national afin de décliner de façon opérationnelle cette stratégie.

 

Qu’est-ce que la stratégie Europe 2020?

La Stratégie Europe 2020 a succédé à la stratégie de Lisbonne lancée lors du Conseil européen de Lisbonne en 2000. Adoptée pour la période 2000 – 2010, la Stratégie de Lisbonne visait à faire de l’Union « l’économie de la connaissance la plus compétitive, capable d’une croissance économique durable accompagnée d’une amélioration quantitative et qualitative de l’emploi et d’une plus grande cohésion sociale ». Elle a montré ses limites au regard notamment de sa capacité à prévenir la crise économique de 2008 et sa transformation en crise souveraine deux ans plus tard.

Le Conseil européen des 13 et 14 mars 2008 a invité la Commission, le Conseil et les coordinateurs nationaux de la Stratégie de Lisbonne à entamer une réflexion sur l’avenir de celle-ci au-delà de 2010. La stratégie Europe 2020  se situe dans la continuité de la stratégie de Lisbonne mais renforce la nature qualitative des ses trois orientations de croissance:  une croissance intelligente, par le biais d’une économie fondée sur la connaissance et l’innovation ; une croissance durable, vers une économie plus efficace dans l’utilisation des ressources et agissant pour une réduction de gaz à effet de serre ; une croissance inclusive, promouvoir la création d’emploi favorisant la cohésion sociale et territoriale.

A la suite d’une consultation publique menée par la Commission européenne entre fin novembre 2009 et mi-janvier 2010, à laquelle la France a contribué, la Commission a présenté en mars 2010 une communication, qui proposait de fixer des objectifs chiffrés, accompagnés de cibles claires, dans les cinq domaines précités : porter à 75% le taux d’emploi des travailleurs entre 20 et 64 ans ;  porter à 3% du PIB le niveau cumulé des investissements publics et privés dans le secteur de la recherche et du développement (RD) ; stratégie 20-20-20 : réduire les émissions de gaz à effet de serre de 20% par rapport au niveau de 1990 ; passer à 20% la part d’énergie renouvelable ; augmenter de 20% l’efficacité énergétique ; améliorer le niveau d’éducation en réduisant le taux de décrochage scolaire à moins de 10% et en portant à 40% la proportion de personnes âgées de 30 à 34 ans disposant d’un diplôme de l’enseignement supérieur ou équivalent ; favoriser l’inclusion sociale en réduisant la pauvreté et en s’attachant à ce que 20 millions de personnes cessent d’être confrontées au risque de pauvreté.

Au niveau communautaire, sept initiatives-phares, qui « constituent les nouveaux moteurs de la croissance et de l’emploi » devaient orienter de façon concrète l’action de l’Union pour favoriser sa contribution à l’atteinte de ces objectifs :

– «Une Union pour l’innovation» visait à améliorer les conditions-cadres et l’accès aux financements pour la recherche et l’innovation afin de garantir que les idées innovantes puissent être transformées en produits et services créateurs de croissance et d’emplois;

– «Jeunesse en mouvement» visait à renforcer la performance des systèmes éducatifs et à faciliter l’entrée des jeunes sur le marché du travail;

– «Une stratégie numérique pour l’Europe» visait à accélérer le déploiement de l’Internet à haut débit afin que les entreprises et les ménages tirent parti des avantages d’un marché numérique unique;

– «Une Europe efficace dans l’utilisation des ressources» visait à découpler la croissance économique de l’utilisation des ressources, à favoriser le passage vers une économie à faible émission de carbone, à accroître l’utilisation des sources d’énergie renouvelable, à moderniser notre secteur des transports et à promouvoir l’efficacité énergétique;

– «Une politique industrielle à l’ère de la mondialisation» visait à améliorer l’environnement des entreprises, notamment des PME, et à soutenir le développement d’une base industrielle forte et durable, à même d’affronter la concurrence mondiale;

– «Une stratégie pour les nouvelles compétences et les nouveaux emplois» visait à moderniser les marchés du travail et à permettre aux personnes de développer leurs compétences tout au long de leur vie afin d’améliorer la participation au marché du travail et d’établir une meilleure adéquation entre l’offre et la demande d’emplois, y compris en favorisant la mobilité professionnelle;

– «Une plateforme européenne contre la pauvreté» visait à garantir une cohésion sociale et territoriale telle que les avantages de la croissance et de l’emploi sont largement partagés et que les personnes en situation de pauvreté et d’exclusion sociale se voient donner les moyens de vivre dans la dignité et de participer activement à la société.

Ces grandes lignes ont été validées par le Conseil européen des 25 et 26 mars 2010, avant que la Stratégie Europe soit définitivement adoptée et lancée par le Conseil européen du 17 juin 2010.

Au commencement, il y avait la zone euro. Les membres et les futurs membres devaient limiter leur déficit gouvernemental à 3% du produit national brut et le niveau de dette publique à 60%. Cela devait empêcher les crises futures et garantir la stabilité. Jusque là, tout va bien. Mais en 2008, une crise a éclaté. De nombreux États membres ont avoué ne pas avoir respecté les règles. La crise avait diverses causes, mais cela n’a pas aidé que tous les pays aient fait leurs propres comptes et budgets dans leur coin. Donc, en 2010, quand l’UE a défini sa nouvelle stratégie pour la croissance, les objectifs incluaient une meilleure coordination des politiques nationales sur : le budget, la croissance et l’emploi. Les 28 et les institutions de l’UE collaborent désormais étroitement selon un programme précis pour la préparation des budgets nationaux. Ce processus, connu sous le nom de Semestre européen, permet à l’UE de surveiller de près les pays. Toutes ces institutions ont leur mot à dire sur le sujet. D’abord, la CE fixe les priorités de l’UE pour l’année à venir. Le PE et le Conseil de l’UE en discutent ensuite et les approuvent. En début d’année, on examine pour chaque État membre : sa situation économique, ses programmes de réforme et ses déséquilibres éventuels. Le PE peut inviter les présidents d’autres institutions pour discuter de sujets liés au Semestre européen et réclamer un dialogue avec les États membres. À la réunion de printemps du Conseil de l’UE, les chefs d’État et gouvernement fixent les orientations économiques et fiscales. C’est alors aux États de les suivre dans un programme de réformes et un plan pour garantir des finances publiques saines. Les institutions examinent la situation économique et les politiques de chaque État et émettent des recommandations spécifiques par pays. Les États doivent alors suivre ces recommandations quand ils établissent leur budget national.

 

La crise souveraine ayant aussi, et surtout, révélé la nécessité d’un renforcement de la coordination budgétaire et de la surveillance économique des Etats membres, la mise en place d’un « Semestre européen » a été décidée.

Qu’est-ce que  le Semestre européen?

Ayant identifié l’échec de la stratégie de Lisbonne comme un échec de la réalisation nationale de ses objectifs, le Semestre européen a pour but d’exercer un contrôle, une surveillance sur l’avancée des réformes. Afin d’assurer une mise en œuvre efficace de la stratégie Europe 2020, une gouvernance renforcée a été mise en place, associant principalement la Commission européenne et les Etats membres (à titre national, ou réunis au sein du Conseil européen ou du Conseil de l’Union européenne) ; conformément aux attentes de la France, le Conseil européen a été doté d’un rôle central d’impulsion et de pilotage afin d’assurer une appropriation politique au plus haut niveau ; par rapport à la Stratégie de Lisbonne, le système de surveillance économique et budgétaire multilatéral, piloté par la Commission européenne, a été renforcé.

Ce système de coordination et de surveillance multilatérale des politiques économiques et budgétaires se déroule chaque année entre janvier et juillet, et est appelée « Semestre européen ». Il comporte différentes étapes :
– en janvier au plus tard, la Commission européenne publie son Analyse annuelle de la croissance, qui contient à la fois un bilan des progrès déjà marqués et une partie prospective portant sur les volets budgétaire, macroéconomique et structurel de la surveillance ;
– ce document constitue la principale base de discussion au niveau ministériel au sein des Conseils compétents, à savoir les Conseils ECOFIN (responsable des aspects économiques et financiers) et EPSCO (responsable des aspects sociaux : formation, éducation, protection sociale) au mois de février. Dans le même temps, le Parlement européen débat également de l’Analyse annuelle de croissance et peut adopter une résolution présentant sa propre évaluation ;
– sur le fondement de ces discussions, les chefs d’Etat et de gouvernement, lors du Conseil européen de printemps (mars),évaluent les progrès réalisés aux niveaux de l’UE et des États membres sur la voie des cinq grands objectifs de l’UE et dans le cadre des initiatives phares, et fournissent des orientations politiques horizontales – au niveau communautaire et national – en matière budgétaire et macro-économique, ainsi qu’en matière de réformes structurelles dans les secteurs porteurs de croissance, et fait des suggestions sur la façon d’articuler ces trois aspects ;
– en avril, les Etats membres présentent à la Commission européenne :

i) leurs programmes de stabilité (pays de la zone euro) ou de convergence (pays hors zone euro) au titre du volet préventif du Pacte de stabilité et de croissance. Dans le contexte du renforcement des procédures de surveillance par les pairs, ces documents visent à assurer une discipline budgétaire plus rigoureuse et à présenter la stratégie budgétaire des Etats membres à moyen terme, afin de garantir la viabilité de leurs finances publiques.

ii) leurs programmes nationaux de réforme, qui constituent l’instrument clef de la stratégie Europe2020 à l’échelon national, et présentent les réformes qu’ils entendent mener à bien dans les domaines contribuant à la croissance, tels que le marché du travail, la RD, l’éducation, etc., en accord avec les objectifs définis au niveau communautaires. 
– en mai, la Commission procède à l’examen de ces programmes puis, en fonction de cette évaluation, elle présente aux Etats membres des recommandations spécifiques par pays
– en juin, ces recommandations font l’objet de discussions au niveau des Ministres (Conseils ECOFIN et EPSCO) et peuvent éventuellement être modifiées, avant d’être approuvées par le Conseil européen puis formellement adoptées par le Conseil.

L’adoption formelle par le Conseil fin juin ou début juillet des recommandations spécifiques par pays marque la fin du « semestre européen » et le lancement du « semestre national », qui est celui de la mise en œuvre par chaque Etat membre de ces recommandations, qu’il s’agisse de mesures budgétaires ou politiques.

L’objectif du semestre européen est de renforcer la coordination et la surveillance à un stade où les décisions budgétaires nationales importantes sont encore au stade de leur élaboration. Ainsi, les Etats membres doivent tenir compte des recommandations qui leur sont faites par le Conseil à travers les réformes qu’ils engagent et dans le cadre de l’adoption de leur budget national pour l’année suivante.

Quels sont les principaux résultats de la stratégie Europe 2020?

Alors qu’il reste encore trois ans pour atteindre ses objectifs fixés en 2010, il est d’ores et déjà peu vraisemblable que la stratégie 2020 soit couronnée de succès.

Sa mise en œuvre a été affectée par des faiblesses en termes de sensibilisation, d’implication et d’application.

Il convient tout d’abord de relever une profonde lacune dans la sensibilisation des citoyens européens à la stratégie, à l’élaboration de laquelle ils n’ont pas été associés, ne serait-ce que lors de la campagne des élections européennes, centrée sur des enjeux nationaux. Les objectifs de la stratégie ne sont pas connus et il peut même être difficile de trouver des informations à leur sujet dans les langues nationales. Les initiatives phares de la Commission manquent de visibilité. Peu sensibilisés, les citoyens européens sont aussi peu impliqués et n’expriment pas d’attentes particulières à cet égard à leurs représentants et gouvernements nationaux. Dès lors ces derniers ne manifestent pas d’ambitions significatives en faveur de l’atteinte des objectifs de l’Union européenne. La stratégie Europe 2020 demeure avant tout une affaire entre hauts fonctionnaires européens et hauts fonctionnaires nationaux et seuls les mécanismes de plus en plus contraignant du semestre européen ont un réel impact sur le déploiement de la stratégie au sein des différents Etats membres.

Les résultats d’ores et déjà obtenus sont peu prometteurs. Si l’Union européenne est en bonne voie pour atteindre ou se rapprocher des objectifs en matière d’éducation, de climat et d’énergie, elle se trouve très loin d’atteindre les objectifs en matière d’emploi, de recherche et développement et de réduction de la pauvreté. La crise économique a amplifié les divergences entre les États membres, divergences dont le Brexit est le point d’orgue. L’Union européenne semble entrer dans une phase de déconstruction. La stratégie Europe 2020 s’est révélée impuissante à la juguler, sans même considérer l’éventuelle (et souhaitable) convergence des politiques économiques des différents Etats membres.  L’harmonisation fiscale, pourtant une « nécessité absolue » selon les mots de Jean-Claude Juncker, le président de la Commission européenne, se heurte frontalement à la concurrence fiscale entre les États membres. Elle est sans doute la principale faille dans la construction de l’UE et l’obstacle majeur à la convergence des systèmes. Mais la Commission a bien du mal à faire avancer ce dossier. La règle de l’unanimité du Conseil, où siègent les Vingt-Huit, qui fait foi en matière de fiscalité (assortie de la consultation du Parlement et du Comité économique et social), limite les possibilités de trouver un accord dans ce domaine.

Le seul succès notable de la stratégie Europe 2020 est la mise en place du « semestre européen ». Mais ce succès est à double tranchant: en imposant aux Etats membres non seulement un renforcement de la coordination budgétaire et de la surveillance économique mais aussi, et surtout, la mise en oeuvre de réformes structurelles contraires aux attentes des citoyens – en France, la réforme territoriale et la loi travail – sans rechercher au préalable un consensus sur l’opportunité de leur mise en oeuvre, il a plutôt éloigné les citoyens de la construction européenne.

Triste constat pour une stratégie qui se voulait intelligente, durable et inclusive.

Pour en savoir davantage:


La reprise économique de la zone euro demeure fragile

La reprise économique dans la zone euro se poursuit, mais demeure fragile. Des progrès significatifs ont été enregistrés ces dernières années: depuis 2015, le PIB de la zone euro a retrouvé son niveau d’avant la crise en termes réels et le chômage a reculé à son niveau le plus bas depuis 2010-11.

Selon les prévisions d’automne de la Commission, le PIB réel devrait croître de 1,7 % en 2016 et maintenir une dynamique largement similaire au cours de la période 2017-2018. Bien que ces perspectives soient conformes à la moyenne des économies industrialisées, les héritages persistants de la crise, conjugués à l’incertitude accrue à la suite du référendum britannique et des défis structurels, laissent la zone euro vulnérable aux chocs. La poursuite de l’expansion de la zone euro repose fortement sur la demande intérieure.

Une approche coordonnée des politiques macroéconomiques et des réformes structurelles doit prévaloir. La zone euro fait face au défi d’une reprise économique lente et fragile avec peu de marge d’action en termes de politique monétaire ou budgétaire. La croissance de la demande globale reste faible et l’inflation est bien en deçà de la cible, malgré des taux de politique monétaire peu élevés. Il y a un risque que les mesures standard du cycle sous-estiment le niveau de relâchement dans l’économie. Une action efficace pour briser ce cercle vicieux peut être offerte par une action coordonnée afin de mobiliser des ressources pour les investissements publics et privés et soutenir la reprise. Dans le cadre de l’accord global au sein du G20, les États membres de la zone euro sont invités à utiliser tous les instruments politiques – monétaires, budgétaires et structurels – individuellement et collectivement pour remédier aux séquelles de la crise financière et renforcer la croissance, l’investissement et la stabilité financière. La Banque centrale européenne (BCE) utilise largement ses outils de politique monétaire en recourant à une série de mesures non conventionnelles. Cependant, la politique monétaire ne peut pas supporter l’ensemble du fardeau de la reprise, et elle ne peut pas non plus traiter des questions propres à chaque pays.

En mars 2016, la BCE a abaissé son taux directeur à zéro. Cette mesure est tout à fait inhabituelle mais, depuis la crise de 2008, les difficultés sont telles dans de nombreux pays, notamment dans la zone euro, que de nouvelles mesures devaient être prises. Ainsi les banques centrales, notamment la Réserve fédérale américaine et la BCE, ont adopté des politiques monétaires non conventionnelles consistant à abreuver les systèmes financiers de liquidités.

Dans le même temps, les politiques budgétaires sont contraintes dans plusieurs États membres par un héritage de dettes élevées et de consolidation inachevée. La divergence entre les États membres reste prononcée. Afin d’assurer une contribution efficace de la politique budgétaire au policy-mix de la zone euro, il faut accorder plus d’attention à l’orientation globale de la politique budgétaire, à sa composition et à sa mise en œuvre dans différents États membres. Parallèlement, il est nécessaire de concevoir et de mettre en œuvre une stratégie d’ensemble, à l’échelle de la zone euro, pour faire face aux risques pour la viabilité du secteur bancaire. Il est également nécessaire de procéder à une nouvelle vague de réformes structurelles ambitieuses – favoriser la productivité et la croissance, assurer l’équité sociale et faciliter l’ajustement économique nécessaire au sein de la zone euro, réduisant ainsi le fardeau des politiques monétaire et budgétaire.

Les principaux défis à surmonter sont les suivants:

  • Libérer la croissance potentielle, lutter contre le chômage élevé et augmenter la résilience. Les réformes structurelles qui créent des institutions nationales et des structures économiques plus fortes et plus efficaces, à l’appui de la productivité, de l’emploi et de la convergence, jouent un rôle clé dans le bon fonctionnement de l’UEM. La mise en œuvre de réformes structurelles libérerait des opportunités, augmenterait le potentiel de croissance et soutiendrait la politique monétaire en facilitant sa transmission à l’économie. Les priorités de ces réformes consistent à assurer un environnement institutionnel et un climat des affaires plus propices, à achever le marché unique, à éliminer les obstacles et à créer des opportunités d’investissement. Des politiques du marché du travail bien conçues, bien intégrées à des systèmes de protection sociale adéquats pour faciliter les transitions harmonieuses des emplois, peuvent favoriser la réintégration du marché du travail et promouvoir l’équité sociale. La réduction des impôts sur le travail peut favoriser la création d’emplois. Les États membres qui ont mis en œuvre de telles réformes sont plus résistants avec une amélioration de l’emploi et des performances sociales.
  • Faire face aux surendettements publics et privés et aux faiblesses des investissements. Certains États membres, notamment ceux qui sont le plus durement touchés par la crise, trouvent leur capacité de soutenir une demande limitée par de grands désendettements publics et / ou privés et des niveaux élevés de créances douteuses, alors que les investissements restent affaiblis. Ces États membres doivent stimuler l’investissement par la poursuite de réformes plus favorables à la croissance, y compris la suppression des obstacles à la concurrence et à l’investissement et par la définition de politiques à moyen terme dans un certain nombre de secteurs pour assurer la sécurité des investisseurs. Dans le même temps, ils doivent assurer un désendettement ordonné dans le secteur privé grâce à l’élimination ou à l’annulation de dettes privées non viables, afin que les capitaux puissent réaffecter plus rapidement et efficacement.
  • Assurer le rééquilibrage externe et interne de la balance des paiements courants de la zone euro. L’excédent de la balance des paiements courants de la zone euro est alimenté par des effets positifs sur les échanges résultant de la chute des prix du pétrole et des baisses récentes de la valeur extérieure de l’euro, mais résulte largement de la faiblesse de la demande intérieure et d’un excès d’épargne par rapport aux investissements. Si, dans certains États membres, des déficits externes antérieurs ont été corrigés, de grands excédents continuent à s’accumuler dans les États membres sans des besoins significatifs de désendettement. Les États membres déficitaires ou dotés d’un important stock de dette extérieure auraient intérêt à accroître leur productivité et leur compétitivité pour soutenir le désendettement de la dette accumulée et pour assurer l’amélioration continue des positions courantes. Les États membres excédentaires, surtout lorsqu’ils jouissent déjà d’une forte position extérieure nette, doivent encore procéder à un ajustement supplémentaire pour renforcer la demande intérieure, notamment en encourageant davantage les investissements et en favorisant une utilisation plus efficace d’une épargne excessive.
  • Assurer une orientation budgétaire appropriée pour l’ensemble de la zone euro. En tenant compte de l’orientation de la politique monétaire actuelle, il est nécessaire que la politique budgétaire renforce la reprise économique et l’investissement pour assurer une combinaison cohérente des politiques économiques . Il est tout aussi essentiel que l’approche globale de la zone euro soit différenciée en fonction de la situation de chaque État membre en termes de durabilité et de stabilisation (au regard, notamment, du respect des exigences du pacte de stabilité et de croissance) tout en tenant compte des retombées au sein de tous les États membres de la zone euro.
  • Amélioration de la composition et de la gouvernance des finances publiques. Une utilisation plus active des revues des dépenses, des structures fiscales plus efficaces et plus efficientes et des administrations efficaces des dépenses et des recettes sont essentielles pour la zone euro où des politiques budgétaires saines, justes et favorables à la croissance sont d’intérêt commun. De même, des cadres fiscaux nationaux efficaces sont nécessaires pour renforcer la crédibilité des politiques des États membres. Des efforts restent nécessaires pour améliorer la composition des dépenses publiques et des recettes afin de maximiser leur impact sur la croissance, tout en réduisant la charge pesant sur le secteur privé.

Une utilisation plus active des revue des dépenses est particulièrement pertinente pour la zone euro où des politiques budgétaires saines sont une question d’intérêt commun. Les revue des dépenses sont largement reconnus comme un outil utile pour améliorer la qualité des finances publiques; Elles peuvent être utilisées pour réaliser des économies et favoriser la qualité des services publics. Un certain nombre de facteurs semblent particulièrement importants pour que les revue de dépenses puissent donner les meilleurs résultats: (i) un engagement politique soutenu à un niveau national élevé tout au long du projet ; (ii) une conception et une mise en œuvre fondées sur les meilleures pratiques, y compris un mandat stratégique clair ; (iii) des progrès et des résultats régulièrement suivis et communiqués au public ; Et (iv) la cohérence avec la planification budgétaire annuelle et pluriannuelle.

  • Briser la « corrélation entre risque bancaire et risque souverain » [1] et compléter l’Union des marchés financiers (CMU). Alors que la résilience globale du secteur bancaire de la zone euro a augmenté depuis la crise, la pression sur les banques a monté en raison d’un certain nombre de facteurs, tels que des niveaux élevés de prêts improductifs, des modèles commerciaux insuffisants et la surcapacité dans certains États membres, ceci engendrant une faible rentabilité et des risques de viabilité. Le recours relativement élevé aux banques pour financer l’économie de la zone euro la rend plus vulnérable en temps de crise et peut aggraver une crise économique. En outre, les procédures d’insolvabilité ne permettent pas de maximiser les perspectives de recouvrement d’avoirs, de retarder la restructuration de la dette et d’entraver la volonté des prêteurs de fournir des financements aux entreprises, de réduire le crédit à l’économie et aux investissements. Les initiatives les plus importantes de la CMU sont celles qui permettront d’élargir les sources de financement et de renforcer le rôle des marchés des capitaux (actions et obligations). En outre, la mise en œuvre rapide d’outils pour traiter la dette héritée et le niveau élevé de créances douteuses est nécessaire.
  • Achever l’union bancaire. Il reste à mettre en place un système de garantie des dépôts bancaires (SEGD) à l’échelle de la zone euro (EDIS selon l’acronyme anglais) et un dispositif de blocage commun pour le Fonds de résolution unique. Outre les
    Sources : BCE, Bulletin, août 2012 ; Blommestein (2012b).

    Principaux liens entre les conditions macroéconomiques, le secteur bancaire et le marché de la dette publique (les flèches indiquent les canaux par lesquels des modifications de conditions dans l’un des domaines affectent les deux autres).

    autres mesures de réduction des risques dans le secteur bancaire proposées par la Commission en novembre, le SEGD renforcerait la stabilité financière, affaiblirait le lien entre les banques et les finances publiques des États membres et renforcerait la confiance des déposants. L’assouplissement budgétaire commun pour le Fonds de résolution unique soutiendrait la crédibilité de la résolution face aux grands chocs en veillant à ce qu’un financement adéquat soit crédible pour résoudre les banques les plus affectées de la manière la plus efficace possible.

  • Compléter l’architecture de l’Union économique et monétaire européenne. Au cours de l’année écoulée, des progrès ont été accomplis vis à vis des initiatives présentées dans le rapport des cinq présidents [2] sur l’achèvement de l’UEM en Europe, comme le rôle accru de la dimension de la zone euro dans le semestre européen, la recommandation sur les conseils nationaux de productivité et l’établissement du Conseil Fiscal Européen au sein de la Commission. Des travaux sont également en cours pour améliorer la transparence et réduire la complexité des règles budgétaires. Néanmoins, l’accord sur d’autres initiatives d’une importance cruciale pour l’UEM, comme le système de garantie des dépôts bancaires proposé par la Commission en novembre 2015, fait toujours défaut. De plus, des défis plus vastes doivent être relevés à la lumière du rapport des cinq présidents. La Commission a annoncé son intention de présenter en mars 2017 un Livre blanc sur l’avenir de l’Europe, qui comprendra également l’avenir de l’UEM. S’accorder sur une voie opérationnelle exige un sens partagé d’appropriation et un sens commun entre tous les États membres et les institutions de l’UE de la zone euro, ainsi qu’entre les États membres non membres de la zone euro, car une UEM forte aidera à relever les défis de l’UE, et aura également un impact positif sur les États membres non membres de la zone euro.

 

[1] La crise de la zone euro illustre comment la « corrélation entre risque bancaire et risque souverain » se compose de deux boucles de rétroaction distinctes, mais qui se renforcent mutuellement: une «boucle de sauvetage» et une «boucle de l’économie réelle». Premièrement, la détérioration de la solvabilité souveraine a réduit la valeur marchande  des avoirs de dette souveraine nationale détenus par les banques. Cela a réduit leur solvabilité perçue, ce qui a augmenté les chances que les banques doivent être renflouées par leur gouvernement, et ainsi augmenter encore la détresse souveraine, engendrant une « boucle de sauvetage ». Deuxièmement, lorsque les banques en difficulté ont réduit leurs prêts, elles ont déclenché une baisse de l’activité économique et des recettes fiscales, ce qui a également contribué à affaiblir la solvabilité des gouvernements dans ces pays, déclenchant une « boucle de l’économie réelle ».

Il y a trois ingrédients à ces boucles de rétroaction. Tout d’abord, le biais résidentiel des portefeuilles de la dette souveraine des banques, qui fait dépendre leurs capitaux propres et leur solvabilité des fluctuations de la solvabilité et de la valeur de marché de la dette de leur propre gouvernement. Deuxièmement, l’incapacité des gouvernements à s’engager ex-ante à ne pas renflouer les banques nationales, puisque le sauvetage est optimal une fois que les banques sont en difficulté. Troisièmement, la libre mobilité des capitaux, qui garantit que les perceptions des investisseurs internationaux sur la solvabilité future de l’État – que les fondamentaux fiscaux justifient ou non – sont incorporées dans la valeur marchande de la dette publique intérieure. Pour briser ces boucles, la politique doit supprimer au moins un de ces trois ingrédients. Jusqu’à présent, le contrôle des capitaux est le seul remède politique adopté en réponse à ces boucles de rétroaction.

[2] Ce rapport a été préparé par le président de la Commission européenne, en étroite coopération avec le président du sommet de la zone euro, le président de l’Eurogroupe, le président de la Banque centrale européenne et le président du Parlement européen.

 

Pour en savoir davantage (en anglais) :

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L’Agence française anticorruption se substitue au Service central de prévention de la corruption

 

La loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique, dite Sapin II, tend à poursuivre la démarche entreprise par la loi du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques (loi Sapin I). Elle s’appuie aussi sur les conclusions du rapport de Jean-Louis Nadal, président de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP).

Pour lutter contre la corruption, la loi crée une Agence française anticorruption qui se substitue au Service central de prévention de la corruption (SCPC). Le volet anticorruption de la loi Sapin II (en particulier la création de l’Agence) est la réponse, non à une demande de l’opinion publique française, mais  à la pression des Etats-Unis, le gouvernement français ayant tiré les conséquences des amendes colossales infligées ces dernières années par les autorités américaines à certains de nos fleurons industriels (TECHNIP, ALCATEL-LUCENT, TOTAL et ALSTOM GRID et ALSTOM POWER), qui s’étaient rendus coupables de corruption d’agents publics étrangers (et dont trois, TECHNIP, ALSTOM GRID et ALSTOM POWER sont peu après ou concomitamment passés sous contrôle étranger). Il y a tout lieu de penser que les Etats-Unis, dont c’est l’intérêt géo-stratégique, s’attacheront à vérifier, à travers le mécanisme d’examen par les pairs prévu par la Convention anticorruption de l’OCDE du 17 décembre 1997,  si le volet anti-corruption transnational de la loi Sapin II est effectivement mis en œuvre.

En plus de missions de conseil, l’agence contrôlera donc la mise en oeuvre par une société de ses obligations de vigilance en matière de prévention de la corruption. En cas de manquement, elle pourra la sanctionner. Une obligation de vigilance sera instaurée pour les entreprises de plus de 500 salariés ayant un chiffre d’affaires supérieur à 100 millions d’euros. L’Agence contrôlera aussi la qualité et l’efficacité des procédures mises en oeuvre dans les administrations publiques.

Les décrets d’application de la loi Sapin II relatifs à l’agence sont en cours de rédaction. Le SCPC aura cessé d’exister dès la nomination officielle du directeur général de l’Agence, qui sera en principe le juge Charles Duchaîne. Pour l’instant, celui-ci attend toujours sa nomination officielle comme préfigurateur. Elle ne saurait tarder, le dossier devant être prochainement soumis au Conseil supérieur de la magistrature.  L’Agence devrait disposer des moyens annoncés publiquement par les ministres (70 agents) et qui seront des agents recrutés en sus de ceux transférés, pour certains d’entre eux,  du SCPC.

La loi Sapin II introduit également un nouveau dispositif transactionnel, la convention judiciaire d’intérêt public, qui permettra à l’autorité judiciaire de sanctionner pénalement les personnes morales mises en cause pour une atteinte à la probité.

Par ailleurs, la loi crée l’infraction de trafic d’influence d’agent public étranger qui sanctionnera le fait de payer un agent public étranger afin qu’il use de son influence pour obtenir une décision. La loi facilite également la poursuite de faits de corruption d’un agent étranger (des poursuites pourront être engagées à la suite d’une plainte avec constitution de partie civile par des associations comme Anticor ou Transparency International alors qu’aujourd’hui le parquet a le monopole des poursuites).

La loi vise à instaurer plus de transparence dans le processus d’élaboration des décisions publiques et dans la vie économique. Pour cela, elle prévoit la création d’un répertoire numérique sur les relations entre les représentants d’intérêts et les pouvoirs publics. Ce répertoire sera tenu par la HATVP et sera accessible à tous sur internet. Sont considérés comme des représentants d’intérêts (lobbies) les personnes morales de droit privé, les établissements publics ou groupements publics exerçant une activité industrielle et commerciale, les entreprises, dont un dirigeant, un employé ou un membre a pour activité principale ou régulière d’influer sur la décision publique, notamment sur le contenu d’une loi ou d’un acte réglementaire en entrant en communication avec les pouvoirs publics (membres du gouvernement ou des cabinets ministériels, parlementaires, collaborateurs du président de la République, etc.). Sont également des représentants d’intérêts les personnes physiques qui exercent à titre individuel une activité professionnelle répondant à ces conditions.

Les élus dans l’exercice de leur mandat, les partis politiques, les syndicats de salariés, les organisations patronales et les associations cultuelles ne sont pas considérés comme des lobbies.

L’inscription sur ce répertoire entraînera l’adhésion au respect de règles déontologiques dans les relations des lobbies avec les pouvoirs publics. Le manquement à ces règles pourra entraîner une mise en demeure et une amende pouvant aller jusqu’à 30 000 euros en cas de réitération.

La loi tend à mieux protéger les lanceurs d’alerte dans le domaine des atteintes à la probité. Un lanceur d’alerte est « une personne physique qui révèle ou signale, de manière désintéressée et de bonne foi, un crime ou un délit, une violation grave et manifeste d’un engagement international régulièrement ratifié ou approuvé par la France, d’un acte unilatéral d’une organisation internationale pris sur le fondement d’un tel engagement, de la loi ou du règlement, ou une menace ou un préjudice graves pour l’intérêt général, dont elle a eu personnellement connaissance ».

N’est pas pénalement responsable la personne qui porte atteinte à un secret protégé par la loi, dès lors que cette divulgation est nécessaire et proportionnée à la sauvegarde des intérêts en cause, qu’elle intervient dans le respect des procédures de signalement définies par la loi et que la personne répond aux critères de définition du lanceur d’alerte.

Les personnes physiques qui auront signalé, à l’Autorité des marchés financiers (AMF) ou à l’Autorité de contrôle prudentiel, des manquements aux obligations définies par le code monétaire et financier ne pourront faire l’objet, pour ce motif, d’un licenciement ou d’une sanction.

Troisième volet du texte, la modernisation de la vie économique passe par un renforcement de la régulation financière (redéfinition des abus de marché, pouvoirs répressifs de l’AMF accrus, encadrement du financement participatif ou crowdfunding, déclaration des produits dérivés). La loi prévoit également la création d’un régime français de résolution en assurance ainsi qu’une amélioration de la procédure de résolution des banques.

Pour soutenir l’activité économique, les sanctions contre les retards de paiement seront renforcées (plafond par amende porté à 2 millions d’euros, amendes cumulables). La loi prévoit la révision des niveaux de qualification exigés pour accéder à certaines professions indépendantes en fonction des risques que représentent ces activités pour la santé et la sécurité des consommateurs. Les effets de seuil seront lissés pour les micro-entreprises (pendant deux années après le franchissement d’un seuil, les micro-entrepreneurs pourront continuer à bénéficier du régime fiscal et social simplifié de la micro-entreprise). Le régime de la micro-entreprise sera ouvert aux EIRL qui respectent les limites de chiffre d’affaires des micro-entreprises. Enfin, la loi prévoit des simplifications dans la gestion d’entreprise.

Pour protéger les consommateurs, la loi interdit la publicité pour les sites de trading très spéculatifs.

Le projet de loi initial prévoyait de ramener la durée de validité du chèque d’un an à six mois. Cette mesure a été finalement supprimée. Un rapport du gouvernement doit d’abord étudier les enjeux liés à la monnaie fiduciaire à l’heure de la dématérialisation des moyens de paiement.

Par ailleurs, les épargnants modestes pourront être autorisés à débloquer leur plan d’épargne retraite complémentaire (PERP). Le livret de développement durable(LDD) comportera un volet dédié à l’économie sociale et solidaire.

Le Conseil constitutionnel a censuré les dispositions du texte qui instauraient un « reporting fiscal » pays par pays. Le Conseil a estimé que l’obligation faite à certaines sociétés de rendre publics des indicateurs économiques et fiscaux pays par pays est de nature à permettre d’identifier des éléments essentiels de leur stratégie industrielle et commerciale. Le Conseil a donc jugé que ces dispositions portaient une atteinte disproportionnée à la liberté d’entreprendre.

Pour en savoir davantage:

LOI n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique
Dossiers législatifs
Décision du Conseil constitutionnel du  n° 2016-741 DC du 8 décembre 2016

Source : vie-publique.fr.


Quelle stratégie des finances publiques pour 2017?

Le Gouvernement entend poursuivre l’effort de rétablissement des comptes publics entrepris au début du quinquennat afin de remettre les finances publiques sur une trajectoire soutenable. Il espère ainsi ramener le  déficit public sous le seuil des 3 % du PIB en 2017, conformément aux engagements pris dans la loi de programmation des finances publiques (LPFP) 2014- 2019, et la dette publique stabilisée après dix années de hausse continue. Par cette stratégie volontariste, il recherche des marges de manœuvre pour mettre en œuvre des réformes en faveur de la croissance et de la justice sociale et pour financer ses priorités que sont l’éducation, la jeunesse, l’emploi et la sécurité.

Mis en oeuvre avec constance depuis 2012, l’effort de rétablissement des comptes s’est traduit par l’amélioration notable du solde public entre 2012 et 2015. Le déficit se résorbe peu à peu, malgré un contexte macroéconomique difficile. Le solde public est ainsi passé de – 5,1% du PIB fin 2011 à – 3,5% en 2015 et le solde structurel a connu une amélioration cumulée de 2,5 points de PIB entre 2012 et 2015 ; le déficit structurel s’est établi à – 1,9% en 2015, atteignant son plus bas niveau depuis le début des années 2000. Cet effort de rétablissement des comptes publics se poursuit : le déficit public devrait s’établir à 3,3 % en 2016, et le Gouvernement souhaite le ramener à  2,7% en 2017.

Ces prévisions de réduction du déficit public reposent sur des prévisions de croissance de 1,5 % tant pour 2016 que pour 2017. Le Haut Conseil  des finances publiques estime toutefois, dans un avis adopté  le 24 septembre 2016, que ces prévisions de croissance gouvernementales  sont un peu élevées au regard des informations connues, compte tenu des facteurs baissiers qui se sont matérialisés au cours des derniers mois (atonie du commerce mondial, incertitudes liées au Brexit et au climat politique européen, conséquences des attentats, …). Elles sont supérieures à la plupart des autres prévisions disponibles.

Selon le Gouvernement, l’évolution des dépenses publiques serait de nature structurelle et donc peu sensible à l’évolution du produit intérieur brut (PIB).  Le solde structurel serait ramené de – 1,9 % du PIB en 2015 à – 1,1 % en 2017. L’objectif de moyen terme (OMT) d’équilibre structurel des finances publiques serait atteint en 2020. Depuis 2013, la remise en ordre des comptes publics s’appuie principalement sur la maîtrise de la dépense. Le taux de croissance de la dépense publique a ainsi atteint des niveaux historiquement bas : 0,8% en valeur et hors crédits d’impôt en 2015 après 1,0% en 2014. Sur cinq années, la dépense publique évoluerait en moyenne de +1,3% par an sur les années 2013-2017, contre une évolution moyenne de +3,6% entre 2002 et 2012. En 2016, le solde public se redresserait à – 3,3% du PIB. La réduction des déficits repose sur la maîtrise de la dépense publique, qui progresserait, en valeur et hors crédits d’impôt, au rythme modéré de 1,4%. Le taux de prélèvements obligatoires diminuerait en 2016 (44,5% après 44,7% en 2015) sous l’effet de la montée en charge des mesures du Pacte de responsabilité et de solidarité.

La priorité donnée à la maîtrise de la dépense publique s’est traduite par la mise en oeuvre des mesures d’économies, décidées dès le Programme de stabilité d’avril 2014, et confirmées et renforcées dans les lois financières ultérieures. Cet effort a été complété par des mesures complémentaires afin de pallier l’impact défavorable sur les finances publiques d’une inflation plus basse que prévu. Ces mesures ont été annoncées dans les Programmes de stabilité d’avril 2015 et d’avril 2016 pour des montants de 5 Md€ et 3,8 Md€ respectivement. Cet effort de maîtrise de la dépense permettra dans le même temps de financer les mesures prises en faveur du renforcement de la sécurité ou encore le Plan d’urgence pour l’emploi, sans renoncer à l’atteinte des objectifs de finances publiques et en préservant les conditions de la reprise de la croissance.

Au total, la contribution de la dépense à l’effort structurel atteindrait 0,5 point de PIB en 2016. Le ratio de dépense publique poursuivrait sa baisse pour atteindre 55,0% du PIB, après 55,5% du PIB en 2015. Les marges budgétaires dégagées par ces efforts sur la dépense permettent de baisser les prélèvements obligatoires pesant sur les entreprises et les ménages. La mise en oeuvre de la deuxième annuité du Pacte de responsabilité et de solidarité se traduit par une baisse du taux de prélèvements obligatoires, qui reculerait de nouveau en 2016, à 44,5% après 44,7% en 2015. Au total, au terme d’un ajustement nominal de 0,2 point, le déficit public serait ramené à 3,3% en 2016. Dans un contexte où la croissance de l’activité serait à son potentiel, cet ajustement résulterait d’un ajustement structurel de 0,3 point, compensé en partie par des mesures ponctuelles et temporaires (- 0,1 point).

La réduction des déficits est le résultat d’un effort partagé par l’ensemble des sous-secteurs des administrations publiques.

Ainsi, les dépenses de l’État hors dette et pensions ont été votées en loi de finances initiale pour 2016 en dessous du niveau prévu dans la LPFP 2014- 2019. Dans le même temps des économies sur la charge de la dette seraient à nouveau constatées, liées à l’environnement favorable de taux d’intérêt et à la crédibilité de la politique budgétaire. La dépense des opérateurs de l’État serait elle aussi maîtrisée, via notamment un ralentissement des décaissements au titre du programme d’investissements d’avenir.

Les collectivités locales participeraient également à l’effort de consolidation des comptes publics. La reprise de la dépense locale, attendue à ce stade du cycle électoral communal, serait en effet modérée. Des économies seraient en particulier réalisées sur les dépenses de fonctionnement, sous l’effet de la réduction des concours financiers de l’Etat de 3,3 Md€, et des marges de manœuvre dégagées par la mise en œuvre de la réforme territoriale. L’Objectif d’évolution de la dépense locale (ODEDEL), abaissé à 1,2% en LFI 2016, serait à nouveau respecté.

Enfin, sur le champ des dépenses sociales, l’Objectif national de dépenses d’assurance maladie (Ondam), voté à 185,2 Md€ en loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2016, soit une évolution de 1,8% par rapport à 2015, serait tenu comme anticipé par le comité d’alerte de l’Ondam dans son dernier avis du 27 mai 2016. Les autres dépenses de protection sociale seraient ralenties du fait de la montée en charge de réformes passées, mais aussi des économies supplémentaires annoncées dans le Programme de stabilité d’avril 2016.

La stratégie de rétablissement des comptes publics se poursuit dans les projets de lois financières pour 2017.

Selon le Gouvernement, le solde public atteindrait – 2,7% du PIB en 2017, conformément à la LPFP 2014-2019. La maîtrise de la dépense sera poursuivie en 2017, tout en assurant le financement des priorités que sont l’éducation, la jeunesse, l’emploi et la sécurité tel qu’annoncé lors du Débat d’orientation des finances publiques. Les projets de loi de finances et de financement de la sécurité sociale détaillent les mesures permettant de maîtriser l’évolution de la dépense publique et de financer intégralement les mesures décidées depuis le Programme de stabilité d’avril 2016. La dépense publique progresserait, en valeur et hors crédits d’impôt, de 1,6% en 2017. Cette progression serait légèrement plus rapide qu’en 2016 mais resterait maîtrisée à un niveau beaucoup plus faible que celui observé sur 2002- 2012. Cette légère accélération reflèterait le rehaussement des dépenses de l’Etat hors dette et pensions de 3,4 Md€ par rapport au niveau de la LFI 2016. Cette augmentation des dépenses a été annoncée au cours du Débat d’orientation des finances publiques. Elle est nécessaire pour financer les priorités que sont la sécurité et la justice, l’emploi et l’éducation.

S’agissant des collectivités locales, le rythme de baisse de leurs dotations a été adapté et atteindrait 2,8 Md€ en 2017 après 3,3 Md€ en 2016. L’ODEDEL est fixé à 2,0%, conformément à la LPFP 2014-2019.

S’agissant des dépenses d’assurance maladie, la progression de l’Ondam sera portée à 2,1%. Ainsi, 2015, 2016 et 2017 auront été les trois années avec les taux les plus bas depuis 1997. Le respect de cet objectif sera rendu possible par un effort de maîtrise des dépenses documenté dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2017.

Le ratio de dépense publique poursuivrait ainsi sa baisse pour atteindre 54,6% du PIB. Le Gouvernement poursuivra par ailleurs les réformes fiscales favorables à la reprise de la croissance et à la justice sociale. Ainsi, la baisse à 28% du taux d’impôt sur les sociétés sera enclenchée dès 2017 pour les petites et moyennes entreprises (PME), un allègement renforcé de cotisations sociales sera mis en place pour les artisans et une nouvelle baisse d’impôt sur le revenu sera mise en oeuvre, pour un montant de 1 Md€, portant à 6 Md€ les baisses ciblées de cet impôt depuis 2014. Sous l’effet de la montée en charge de la fiscalité énergétique et d’une composition de la croissance favorable aux recettes, le taux de prélèvements obligatoires se stabiliserait à 44,5% du PIB. Le solde nominal se redresserait de 0,6 point de PIB en 2017, à la faveur d’un ajustement structurel de 0,5 point de PIB. Cet ajustement structurel serait principalement la résultante d’un effort en dépense de 0,4 point de PIB. La dette publique serait stabilisée et commencerait à refluer légèrement. Cette évolution résulte des effets conjugués de la réduction des déficits et d’une reprise progressive de l’activité. Après 96,2% fin 2015, le ratio d’endettement atteindrait ainsi 96,1% du PIB fin 2016, puis 96,0% fin 2017.

Le Haut Conseil estime toutefois que les risques pesant sur les dépenses sont plus importants en 2017 que pour les années précédentes : les économies prévues sur l’Unédic apparaissent irréalistes, de fortes incertitudes pèsent sur la réalisation des économies de grande ampleur prévues sur l’ONDAM, des incertitudes pèsent également sur l’évolution des dépenses de l’État et des collectivités territoriales (compte tenu notamment des facteurs d’accélération de la masse salariale), enfin les recapitalisations annoncées des entreprises publiques du secteur énergétique peuvent avoir des  incidences sur le solde public. À ces risques s’ajoutent ceux portant sur les prévisions de recettes du fait des hypothèses économiques favorables retenues dans le PLF.

En conséquence, le Haut Conseil estime improbables les réductions des déficits prévues par le PLF pour 2017 (de -1,6 point du PIB à -1,1 point pour le solde structurel, de -3,3 points à -2,7 points pour le solde nominal). Sur la base des informations dont il dispose, il considère comme incertain le retour en 2017 du déficit nominal sous le seuil de trois points du PIB.

Pour en savoir davantage:

Projet de plan budgétaire 2017

Avis du  Haut Conseil  des finances publiques