Le SJFu reçu au cabinet du ministre de la Justice

Thomas Andrieu, directeur de cabinet du ministre de la Justice et Anthony Duplan, conseiller libertés publiques, droit public et juridictions administratives au cabinet du ministre ont reçu Vincent Sivré, président du syndicat des juridictions financières unifié le 8 juillet 2016. L’ordre du jour de la rencontre portait essentiellement sur les modalités de la représentation de notre corps au sein du Conseil supérieur des chambres régionales et territoriales des comptes (CRTC).

En préambule, Thomas Andrieu a rappelé que le ministère de la Justice ne disposait d’aucune prérogative sur les modalités de gestion des magistrats financiers. Il a toutefois précisé que notre statut de « magistrat » ne laissait pas le ministère de la Justice indifférent.

Vincent Sivré a présenté le corps des magistrats de CRTC (effectifs, modalités de recrutement, mode de représentation au sein du Conseil supérieur) puis l’organisation syndicale (représentativité, nombre d’adhérents, principaux thèmes de revendication). Thomas Andrieu s’étant montré très intéressé sur l’unicité de la représentation syndicale, le processus de regroupement des deux organisations – SYMAC et SJF – en 2013 et son impact – celui du SJFu – lui a été exposé.

Vincent Sivré a également décrit les enjeux, les objectifs et les modalités de mise en œuvre de la réforme des juridictions financières en 2012-2013 et en 2015-2016, y compris en ce qui concerne le développement des formations inter-juridictions. A la demande de Thomas Andrieu, il a précisé que le siège des CRTC ne correspondait pas à celui des chefs lieux de région dans quatre cas : Noisiel (Paris), Arras (Lille), Metz (Strasbourg) et Montpellier (Toulouse) en en précisant les raisons.

De façon concomitante à cette réforme, à la demande des parlementaires, des initiatives nationales mais aussi locales ont contribué à renforcer homogénéité des travaux des chambres régionales et territoriales des comptes par l’adoption de normes professionnelles communes et, surtout, d’outils d’analyse partagés en matière d’analyse financière et d’analyse de la masse salariale des collectivités territoriales et des établissements publics locaux. Les concepts (par exemple des soldes intermédiaires de gestion) et les méthodes utilisées sont désormais identiques d’une CRTC à l’autre.

Thomas Andrieu

Les revendications du syndicat visant à améliorer la représentation du corps au sein du Conseil supérieur ont ensuite été présentées. Vincent Sivré a indiqué que le corps des magistrats de CRTC ne supportait pas la subordination dans lequel il était placé vis-à-vis du corps des magistrats de la Cour des comptes alors que, fondamentalement, les uns et les autres effectuent les mêmes activités professionnelles, de plus en plus souvent de façon conjointe.

Thomas Andrieu a demandé de préciser si ce constat relevait d’une remise en cause du principe d’indépendance des magistrats ou d’une analyse sociologique.

Vincent Sivré a répondu que cette appréciation reposait à la fois sur un constat de nature sociologique et sur celui d’entorses au principe d’indépendance.

Les pesanteurs sociologiques liés aux modalités de gestion des sorties de l’ENA ont des effets pervers au sein des juridictions financières de même nature que ceux que l’on rencontre dans les autres administrations de l’Etat : Si l’on peut éventuellement comprendre que les classements annuels des élèves de cette école produisent encore des effets de carrière 15 ans après la fin de la scolarité, il est plus délicat de justifier qu’ils en produisent encore 30 ans après. Une même personne peut être brillante à 25 ans et ne plus l’être du tout à 45. Inversement, un élève moyen, au regard des critères de la scolarité – lesquels sont régulièrement contestés, y compris par les membres du jury -, peut révéler ses talents au contact renouvelé avec les réalités administratives.

Des entorses au principe d’indépendance sont trop souvent constatées lors de la nomination de collègues à des postes de responsabilité au sein des chambres régionales et territoriales des comptes. Le syndicat n’est pas toujours en mesure de s’assurer que les nomination sont décidées uniquement sur des critères de compétences professionnelles. D’autres éléments semblent être pris en considération sans que les membres élus du Conseil supérieur en soient informés. Thomas Andrieu s’est ainsi montré très surpris d’apprendre qu’une nomination d’un haut magistrat avait pu être prononcée au sein des juridictions financières en dépit d’un avis négatif du Conseil supérieur.

Thomas Andrieu a indiqué que la demande visant à porter de six à neuf le nombre de représentant du corps ne s’inscrit pas dans l’agenda du ministère de la justice d’ici les prochaines élections présidentielles. (Chacune des deux formations du Conseil Supérieur de la Magistrature (CSM), du siège et du parquet, comptent actuellement six représentants et il n’est pas envisagé de modifier cette composition d’ici le printemps 2017).

En revanche, il a souligné que notre revendication visant à renforcer les prérogatives du Conseil supérieur des CRTC en matière de recrutement des magistrats entrait en résonance avec les préoccupations actuelles de ce ministère. Cela pourrait ainsi conduire à remplacer un avis simple par un avis conforme pour le nomination de magistrats y compris, bien sûr, de hauts magistrats, présidents et vice présidents de CRTC.

Thomas Andrieu a demandé où en étaient les juridictions financières dans le processus de préparation de l’ordonnance prévue par la loi Déontologie, droits et obligations des fonctionnaires.

Vincent Sivré a indiqué que la consultation du Conseil supérieur avait eu lieu la veille. Elle avait été préparée en amont par un processus de concertation satisfaisant ayant offert la possibilité au syndicat de formuler ses propositions. Il a ensuite présenté succinctement les propositions du syndicat qui ont été retenues (recommandation, distinction FIJ 1 et FIJ 2, extension de l’entretien préalable aux organismes non publics) et celles qui n’avaient pas été retenues (administrations publiques, concession) ; le régime des incompatibilités des magistrats de CRTC étant rapproché de celui des magistrats administratifs.

Vincent Sivré a précisé à Thomas Andrieu que la loi d’habilitation était plus restrictive en ce qui concerne les juridictions financières que pour les juridictions administratives puisqu’elle prévoit que la composition et les attributions du Conseil supérieur des tribunaux administratifs peuvent être adaptées alors que ce n’est pas le cas en ce qui concerne les CRTC. Le projet d’ordonnance présenté au Conseil supérieur des tribunaux administratifs vise d’ailleurs à rapprocher les compositions et attributions de ce dernier de celles du Conseil supérieur des CRTC. Vincent Sivré a rappelé à cet égard que les compositions et attributions du Conseil supérieur des CRTC n’étaient pas satisfaisantes et qu’il fallait être plus ambitieux pour asseoir définitivement l’indépendance de ces deux Conseils supérieurs.

La rencontre s’est close sur le constat partagé que les deux institutions auraient tout intérêt à renforcer les mobilités croisées des magistrats judiciaires et financiers. Vincent Sivré a souligné que des magistrats de CRTC avaient réalisé des mobilités intéressantes à la direction de la protection judiciaire de la jeunesse, au service centrale de prévention de la corruption, à l’agence pour l’immobilier de la justice et sur des postes de vice-procureurs judiciaires. Il a estimé que les parcours croisés des procureurs financiers et des procureurs judiciaires permettraient de renforcer la coopération des deux institutions en matière pénale. Il a regretté qu’il y avait peu de mobilités de magistrats judiciaires vers les juridictions financières. Thomas Andrieu a estimé que de telles mobilités permettraient de renforcer les compétences administratives des magistrats judiciaires et seraient à ce titre bienvenues.


L’état de la France en 2016

 

Le 14 juin 2016, le Conseil économique, social et environnemental (CESE) a adopté un rapport sur l’état de la France en 2016. Si la situation économique se stabilise, le CESE constate que la seule analyse de l’évolution du PIB ne permet pas d’établir un diagnostic pertinent de l’état de la société française. L’étude s’appuie donc sur les dix « nouveaux indicateurs de richesse », retenus par le Gouvernement dans son rapport du 27 octobre 2015, qui répondent à trois enjeux majeurs : la cohésion sociale (i), la préparation de l’avenir (ii) et la qualité de vie (iii). (i) Les indicateurs relatifs à la cohésion sociale révèlent que les inégalités de revenus se réduisent depuis 2013, la France détenant l’un des systèmes redistributifs les plus importants en Europe. Le nombre de personnes se déclarant en situation de pauvreté évolue peu tandis que le taux d’emploi, qui se stabilise pour les 15-64 ans (64,3% en 2014), se dégrade légèrement pour les 15-24 ans (28,3%). Ces résultats, dans la moyenne européenne et plutôt stables, témoignent toutefois du sentiment de perte de cohésion au sein de la société. (ii) Les indicateurs liés à la préparation à l’avenir sont également peu encourageants : l’effort de recherche est insuffisant, avec un taux de 2.26 % du PIB en 2014 -en deçà de l’objectif de 3% de la stratégie de Lisbonne-, le poids de la dette publique française reste supérieur à la moyenne européenne tandis que l’endettement privé diminue, reflétant les difficultés pour les ménages et les entreprises à investir. Le bilan environnemental fait apparaître une légère amélioration concernant l’empreinte carbone mais d’une augmentation de l’artificialisation des sols (9,3% du territoire métropolitain) susceptible de nuire à la biodiversité. (iii) Enfin s’agissant de la qualité de vie, l’espérance de vie en bonne santé se maintient à 63,8 ans mais l’indicateur, plus subjectif, de satisfaction dans la vie situe la France en dessous de la moyenne européenne. Il ressort de ce rapport un pessimisme et une défiance d’une partie de la population française envers l’action publique. Le CESE recommande de réduire le chômage de masse grâce à des politiques publiques adaptées aux personnes les plus exposées ; de lutter contre l’accroissement des inégalités en agissant au plan national, européen et mondial contre le dumping social et fiscal ; d’intensifier l’effort de recherche pour atteindre 3 % du PIB, dans les secteurs public et privé ; de soutenir les stratégies d’investissement en préservant la capacité d’investissement des entreprises, en améliorant l’accès des PME aux financements bancaires et en fléchant l’épargne des ménages vers des investissements de long terme.

 


Des aides d’Etat enfin transparentes

 

Depuis le 1er juillet 2016, les Etats membres doivent se conformer, en matière d’octroi des aides, à deux obligations de transparence prévues par les différents règlements et lignes directrices de l’Union européenne relatifs aux aides d’Etat. D’une part, ils doivent publier, sur un site internet national, gratuit et public, des informations relatives aux régimes d’aides et les aides individuelles informées (celles dispensées de notification dès lors qu’elles relèvent d’un règlement d’exemption). Un recensement effectué en ce sens sous l’égide du Secrétariat général aux affaires européennes et du Commissariat général à l’égalité des territoires, a conduit à la publication d’un tableau comprenant les informations requises sur le site Europe-en-France. D’autre part, les Etats membres doivent publier, sur le site dédié de la Commission européenne Transparency Award Module (TAM), les informations relatives aux aides octroyées pour un montant de plus de 500 000 euros en précisant l’identité du bénéficiaire, le montant et l’ objectif de l’aide ainsi que sa base juridique. Les Etats membres doivent se conformer à cette seconde obligation, qui ne s’applique que pour les aides octroyées après le 1er juillet 2016, dans un délai de 6 mois à compter de l’octroi de l’aide ou d’un an à compter de la date à laquelle a été déposée la déclaration fiscale pour les aides sous forme d’avantages fiscaux. Le respect de ces deux obligations de transparence constitue un critère de compatibilité des aides d’Etat. La transparence s’étend également aux aides fiscales, des règles spécifiques garantissant le respect de la confidentialité en matière fiscale.


Les clubs parlementaires sur la sellette


Le 23 juin 2016, la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) a remis au président de l’Assemblée nationale un rapport sur les « clubs parlementaires » instances, souvent informelles, qui permettent la rencontre de membres du Parlement et de représentants d’intérêts afin de sensibiliser les parlementaires à une problématique dans un domaine déterminé. Recensant une quarantaine de clubs dans des domaines très divers (audiovisuel, agroalimentaire, transport…), le rapport relève que ces structures sont créées à l’initiative du secteur privé, ne bénéficient d’aucune existence officielle au Parlement et que le qualificatif de « parlementaire » peut être source de confusion. Il souligne le caractère hétérogène de ces structures et les lacunes de leur encadrement. La HATVP suggère notamment de transformer les registres existants dans les assemblées en un registre des représentants d’intérêts obligatoire et commun au Gouvernement et au Parlement ; d’établir des obligations déontologiques pour tout représentant d’intérêts inscrit au registre qui pourraient ne plus autoriser les représentants d’intérêts à utiliser le terme de « parlementaire » pour qualifier les structures qu’ils créent ou ni faire usage du logo des assemblées et du titre de parlementaire dans leurs manifestations et leur documentation ; de créer une obligation, pour les représentants inscrits au registre, de rendre compte de leurs activités de lobbying impliquant des parlementaires. La Haute autorité propose d’indiquer que les fonctions de président, vice-président, co-président et trésorier, ainsi que toute autre fonction dirigeante au sein d’un club parlementaire doivent figurer sur la déclaration d’intérêts et d’activités en application de l’article L.O. 135-1 du code électoral et que les parlementaires sont tenus de déclarer tous les avantages et les invitations provenant de représentants d’intérêts reçus dans le cadre de leurs fonctions d’une valeur supérieure à 150 euros. Enfin, elle recommande d’interdire la réunion de groupes d’intérêts privés, et notamment des « clubs parlementaires », dans l’enceinte du Parlement et la domiciliation, dans les assemblées, de ces clubs.

Pour en savoir davantage: 

Lire le rapport « Les clubs parlementaire » ;

Lire l’article sur Public Sénat.


Des nouvelles mesures pour la protection des magistrats

Jean-Jacques URVOAS, garde des Sceaux, ministre de la Justice, a reçu ce mardi 28 juin 2016, un rapport relatif à la protection des magistrats remis par le directeur des Affaires Criminelles et des Grâces, la directrice des Services Judiciaires, ainsi que la directrice des Affaires Civiles et du Sceau de la Chancellerie.

Suite au constat d’une multiplication des menaces physiques pesantnotamment sur les magistrats spécialisés et le développement de stratégies de défense judiciaires ayant pour objet principal la déstabilisation des magistrats par le biais de dénigrements médiatiques, la direction des Affaires criminelles et des Grâces, la direction des Services judiciaires et la direction des Affaires civiles et du Sceau avaient été chargées, dès 2014, par la ministre de la Justice Christiane Taubira, de mener une réflexion conjointe sur les moyens d’améliorer la prise en charge des magistrats victimes de tels comportements ou pratiques.

Ce travail en commun a permis de faire émerger 12 propositions permettant d’améliorer la réponse apportée par le ministère de la Justice aux magistrats victimes et de renforcer l’accompagnement dont ils peuvent bénéficier au niveau local.

Le garde des Sceaux tient à ce que la mise en œuvre de ces propositions soit effective dans les meilleurs délais, afin que soient rappelés, notamment :

  • le soutien professionnel et hiérarchique apporté aux magistrats victimes,
  • les dispositions concernant la protection statutaire,
  • les mesures de protection rapprochée,
  • les actions de communication pouvant être menées en réponse à la mise en cause publique d’un magistrat.

Consultez l’intégralité des propositions dans le rapport ici.


L’accompagnement vers et dans l’emploi : Le Conseil d’orientation pour l’emploi est passé à coté du sujet

Le Conseil d’orientation pour l’emploi a adopté un rapport sur l’accompagnement vers et dans l’emploi. Alors que l’offre d’accompagnement des actifs, en emploi ou non, est abondante et diverse, le Conseil a voulu répondre aux questions suivantes :

  • quelle est la nature et l’intensité des besoins d’accompagnement ?
  • quelles sont les bonnes pratiques pour favoriser le retour à l’emploi ou un meilleur positionnement sur le marché du travail ?
  • quelles orientations devraient être mises en œuvre pour renforcer la pertinence, la qualité et l’efficacité de l’accompagnement ?

Il a produit un document particulièrement riche où les différents intervenants sur le marché du travail, lecteurs avertis,  trouveront matière à réflexion. Pour autant, les auteurs du rapport n’ont pas suffisamment souligné la complexité institutionnelle du sujet: une personne en recherche d’insertion professionnelle est confrontée à différents organismes qui interviennent tous, à un titre ou à un autre, sur le marché du travail. L’Etat dispose de la compétence emploi, les régions, de la compétence formation professionnelle et les départements, de la compétence insertion. Si elle a des difficultés de santé, elle sera aussi confrontée aux organismes de sécurité sociale.

Non seulement cette personne en recherche d’insertion professionnelle ne dispose pas des connaissances, des réseaux relationnels, voire des moyens financiers pour bâtir son parcours d’insertion entre ces différentes institutions, mais même les « accompagnants » qui relèvent de l’une ou de l’autre de ces administrations publiques ne maîtrisent pas toujours cette complexité organisationnelle.

Les missions et le rôle dévolus aux missions locales, de statut associatif mais de financement exclusivement public,  sont ils de simplifier la mise en relation entre ces institutions et les opérateurs du service public de l’emploi où répondent-ils avant tout à des finalités socio-politiques? Leurs intervenants ont ils les aptitudes professionnelles en rapport avec leurs missions et leur rôle?

La réponse à ces préoccupations passe notamment par la simplification de ces structures d’intervention sur le marché du travail, par exemple en conférant les compétences emploi, formation professionnelle et insertion au même niveau institutionnel, la région. Sans évolution structurelle de cette nature, les propositions du COE, en soit intéressantes, ne seront que de peu d’effet. La conclusion de conventions de partenariat entre ces structures n’est pas un pis aller: elles renforcent la complexité de l’ensemble sans nécessaire faciliter les échanges d’information.

Les discussions au sein du Conseil se sont tenues sur la base d’un important programme d’auditions de spécialistes de l’accompagnement et de chercheurs, français et étrangers, ainsi que sur une revue des évaluations, françaises et internationales, de dispositifs d’accompagnement. Il est regrettable qu’aucun représentant du MEDEF, de la CGPME, de l’ANDRH n’ait été entendu. Leurs contributions à ce débat auraient sans doute été utiles.

Voici les principales contributions de ce rapport:

Accompagner, pourquoi ?

Accompagner signifie « être avec », « aller vers ». C’est guider, appuyer, soutenir, aider. « Il ne s’agit pas d’imposer une façon d’agir aux personnes accompagnées, mais plutôt de leur donner, de manière personnalisée, appui et conseils dans la construction et la gestion de leur parcours. Et cela, compte tenu de leurs aspirations, de leurs compétences et de la situation et des perspectives du marché du travail pertinent pour elles » explique Marie-Claire Carrère-Gée, présidente du Conseil.

Dans son rapport, le Conseil éclaire le besoin d’accompagnement au regard des mutations actuelles du marché du travail, marqué par des transitions de plus en plus nombreuses, des passages plus fréquents entre emploi et chômage mais aussi entre différents statuts d’emploi, et l’accélération du renouvellement des besoins en compétences. L’évolution des aspirations des actifs va dans le même sens : ils souhaitent, dans une proportion significative, changer d’emploi, selon les cas pour augmenter leurs revenus, trouver un emploi plus intéressant ou une situation plus stable. Cela implique une gestion proactive, la préparation de mobilités et donc une demande d’accompagnement. « Et cela même si toute le monde n’a pas besoin d’être accompagné ni a fortiori être accompagné tout le temps », précise Marie-Claire Carrère-Gée.

L’efficacité à l’épreuve de l’évaluation

L’accompagnement a pour objectifs de permettre aux personnes de rechercher et d’avoir un emploi – le meilleur emploi -, plus rapidement et plus efficacement, et de mieux se positionner sur le marché du travail. Au niveau global, on peut théoriquement en attendre un meilleur appariement et donc un marché du travail qui fonctionne mieux, avec des conséquences positives sur la croissance et la productivité ; l’accompagnement peut aussi avoir pour effet de redistribuer les opportunités d’accès à l’emploi, avec de possibles conséquences négatives pour celles et ceux qui ne sont pas ou qui sont moins accompagnés.

De nombreux travaux ont étudié l’efficacité des différents types d’accompagnement. Il apparaît d’abord que, « parmi les politiques actives du marché du travail, l’accompagnement constitue une méthode relativement peu coûteuse au regard des résultats obtenus », souligne Marie-Claire Carrère-Gée.

Les travaux d’évaluation disponibles montrent ainsi que :

  • les entretiens de suivi et d’accompagnement des demandeurs d’emploi ont un effet globalement positif sur le retour à l’emploi, plus mitigé pour les personnes vulnérables s’ils ne sont pas convenablement calibrés ;
  • les contrôles et sanctions peuvent avoir lorsqu’ils sont crédibles un effet positif sur le retour à l’emploi, avec cependant un effet potentiellement négatif sur la qualité de l’emploi retrouvé ;
  • les programmes d’accompagnement renforcé ciblés sont généralement efficaces sur le retour à l’emploi et la qualité des emplois, à condition d’être complets dans leur conception et intensifs dans leur mise en œuvre.

Parmi les paramètres dont dépend l’efficacité de l’accompagnement, on retiendra notamment :

  • l’intérêt d’un accompagnement précoce et régulier ;
  • une articulation souple et personnalisée des différentes modalités et prestations d’accompagnement;
  • la connaissance par le conseiller des entreprises du territoire ;
  • une démarche collaborative de la part des conseillers avec les demandeurs d’emploi accompagnés ;
  • la diffusion d’informations sur le marché du travail, notamment via les outils numériques, qui réduit les délais de retour à l’emploi.

Le paysage actuel de l’accompagnement

Le rapport montre que la notion d’accompagnement a d’abord été mobilisée dans le champ social. Elle s’est ensuite étendue à l’appui aux demandeurs d’emploi et vise désormais l’ensemble des actifs pour la gestion de leurs parcours professionnel. De là résultent une offre plurielle et des conceptions de l’accompagnement variées selon les acteurs.

« Le paysage des acteurs de l’accompagnement est dispersé, voire éclaté, explique Marie-Claire Carrère-Gée. C’est bien, parce que l’offre est riche et souvent spécialisée. Mais cela rend plus difficile de s’assurer de la bonne circulation de l’information, de la qualité de l’offre, et de l’accès effectif des personnes au service qui sera le meilleur pour eux au moment où ils en ont besoin. »

Les évolutions en cours

Le rapport du Conseil montre que la professionnalisation des accompagnants est relativement hétérogène. Il n’existe pas de « profil type » du professionnel de l’accompagnement. La professionnalisation progresse, mais elle n’est pas achevée. L’offre de formation spécialisée reste modeste, la place de la formation continue est prépondérante. La professionnalisation passe désormais aussi par l’appropriation des outils numériques et de nouvelles pratiques comme le travail collaboratif. Une tendance à la labellisation et à la certification des structures se dessine, dans le cadre de démarches « qualité ».

Par ailleurs, l’accompagnement tend à devenir plus personnalisé et cherche à intégrer les freins périphériques au retour à l’emploi. Des formes d’accompagnement adaptées aux besoins de certaines catégories de demandeurs d’emploi, les jeunes par exemple, se développent. Les pratiques d’externalisation évoluent. Des initiatives de la société civile contribuent à diversifier et à renouveler l’offre.

La dimension d’accompagnement dans l’emploi se renforce, qu’il s’agisse de consolider l’insertion des demandeurs d’emploi ou d’aider les personnes en emploi dans leur transition, dans une logique d’anticipation et de sécurisation. Le numérique bouleverse ce paysage déjà complexe. « L’irruption du numérique change la donne, tant pour le service public de l’emploi et les acteurs de l’accompagnement que pour les personnes en emploi, comme nous l’avions souligné dans notre rapport consacré à l’impact d’internet sur le marché du travail », souligne Marie-Claire Carrère-Gée.

Dix priorités

« Réduire fortement et durablement le chômage passe d’abord par une accélération du rythme de création d’emplois. Mais l’accompagnement peut avoir des effets positifs, tant pour le retour à l’emploi des personnes concernées que pour le fonctionnement global du marché du travail » observe Marie-Claire Carrère-Gée.

Le Conseil a identifié dix priorités constituant autant de lignes directrices pour s’assurer de la pertinence et de la qualité de l’accompagnement mis en œuvre pour la recherche d’emploi et la gestion des parcours professionnels :

• tous les actifs doivent être mieux sensibilisés aux enjeux liés à la gestion de leur parcours professionnel ;

• l’offre d’accompagnement doit s’adapter aux besoins et aux aspirations des personnes ;

• l’accompagnement doit se fonder sur une connaissance fine et renforcée du marché du travail et de ses perspectives d’évolution, ainsi que sur l’évaluation objective des compétences et aptitudes de la personne ;

• l’offre d’accompagnement doit être mieux connue et plus lisible ;

• les logiques d’accompagnement, encore largement fondées sur des approches par statut d’activité ou par prestation, doivent mieux prendre en compte la diversité des parcours et des aspirations des actifs ;

• la professionnalisation de la fonction d’accompagnement doit se poursuivre ;

• les conséquences de la transformation numérique doivent être mieux intégrées dans l’offre d’accompagnement ;

• les pratiques d’accompagnement doivent mieux prendre en compte les résultats des travaux d’évaluation scientifique et les retours d’expérience ;

• l’expérimentation sociale doit être encouragée ;

• la culture de l’évaluation et du suivi de la performance doit être généralisée.

Pour en savoir davantage:

– COE – Synthèse du rapport PDF – (249.9 ko)

Les conséquences économiques et budgétaires du BREXIT

La commission des finances du Sénat a examiné début juin un rapport d’information élaboré par M. Albéric de MONTGOLFIER, son rapporteur général, sur les conséquences économiques et budgétaires d’une éventuelle sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne.

Le rapport relève que des incertitudes demeurent sur les modalités de mise en oeuvre de la sortie du Royaume-Uni, à la suite du  référendum du 23 juin, l’article 50 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) précisant qu’un accord fixant les modalités de retrait doit être conclu en tenant compte du cadre des futurs relations de l’Etat sortant avec l’Union. En outre, il souligne que les effets engendrés par cette sortie sur l’économie britannique seront fonction de la nature de ces futures relations. Le rapport note cependant qu’une appartenance à l’Union présente des gains pour le PIB des Etats membres, notamment du fait de l’accès au marché unique, et que la sortie du Royaume-Uni aurait des incidences négatives sur son économie, citant notamment le rapport d’avril 2016 de l’OCDE sur les conséquences du Brexit qui estime, du fait du Brexit, une baisse du PIB du Royaume-Uni de 3,3% à l’horizon 2020. L’économie budgétaire devrait se rapprocher du montant de la contribution nette britannique (8,5 Md€ par an) au budget de l’UE dans l’hypothèse d’une substitution des fonds européen par des fonds nationaux. L’impact du Brexit sur les autres Etats membres, peu étudié à ce jour, dépend du scénario retenu (accord bilatéral, adhésion à l’espace économique européen ou isolement total) qui déterminera une contribution ou non du Royaume-Uni au budget de l’UE. En l’absence d’accord entre le Royaume Uni et l’UE, la contribution de l’Allemagne serait accrue de 2,8 Md€ (+ 10,8 %), celle de la France, de 1,2 Md€ (+ 5,6 %) et celle de l’Italie, d’environ 860 M€ (+ 5,3 %).


Géolocalisation des rapports d’observations définitives des chambres régionales des comptes

Les chambres régionales et territoriales des comptes (CRTC) examinent la gestion des collectivités publiques de leur ressort (collectivités territoriales et établissements publics). Elles peuvent également vérifier la gestion de leurs satellites de droit privé. Conformément au code des juridictions financières, l’examen de la gestion porte sur la régularité des actes de gestion, sur l’économie des moyens mis en œuvre et sur l’évaluation des résultats atteints par rapport aux objectifs fixés par l’assemblée ou l’organe délibérants. Les CRTC n’ont en aucun cas à apprécier l’opportunité des choix politiques des élus, mais elles se prononcent sur la fiabilité des comptes, l’équilibre financier des opérations et des gestions, la régularité et l’économie des moyens mis en œuvre et leur efficacité, c’est-à-dire la comparaison des moyens avec les résultats obtenus. Dans ce cadre, elles peuvent également être conduites à procéder à une évaluation des politiques publiques locales.

Les observations résultant de cet examen font l’objet de rapports d’observations provisoires puis définitives, qui sont portés à la connaissance des assemblées délibérantes et ensuite rendus publics. Les rapports définitifs sont notamment mis en ligne sur le site internet des juridictions financières, dès qu’ils deviennent communicables (voir www.ccomptes.fr).

Depuis 2005, la loi relative à la liberté d’accès aux documents administratifs et à la réutilisation des informations publiques, prévoit la possibilité de réutiliser les informations publiques à d’autres fins que celles pour lesquelles elles sont détenues ou élaborées. Les mégadonnées des juridictions financières sont toutefois tellement volumineuses qu’elles en deviennent difficiles à travailler avec des outils classiques de gestion de base de données ou de gestion de l’information. En conformité au principe général de réutilisation libre, facile et gratuite fixé par les circulaires du Premier ministre du 26 mai 2011 et du 13 septembre 2013 relatives à l’ouverture des données publiques, le site data.gouv promeut la réutilisation des données publiques ouvertes par le biais d’actions spécifiques.

Les rapports des chambres régionales des comptes se prêtent ainsi à maints traitements informatiques. La diversité des champs d’application est assez large. En réutilisant ces données publiques, tout le monde peut créer des applications, des services ou des visualisations de données interactives. Ces réutilisations permettent, par exemple, d’améliorer l’action d’un service public ou de résoudre un problème.

A titre d’exemple, les rapports d’observations définitives des chambres régionales des comptes peuvent être aisément géolocalisés, ce qui permet de mesurer la manière dont les juridictions financières identifient, analysent et alertent les citoyens sur les risques portés par les administrations publiques locales de leurs ressorts.

Pour en savoir davantage:

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Géolocalisation des rapports d’observations définitives des chambres régionales des comptes

 


La MEC souhaite un véritable pilotage de la fonction ressources humaines de l’État

La mission d’évaluation et de contrôle de la commission (MEC) des finances de l’Assemblée nationale analyse, dans son rapport sur la formation continue et la gestion des carrières dans la haute fonction publique de l’État (n° 3809), les procédures de recrutement, d’affectation et de mobilité des cadres supérieurs et dirigeants et se penche sur les procédures destinées à favoriser l’identification et la valorisation des hauts potentiels et sur les enseignements dispensés au début ou en cours de carrière.
Le rapport, qui formule 22 propositions, préconise de systématiser les pratiques du tutorat ou du mentorat et de développer les formations à la prise de poste. Il recommande également de coordonner les offres de formation continue entre l’ENA, l’Ecole Polytechnique et les autres organismes de formation, en confortant, pour les formations généralistes, le rôle central de l’ENA, à qui serait confiée l’élaboration d’un cycle de formation commun pour l’ensemble des hauts fonctionnaires de l’État. Il suggère aussi d’inciter fortement les cadres supérieurs au suivi de formations au management et de développer les bilans de compétence.
Soulignant la nécessité d’identifier et d’accompagner les hauts potentiels, la mission invite à organiser un parcours de carrière inspiré du modèle militaire. Elle propose ainsi la création d’une Ecole supérieure du management public accessible par concours ou examen professionnel huit à dix ans après la première affectation suivant la fin de la scolarité à l’ENA, qui se verrait confier ce rôle.
Afin de garantir l’attractivité des carrières, le rapport demande notamment de mieux encadrer les passages en cabinets ministériels, en portant à six ans la durée des services effectifs requis pour pouvoir les intégrer, de favoriser la mobilité et de développer les échanges entre employeurs public et privé.
La mission plaide en outre pour une gestion « véritablement interministérielle » de la haute fonction publique. Elle propose à cette fin de décloisonner la gestion des ressources humaines, en faisant dépendre le nombre de places ouvertes par corps et par ministère en sortie de l’ENA de critères objectifs et en poursuivant l’harmonisation des régimes indemnitaires et la politique de fusion des corps, et appelle à organiser un véritable pilotage de la fonction ressources humaines de l’État.


Le Conseil de l’Union européenne adresse cinq recommandations à la France

Dans le cadre du semestre européen 2016, le Conseil de l’Union européenne, adresse cinq recommandations à la France visant à lui permettre de contribuer à la réalisation des objectifs stratégiques à long terme de l’Union européenne en faveur de la croissance et de l’emploi. Si ces recommandations ne sont pas suivies, ou si la France s’engage dans une mauvaise direction, la Commission exercera les nouveaux pouvoirs que lui confère le traité de Lisbonne: elle peut adresser des avertissements politiques, voire, en dernier ressort, imposer des sanctions.

Le 17 juin, le Conseil « Affaires économiques et financières » a approuvé les recommandations par pays adressées à 27 États membres pour 2016. Il recommande notamment à la France de :

  1. assurer une correction durable du déficit excessif en 2017 au plus tard en prenant les mesures structurelles requises et en consacrant toutes les recettes exceptionnelles à la réduction du déficit et de la dette; préciser les réductions de dépenses prévues pour les années à venir et accentuer les efforts pour accroître le montant des économies générées par les revues de dépenses, y compris en ce qui concerne les dépenses des collectivités locales, d’ici la fin de l’année 2016; renforcer les évaluations indépendantes des politiques publiques afin de recenser des gains d’efficacité dans tous les sous-secteurs des administrations publiques;
  2.  veiller à ce que les réductions du coût du travail soient pérennisées et que les évolutions du salaire minimum soient compatibles avec la création d’emplois et la compétitivité; réformer le droit du travail pour inciter davantage les employeurs à embaucher en contrats à durée indéterminée;
  3.  renforcer les liens entre le secteur de l’éducation et le marché du travail, notamment par une réforme du système d’apprentissage et de la formation professionnelle qui mette l’accent sur les personnes peu qualifiées; d’ici la fin de l’année 2016, entreprendre une réforme du système d’assurance-chômage afin d’en rétablir la soutenabilité budgétaire et d’encourager davantage le retour au travail;
  4.  éliminer les obstacles à l’activité dans le secteur des services, en particulier dans les services aux entreprises et les professions réglementées; prendre des mesures pour simplifier les programmes publics d’innovation et en améliorer l’efficacité; d’ici la fin de l’année 2016, approfondir la réforme des critères de taille réglementaires qui freinent la croissance des entreprises et continuer à simplifier les règles administratives, fiscales et comptables applicables aux entreprises en poursuivant le programme de simplification;
  5. prendre des mesures visant à réduire les impôts sur la production et le taux nominal de l’impôt sur les sociétés, tout en élargissant la base d’imposition sur la consommation, notamment en ce qui concerne la TVA; supprimer les dépenses fiscales inefficaces, supprimer les impôts dont le rendement est nul ou faible et adopter la réforme concernant la retenue à la source de l’impôt sur le revenu des personnes physiques d’ici la fin de l’année 2016.

Ces cinq recommandations seront formellement adoptées par le Conseil de l’Union européenne le 12 juillet. Elles ont été établies à la suite d’une évaluation particulièrement sévère de sa politique économique. Dans le cadre du semestre européen, la Commission a en effet procédé à une analyse complète de la politique économique de la France, qu’elle a publiée dans son rapport 2016. Elle a également évalué le programme de stabilité et le programme national de réforme, ainsi que les suites données aux recommandations adressées à la France les années précédentes. Elle a tenu compte non seulement de leur bien-fondé dans l’optique d’une politique budgétaire et socio-économique soutenable en France, mais aussi de leur conformité avec les règles et les orientations de l’Union, eu égard à la nécessité de renforcer la gouvernance économique globale de l’Union par la contribution de cette dernière aux futures décisions nationales. Les recommandations figurant aux points 1) à 5) reflètent cette évaluation de la Commission, approuvée par le Conseil « Affaires économiques et financières ».

La France relève actuellement du volet correctif du pacte de stabilité et de croissance. Dans son programme de stabilité pour 2016, le gouvernement prévoit de corriger le déficit excessif en 2017, conformément à la recommandation du Conseil de l’Union européenne du 10 mars 2015. Le déficit nominal devrait continuer à diminuer pour atteindre 1,2 % du PIB en 2019. L’objectif budgétaire à moyen terme – un déficit structurel de 0,4 % du PIB – devrait être atteint d’ici à 2018. Selon le programme de stabilité, le ratio de la dette publique au PIB devrait culminer à 96,5 % du PIB en 2017, avant de décroître pour atteindre 93,3 % du PIB en 2019. Le Conseil de l’Union européenne estime que ce scénario macroéconomique qui sous-tend les projections budgétaires est globalement plausible. Toutefois, il considère que les mesures nécessaires pour atteindre les objectifs prévus en matière de déficit à partir de 2017 n’ont pas été suffisamment précisées. Sur la base des prévisions du printemps 2016 de la Commission, le déficit nominal devrait atteindre 3,4 % du PIB en 2016, conformément au déficit recommandé par le Conseil de l’Union européenne en 2015. En 2017, le déficit nominal devrait atteindre, à politiques constantes, 3,2 % du PIB, ce qui signifie que le déficit excessif risque de ne pas être corrigé dans le délai prescrit. L’effort budgétaire recommandé ne devrait pas être fourni en 2016 et 2017, la stratégie budgétaire de la France reposant principalement sur l’hypothèse d’une amélioration de la conjoncture et d’une persistance des taux bas, laquelle est hors du contrôle des autorités et comporte donc des risques de non-conformité.

Se fondant sur son évaluation du programme de stabilité et tenant compte des prévisions du printemps 2016 de la Commission, le Conseil de l’Union européenne estime que, bien qu’il soit actuellement prévu que la France atteigne son objectif en matière de déficit nominal en 2016, il existe un risque que notre pays ne respecte pas les dispositions du pacte de stabilité et de croissance. Par conséquent, le Conseil estime nécessaire que des mesures supplémentaires soient prises pour assurer une correction durable du déficit excessif d’ici à 2017.
Le ratio des dépenses publiques au PIB en France est l’un des plus élevés de l’Union et, en dépit d’une légère baisse en 2015, reste nettement supérieur à la moyenne de la zone euro. La France met actuellement en oeuvre un plan visant à réduire les dépenses publiques de 50 milliards d’euros par rapport à la croissance tendancielle entre 2015 et 2017 dans toutes les administrations publiques, mais le Conseil considère que cela ne permettra peut-être pas de réduire significativement les dépenses publiques. Selon cette instance de l’Union européenne, détailler les mesures sur lesquelles reposent ces réductions de dépenses, tout en veillant à ce que les mesures d’économies tiennent compte du taux d’inflation proche de zéro, contribuerait à renforcer l’efficacité de ce plan.

Une réduction supplémentaire du ratio des dépenses selon les plans définis reste difficile, eu égard aux faibles résultats du processus d’identification de larges domaines de réduction potentielle des dépenses et aux résultats jusqu’ici modestes des revues de dépenses. Dans le secteur du logement, la France dépense presque deux fois plus que ses pairs européens, sans que les résultats sur le marché de l’immobilier soient sensiblement meilleurs. Il serait possible de préserver la capacité d’investissement des collectivités locales en combinant la réduction prévue des dotations de l’État avec un renforcement du contrôle de leurs dépenses, et notamment une limitation de la croissance de leurs dépenses de fonctionnement. Les revues de dépenses pourraient constituer un outil adapté pour recenser les possibilités d’économies dans ce domaine. De plus, la réforme récente de l’administration locale est susceptible de renforcer l’efficacité du système sur le moyen à long terme.

Il n’est pas possible de réaliser d’importantes économies à court terme sans ralentir considérablement la croissance des dépenses de sécurité sociale, qui représentent plus de la moitié des dépenses publiques. Le système de retraite a gagné en soutenabilité en 2015 grâce à l’accord sur les régimes de retraite complémentaires mais il pourrait rester déficitaire sur le court à moyen terme, notamment dans des conditions macroéconomiques défavorables. De plus, les réformes des retraites menées précédemment ne devraient permettre de réduire le haut niveau actuel du ratio des dépenses publiques de retraite qu’après 2025. La France s’est fixé des objectifs ambitieux pour 2016 et 2017 afin de limiter la croissance des dépenses de santé. Ces objectifs pourraient être complétés par des efforts supplémentaires visant à identifier des gains d’efficacité sur le moyen à long terme.

Des mesures ont été prises pour réduire le coût du travail et améliorer les marges bénéficiaires des entreprises, par le biais du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi de 20 milliards d’euros et de l’allègement des cotisations patronales de 10 milliards d’euros supplémentaires en vertu du pacte de responsabilité et de solidarité. Selon le Conseil de l’Union européenne, la manière dont ont été conçues ces mesures, qui représentent 1,5 % du PIB et contribuent à combler l’écart de coût du travail entre la France et la moyenne de la zone euro, pourrait limiter leur efficacité. Il est prévu que ces mesures d’économies fassent l’objet d’évaluations dont les résultats appuieront la prise de décision sur leurs caractéristiques futures, afin de faire en sorte qu’elles atteignent leurs objectifs en matière d’efficacité. Ces évaluations devraient s’intéresser tout particulièrement aux effets sur la formation des salaires et sur l’emploi.

Dans le contexte actuel de chômage élevé, le coût du travail au salaire minimum risque de freiner l’emploi des personnes peu qualifiées. Le salaire minimum est élevé par rapport au salaire médian, mais son coût a été réduit par des exonérations de cotisations sociales. Une augmentation du salaire minimum entraîne une augmentation de salaire pour la plupart des catégories de travailleurs et comporte le risque de compresser les salaires vers le haut. En raison du mécanisme de revalorisation du salaire minimum, les hausses du salaire moyen et l’évolution du salaire minimum sont étroitement corrélées, ce qui retarde l’ajustement des salaires nécessaire dans une situation économique défavorable.
Le Conseil de l’Union européenne estime que les réformes menées récemment n’ont donné aux employeurs que peu de possibilités pour déroger aux accords de branche. Cela concerne tous les aspects des conditions d’emploi, notamment les salaires, le temps de travail et les conditions d’emploi et de travail, et limite la capacité des entreprises à moduler leurs effectifs en fonction de leurs besoins. À l’heure actuelle, les branches professionnelles peuvent empêcher les entreprises de déterminer, au cas par cas et après négociations avec les partenaires sociaux, les conditions de dérogation aux accords de branche en matière de temps de travail. Les dérogations aux accords de branche et aux dispositions juridiques générales sur les conditions d’emploi, par l’intermédiaire d’accords d’entreprise, pourraient être facilitées, en concertation avec les partenaires sociaux.

En 2015, le taux de chômage a atteint 10,4 %. Le chômage touche particulièrement les jeunes, les ressortissants de pays tiers et les travailleurs peu qualifiés. La dualité du marché du travail ne cesse d’augmenter, avec d’un côté, les travailleurs diplômés de l’enseignement supérieur embauchés en contrats à durée indéterminée et de l’autre, une proportion constante de travailleurs occupant des emplois peu qualifiés de plus en plus précaires. La part des contrats à durée déterminée de moins d’un mois dans l’emploi total a progressé et avoisinait les 70 % en 2015. Selon le Conseil de l’Union européenne, le cadre juridique régissant les contrats de travail, en particulier la législation sur le licenciement des salariés titulaires d’un contrat à durée indéterminée, est susceptible de favoriser la forte segmentation du marché du travail. La dégradation persistante de la situation sur le marché du travail met à mal la soutenabilité du système d’assurance-chômage. Le déficit devrait atteindre, selon les projections de février 2016, 4,5 milliards d’euros en 2015, 4,2 milliards d’euros en 2016 et 3,6 milliards d’euros en 2017. La dette du système passerait alors de 25,8 milliards d’euros en 2015 à 30,0 milliards d’euros en 2016 et 33,6 milliards d’euros en 2017. Le calcul des allocations de chômage favorise l’enchaînement d’emplois à temps plein de courte durée, au détriment des emplois à mi-temps de longue durée, et incite les employeurs à proposer des emplois de courte durée, qui devront être complétés par le versement de prestations sociales. De plus, les caractéristiques du système d’assurance-chômage, en particulier les conditions d’éligibilité et la dégressivité des allocations de chômage, sont susceptibles de décourager le retour à l’emploi.
Le passage de l’école au monde du travail reste difficile, surtout pour les jeunes les moins qualifiés. Le recours à l’apprentissage diminue parmi les catégories les moins qualifiées, alors que les stratégies diffèrent d’une région à l’autre et que la capacité du système à s’adapter aux nouveaux besoins de l’économie est limitée. L’offre de formation pour les chômeurs, les travailleurs peu qualifiés et les salariés de PME demeure insuffisante. La réforme en cours de la formation professionnelle, notamment en ce qui concerne la gouvernance, les incitations et les services de conseil, et le nouveau plan de formation prévu pour les chômeurs doivent encore être pleinement mis en oeuvre et devraient être renforcés. La coopération insuffisante entre les différents acteurs de la formation professionnelle continue empêche toute répartition efficace des ressources. Le compte d’activité personnel, en préparation, pourrait contribuer à rééquilibrer l’accès à la formation.

La France continue de se classer à un niveau moyen pour ce qui est de l’environnement des entreprises, notamment en ce qui concerne les contraintes réglementaires, pour lesquelles elle est mal classée dans les comparaisons internationales. Le programme de simplification se poursuit comme prévu, mais sa mise en oeuvre est inégale, notamment pour ce qui est des mesures ciblant les entreprises, et des problèmes subsistent dans un certain nombre de domaines.
Par rapport à d’autres États membres, l’économie française se caractérise par un nombre disproportionné de petites entreprises, ce qui limite leur niveau de productivité. Les initiatives prises récemment pour atténuer l’impact des critères de taille ne devraient pas avoir d’incidence significative sur la croissance des entreprises, compte tenu notamment de leur champ d’application limité et du caractère temporaire de certaines mesures. En conséquence, les effets de seuil continueront de freiner la croissance des entreprises françaises.
La concurrence dans les services s’est améliorée dans certains secteurs, mais des obstacles subsistent dans d’autres secteurs, en particulier dans les services aux entreprises, dont une grande partie n’a en effet pas été concernée par les réformes récentes, et les industries de réseau. Un certain nombre de barrières à l’entrée et de réglementations, ainsi que des tarifs, brident l’activité économique des professions réglementées et pèsent sur la productivité d’autres secteurs qui font appel à ces services. L’adoption de la loi Macron en 2015 a permis de réduire certaines contraintes mais des efforts supplémentaires s’imposent. D’autres problèmes découlent de l’application restrictive des exigences en matière d’autorisation.
La France reste à la traîne des États membres champions de l’innovation dans l’Union, malgré la générosité de l’aide publique dans ce domaine. Ces quinze dernières années ont été marquées par une multiplication et une instabilité des dispositifs publics de soutien à l’innovation, ce qui suscite des craintes quant à la coordination, la cohérence et l’efficacité générales de ces dispositifs. Cette situation nuit tout particulièrement aux PME.

Le taux des prélèvements obligatoires est l’un des plus élevés de l’Union. Sa composition n’est pas propice à la croissance économique, dans la mesure où elle pèse lourdement sur les facteurs de production mais relativement peu sur la consommation. La fiscalité des entreprises a commencé à diminuer légèrement en 2014 et la France a commencé à se rapprocher de la moyenne de l’Union en matière de fiscalité environnementale, mais les recettes de TVA restent faibles, tant dans la part du PIB qu’en pourcentage de l’imposition totale, en raison des taux bas de cet impôt, de l’application généralisée des taux réduits et du nombre élevé d’exonérations par rapport à la moyenne de l’UE. Hormis la suppression progressive de la contribution sociale de solidarité des sociétés, actuellement en cours, et la suppression de l’impôt exceptionnel sur les sociétés, des mesures concrètes doivent être prises pour atteindre l’objectif annoncé d’une réduction à 28 % du taux nominal de l’impôt sur les sociétés d’ici à 2020.
Le système fiscal est très complexe. Le nombre de taxes inefficaces, dont le rendement est nul ou faible, reste élevé et l’imposition des revenus des personnes physiques est particulièrement complexe, ce qui a un coût administratif significatif. En dépit de l’introduction de l’obligation d’évaluer et de contrôler régulièrement les dépenses fiscales dans la loi de programmation des finances publiques 2014-2019, la réduction des dépenses fiscales prévue pour 2016 est modeste après plusieurs années d’augmentation.
Dans l’ensemble, les obstacles à l’investissement privé sont limités, les principaux étant la lourdeur de la réglementation et le niveau élevé de l’impôt sur les sociétés. Le climat de l’investissement aurait tout à gagner d’une amélioration de l’environnement des entreprises, d’une réduction des impôts sur la production et sur les sociétés et d’une simplification du système fiscal. Toutes les mesures prises pour améliorer la compétitivité-coûts et hors coûts des entreprises françaises sont susceptibles d’accroître les niveaux d’investissement et d’encourager les entreprises à investir dans le capital physique et humain, en vue d’améliorer la productivité. Le potentiel de croissance à long terme est également limité par l’atonie des investissements dans les activités d’innovation.

Pour en savoir davantage:
Recommandations du Conseil de l’Union européenne concernant le programme national de réforme de la France pour 2016 et portant avis du Conseil sur le programme de stabilité de la France pour 2016