Concertation sur le projet de charte de déontologie des juridictions financières

Le collège de déontologie propose une réécriture de la charte de  déontologie des juridictions financières. Ce document (cf. ci-dessous) sera l’objet d’une réunion de concertation sociale le mardi 13 juin, avant d’être présenté au Conseil supérieur prévu le juillet 2017. N’hésitez pas à formuler les observations qu’appelle de votre part ce texte dans la boite de dialogue ci-dessous.

 

 

 

 

 

Rapport de présentation de l’actualisation de la charte de déontologie

 

Introduction

 

Les juridictions financières se sont dotées en novembre 2006 d’une charte de déontologie et d’un collège de déontologie.

Par lettre du 18 décembre 2014, le Premier président a demandé au collège d’actualiser cette charte. Le collège a mené des travaux à cette fin jusqu’en septembre 2015 mais les a alors suspendus, en accord avec le Premier président, le Gouvernement ayant annoncé son intention de mener à bien la procédure parlementaire pour faire aboutir le projet de loi sur la déontologie, les droits et les obligations des fonctionnaires. Ce projet de loi avait été adopté par le conseil des ministres le 17 juillet 2013 mais l’examen par le Parlement avait été interrompu et n’avait repris qu’après l’adoption d’une lettre rectificative par le conseil des ministres le 17 juin 2015. L’Assemblée nationale a approuvé le texte en première lecture le 7 octobre 2015 et celle par le Sénat est intervenue le 27 janvier 2016.

Le texte définitivement adopté, la loi n°2016-483 du 20 avril 2016 relative à la déontologie, aux droits et aux droits et obligations des fonctionnaires, qui diffère sur de nombreux points du projet initial sur la base duquel le collège avait travaillé jusqu’en septembre 2015, consacre en son article L 120-7 l’existence d’une charte de déontologie, et dispose que le Premier président l’établit après avis du collège et du Procureur général.

 

En installant le collège dans sa nouvelle composition le 28 octobre 2016, le Premier président a confirmé sa saisine du 18 décembre 2014.

 

Le collège a, en conséquence, repris ses travaux, sans préjudice de l’avis qu’il aura à émettre conformément à la loi du 20 avril 2016. Il a pris en compte tant cette dernière loi que l’ordonnance n°2016-1360 du 13 octobre 2016 modifiant la partie législative du code des juridictions financières (CJF). Il a travaillé par anticipation sur les dispositions qui deviennent applicables aux juridictions financières le lendemain de la publication au Journal officiel du décret en Conseil d’Etat relatif à la partie réglementaire de ce même code, et au plus tard le 1er juillet 2017 (article 52 de l’ordonnance n° 2016-1360 précitée), publication qui devait intervenir le 30 avril 2017.

 

 

Présentation générale

 

La charte actuelle présente l’avantage de correspondre, dans son esprit comme dans sa forme, à ce que doit être une charte de déontologie.

 

Si elle peut, au premier abord, paraître très générale, elle a montré son utilité en permettant de traiter, par application des valeurs et principes qu’elle énonce, l’ensemble des questions, pourtant très diverses, qui ont pu se présenter depuis son adoption.

 

Elle est aujourd’hui bien acceptée par l’ensemble des personnels concernés et ne suscite de contestation ni sur les valeurs et principes qu’elle énonce ni sur leur formulation.

 

En revanche, il convient de l’adapter aux dispositions de la loi du 20 avril 2016 notamment en ce qui touche, au chapitre1er, à la déontologie et aux conflits d’intérêts. Le collège a intégré dans ses réflexions les concertations et travaux menés de 2010 à 2013 au sein des juridictions financières. Il a également pris en compte les normes professionnelles arrêtées par le Premier président dans son arrêté du 15 décembre 2014 en application de la loi n° 2011-1862 du 13 décembre 2011.

 

Les deux encadrés ci-dessous récapitulent les grandes caractéristiques de la charte de 2006 et de la loi du 20 avril 2016.

 

 

 

La charte de 2006

 

La charte actuelle est un document court, de quatre pages. Elle comporte un préambule qui rappelle le contexte dans lequel elle a été élaborée, sa nature et le rôle qui lui est assigné.

 

Elle est principalement tournée vers les magistrats, seuls mentionnés dans le préambule. Cependant, le passage relatif aux personnels concernés indique qu’elle s’adresse aussi aux conseillers maitres en service extraordinaire et aux experts à temps plein et que les autres personnels de contrôle sont guidés par le respect des règles déontologiques qu’elle énonce.

 

Elle énumère les principes généraux et les valeurs fondamentales (indépendance, impartialité, neutralité, intégrité) qui doivent guider les personnes concernées dans l’exercice de leurs missions. Une partie est consacrée aux conflits d’intérêts.

 

La charte évoque ensuite quelques grands principes devant guider le comportement des personnes concernées dans leurs relations professionnelles (discrétion et secret, comportement confraternel) ainsi que dans leurs activités extérieures, qu’elles soient accessoires ou liées à des fonctions occupées hors des juridictions financières.

 

Une dernière partie est consacrée au collège de déontologie (composition, rôle, modalités de saisine).

 

Des titres identifient chacune des parties, sans que celles-ci soient numérotées.

 

La charte a été diffusée par une lettre du Premier président.

 

 

 

La loi n°2016-483 du 20 avril 2016

 

Le chapitre 1er du titre I de la loi, en ce qu’il traite de la déontologie et de la prévention des conflits d’intérêts, modifie l’article 25 de la loi 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires. Cet article modifié précise que le fonctionnaire exerce ses fonctions avec dignité, impartialité, intégrité et probité ; il est tenu à l’obligation de neutralité et au principe de laïcité.

Le titre I de la loi comporte ensuite dans son chapitre IV une section 2 relative aux juridictions financières, avec des articles relatifs d’une part à la Cour (article 15) et d’autre part aux chambres régionales (article 16). Ces dispositions spécifiques ont été codifiées dans le code des juridictions financières.

 

Les personnels visés par l’article L. 120-6 (L. 120-7) modifié de ce code traitant de la charte de déontologie sont, d’une part, les magistrats de la Cour et des Chambres régionales et territoriales des comptes, et d’autre part les personnels de la Cour mentionnés aux sections 3 (2) et 4 (3) du chapitre II du titre 1er du livre 1er du code (soit les conseillers maîtres et référendaires en service extraordinaire et les rapporteurs extérieurs) ainsi que les rapporteurs auprès des CRTC.

 

Le champ d’application ainsi défini est plus restreint que celui de la charte actuelle.

 

La loi modifie la nature juridique de la charte qui sera « établie » par le Premier président. Elle modifie la composition du collège ainsi que les modalités de désignation de ses membres et elle élargit ses attributions.

 

Elle traite en des articles différents la Cour, les CRC et les CTC, bien que les dispositions soient très largement similaires.

 

Celles-ci portent pour l’essentiel sur le sujet des conflits d’intérêts dont elle donne une définition et pour la prévention desquels elle prévoit des procédures de déclaration des intérêts. La remise de cette déclaration donne lieu à un entretien déontologique.

 

La loi prévoit en outre des dispositions spécifiques pour les magistrats des CRTC qui ne peuvent se prévaloir de leur appartenance au corps des magistrats de CRTC à l’appui d’une activité politique et doivent s’abstenir de toute manifestation de nature politique. Ces obligations résultaient déjà pour les magistrats, les CMSE et les rapporteurs de la Cour de l’article L. 120-4 (L. 120-5) du code des juridictions financières.

 

Sur les autres points la loi renvoie à la charte qui sera établie par le Premier président. Elle ne précise pas la forme à utiliser par celui-ci, contrairement au projet de loi initial qui prévoyait un arrêté.

 

 

Après avoir examiné les principes qui devraient à son avis guider l’actualisation (I), le collège a examiné point par point les dispositions de la charte actuelle, dans l’ordre où elles y figurent et, d’une part, les compléments qu’il y a lieu d’y apporter pour tenir compte des nouveaux textes, d’autre part les améliorations susceptibles d’y être introduites (II). Pour chaque disposition ou groupe de dispositions, un encadré rappelle au préalable le texte actuellement en vigueur ; le collège expose ensuite son analyse puis précise les rédactions qui lui paraîtraient pouvoir être retenues. Ces rédactions sont récapitulées d’une part dans un texte consolidé et d’autre part dans un tableau mettant en regard la charte actuelle et ce que pourrait être la version ainsi modifiée.

 

  1. Les principes d’actualisation

 

Sept principes pourraient guider les modifications à apporter :

 

  1. Partir du document actuel et non rédiger une nouvelle charte, à la fois parce qu’une rédaction entièrement nouvelle ne s’impose pas et qu’il convient d’éviter de donner l’impression que les juridictions financières changent de principes déontologiques. Dans le même esprit, le collège a retenu le terme d’actualisation plutôt que celui de révision. La loi du 20 avril 2016 n’implique pas en elle-même de modifications de l’esprit de la charte.

 

  1. Conserver cet esprit, c’est-à-dire celui d’un document qui explicite ou dégage des valeurs, énonce des principes, ne se situe pas sur le même plan que les normes professionnelles et n’édicte pas un ensemble de règles assimilable à un code ou une sorte de règlement intérieur. Certes, la loi d’avril 2016 prévoit que la charte énonce à la fois des principes déontologiques et des bonnes pratiques. Certaines dispositions de la charte actuelle se situent déjà au niveau des bonnes pratiques et la charte pourrait être simplement complétée en ce sens sans viser à trop d’exhaustivité.

 

Ce choix éviterait un document trop long qui risquerait d’être moins lu. Il est essentiel à une bonne application de la charte que les nouveaux arrivants puissent la lire facilement et que les magistrats et autres personnels concernés puissent, au cours de leur carrière, s’y reporter aisément. Au demeurant, les avis du collège, qui figurent désormais sur le site intranet de la Cour, fournissent des analyses et exemples qui peuvent éviter d’alourdir la charte elle-même.

 

  1. Dans le même esprit, ne pas procéder, sauf exceptions limitées, à des rappels de textes, rappels qui au demeurant risqueraient d’être incomplets ou rapidement obsolètes.

 

  1. Être lisible et compréhensible pour des lecteurs extérieurs. La charte n’est pas seulement à usage interne et figure par exemple sur le site des juridictions financières. La rédaction doit permettre à ces lecteurs extérieurs de pouvoir, en la lisant, situer le rôle des juridictions financières ainsi que leurs spécificités et la place qu’y tient la déontologie.

 

Pour ces diverses raisons la solution retenue en 2006 apparaît la plus adaptée aux juridictions financières, par rapport notamment à celle choisie dans la charte de la juridiction administrative. Cette dernière présente, dans un document de 16 pages, les textes applicables, chaque principe déontologique puis en illustre l’application par des bonnes pratiques qui recouvrent à la fois les principes et des cas pratiques proprement dits. Le collège ne préconise pas non plus de s’inspirer du modèle de la juridiction judiciaire qui est celui d’un recueil des obligations déontologiques des magistrats, plus long (44 pages), qui vise à exposer les solutions à un nombre élevé de cas pratiques. Dans le cas de la magistrature judiciaire, le parti retenu peut s’expliquer par une plus grande variété des fonctions, des situations plus complexes et une exposition supérieure au risque.

 

  1. Dégager des valeurs qui puissent inspirer tous les membres des juridictions financières, comme un instrument de valorisation collective et individuelle.

 

  1. Dans cette même préoccupation, ne pas apparaître comme un carcan imposé et prescriptif mais comme un point de référence et d’appui pour la réflexion déontologique des personnels concernés. Ce parti conduit notamment à éviter dans la rédaction la répétition de verbes comme « doivent » (par exemple « les personnes concernées respectent » plutôt que « doivent respecter »).

 

  1. Éviter tout ce qui est circonstanciel ou trop lié à une technologie[1], de manière à dégager des principes ayant une valeur permanente, et utiliser des formulations susceptibles de demeurer suffisamment pérennes.

 

Par souci de ne pas donner à la charte l’apparence d’un code, le collège préconise au plan formel de ne pas retenir une présentation en chapitres et sections. Il paraît préférable de conserver la structuration en alinéas retenue en 2006, en y ajoutant une numérotation pour faciliter la lecture et la compréhension de l’articulation générale du document. Dans ce même but pourraient être intercalés quelques titres et intertitres marquant les principales parties de la charte. Le fait que celle-ci, aux termes de la loi du 20 avril 2016, soit « établie » par le Premier président est sans incidence sur la pertinence d’une telle présentation.

 

 

  1. Examen de la charte et propositions

 

II.1. Préambule

 

Texte actuel : « La volonté de doter les juridictions financières de règles de déontologie écrites n’est pas nouvelle : deux projets ont été élaborés au cours des années récentes à la Cour, d’abord en 1991, à la demande du Premier président, puis en 2002, sous l’égide de l’Association des magistrats. En 2005, la réflexion sur les orientations stratégiques des chambres régionales et territoriales des comptes a conduit un des groupes de travail à proposer un corpus de règles déontologiques.

La loi n° 2006-769 du 1er juillet 2006 portant dispositions statutaires applicables aux membres de la Cour a créé un Conseil supérieur de la Cour des comptes qui, en application de l’article L.112-8 du CJF, « est consulté par le Premier président… sur toute question déontologique, d’ordre général et individuel, relative à l’exercice des fonctions des magistrats, des conseillers maîtres en service extraordinaire et des rapporteurs extérieurs ». L’article L.212-16 dispose, quant à lui, que le Conseil supérieur des chambres régionales des comptes « est également consulté sur toute question relative à l’organisation, au fonctionnement ou à la compétence des chambres régionales ».

Il y a, en conséquence, lieu de préciser, pour l’ensemble des magistrats de la Cour et des chambres régionales et territoriales des comptes, ce que sont les valeurs et les principes qui doivent les guider dans leurs missions quotidiennes. Tel est l’objet de la charte de déontologie des juridictions financières.

Les dispositions de la présente charte seront complétées et éventuellement modifiées pour tenir compte des travaux du collège de déontologie dont il est fait état ci-dessous. »

 

 

 

Pour le collège, le préambule est un élément particulièrement important de la charte. Il permet d’éclairer les personnels concernés et les lecteurs extérieurs des finalités de la charte et de sa nature.

 

Le préambule actuel part du contexte de 2006, avec le souci de montrer que, si la charte était alors nouvelle, la déontologie était déjà de longue date une préoccupation des responsables de la Cour et de l’association des magistrats. Ce point de départ ne s’impose plus aujourd’hui.

 

En revanche, l’actualisation doit viser à montrer que la charte s’inscrit dans le rôle et les missions actuels des juridictions financières dans la dimension nouvelle découlant notamment de la révision constitutionnelle de 2008.

 

Les valeurs et principes à retenir découlent en effet largement de ce rôle et de ces missions et ceux-ci expliquent l’importance particulière que revêt la déontologie dans les juridictions financières.

 

Cette approche permettrait de donner au préambule tout son sens et de le situer à son véritable niveau, montrer les fondements de la déontologie et la mettre en perspective.

 

Le préambule doit aussi définir la nature et l’esprit de la charte. C’est ce que fait le troisième alinéa du texte actuel, qui affirme que le rôle de la charte est d’exprimer des valeurs et principes susceptibles de guider les magistrats. Pour les raisons précédemment évoquées (2ème principe d’actualisation), il est proposé de maintenir cette orientation et donc que la rédaction reste proche de celle de 2006.

 

L’actuel préambule, qui comporte 4 alinéas, pourrait ainsi être modifié et restructuré comme suit :

 

  1. Le premier alinéa pourrait rappeler la fonction générale des juridictions financières et le rôle de la Cour auprès du Gouvernement, du Parlement et de l’opinion publique tel qu’il a été reconnu et étendu notamment par la révision constitutionnelle de 2008.

 

Cet alinéa se substituerait à l’actuel 1er alinéa. Il répondrait aussi à la nécessité de situer, pour des lecteurs extérieurs, la place des juridictions financières, de manière à ce qu’ils perçoivent mieux ensuite l’importance et les spécificités de la déontologie dans ces juridictions.

 

  1. La nature juridictionnelle de la Cour et des chambres régionales et territoriales ainsi que le développement du rôle et des obligations internationales des juridictions financières pourrait justifier d’introduire un nouvel alinéa : il exprimerait que les missions des juridictions financières et leur rôle au plan national et international les conduisent également à respecter les obligations d’impartialité et d’indépendance résultant de la convention européenne des droits de l’Homme et des principes et valeurs énoncés dans le code de déontologie de l’organisation internationale des institutions supérieures de contrôle des finances publiques (INTOSAI).

 

  1. Ensuite viendrait un 3ème alinéa dans la ligne du 3ème alinéa du préambule actuel. Il serait consacré à la nature et à l’objet de la charte : dégager des valeurs et principes qui doivent inspirer le comportement au sein des juridictions financières.

 

  1. Suivrait alors un alinéa explicitant les valeurs et principes. La charte de 2006 affirmait les principes d’indépendance, impartialité, neutralité, intégrité et absence de conflits d’intérêts. La loi du 20 avril 2016, dans sa partie générale, ajoute, pour l’ensemble des fonctionnaires, la dignité, la probité et la laïcité. En revanche, concernant tous les types d’administrations, elle n’évoque pas le principe d’indépendance. Le collège propose de poser en premier, dans le 4ème alinéa du préambule de la charte, le principe d’indépendance qui est au cœur de la nature des juridictions et notamment des juridictions financières. Il reprendrait ensuite les principes énoncés dans la charte actuelle ou dans la loi de 2016. Cet alinéa reprendrait aussi une disposition en vigueur pour les magistrats de l’ordre judiciaire selon laquelle les valeurs et principes à appliquer sont destinés à prévenir tout « doute légitime » [2] de la part tant des contrôlés que de l’opinion publique, expression qui figure aussi dans la charte de la juridiction administrative.

 

Viendraient alors deux alinéas 5 et 6, également nouveaux, sur la place de la déontologie et le fondement particulier qu’elle trouve dans le serment :

 

  1. La déontologie est naturellement au cœur du fonctionnement des juridictions financières. Cet alinéa pourrait préciser que la nature spécifique des activités exercées par les membres de ces juridictions confère une importance particulière à ces valeurs et principes. Ce 5ème alinéa exprimerait ainsi l’idée que le respect des valeurs et principes est un élément essentiel de l’image et de la réputation des juridictions financières, et, comme tel, une condition de leur crédibilité et de la confiance qui leur est accordée. La notion de réputation n’est mentionnée actuellement par la charte que dans l’alinéa consacré à l’indépendance alors que ce critère s’est avéré déterminant dans nombre des avis rendus par le collège.

 

  1. Un 6ème alinéa mettrait en exergue l’importance du serment. Celui-ci n’est pas mentionné dans la rédaction actuelle du préambule, alors qu’il constitue un engagement déontologique fort auquel sont subordonnées l’installation des magistrats et, désormais, la prise de fonctions des diverses catégories de personnels ayant à connaître des contrôles diligentés (y compris agents du greffe et vérificateurs). Une telle mention est d’autant plus souhaitable que ces catégories se sont progressivement élargies.

 

La rédaction envisagée en 2013 [3]pourrait être reprise, moyennant de légères modifications.

 

  1. Un 7ème alinéa pourrait expliciter que la déontologie ne se confond pas avec la fonction disciplinaire et que les dispositions de la charte constituent des repères destinés à éclairer les magistrats et personnes concernées. Cet alinéa pourrait comporter un rappel qu’en contrepartie des prérogatives importantes dont ils disposent, les magistrats doivent agir dans le respect des valeurs et principes fondamentaux assurant la légitimité de leurs missions, dans l’esprit d’une rédaction qui existe dans le recueil des bonnes pratiques de la juridiction judiciaire.

 

  1. Un 8ème alinéa mentionnerait que les Conseils supérieurs de la Cour et des chambres régionales des comptes ont été consultés sur l’actualisation en application d’une part de l’article L. 112-8 (L. 120-14) du code des juridictions financières pour la Cour et, d’autre part, de l’article L. 220-13 pour les Chambres régionales des comptes. Il ne paraît pas utile de citer in extenso les articles du CJF comme le fait l’actuel alinéa 2 de la charte. Cette citation détaillée se justifiait en 2006 par la création toute récente du Conseil supérieur de la Cour. La consultation, au titre de ses compétences en matière d’organisation des juridictions financières, du comité technique institué auprès du Premier président par le décret 2011-184 du 15 février 2011 serait également à prévoir, d’autant qu’il est proposé plus loin que le collège de déontologie soit désigné pour être le « référent déontologue » prévu par la loi pour toutes catégories de personnels et à mentionner. Cette consultation devrait donc être mentionnée.

 

  1. La charte de 2006 comportait, en fin de préambule, un alinéa selon lequel les dispositions de la charte « seraient complétées et éventuellement modifiées pour tenir compte des travaux du collège de déontologie ». Dans un contexte où la déontologie résulte largement de textes législatifs et réglementaires, cet alinéa ne s’impose plus même si les travaux futurs du collège et ses recommandations[4] pourront contribuer à d’éventuelles évolutions de la charte. La possibilité de telles recommandations est suggérée infra dans les propositions concernant le collège de déontologie.

 

 

Proposition de rédaction

 

 

Préambule

 

1. Les juridictions financières exercent une fonction générale de contrôle de la bonne utilisation des fonds publics. La Constitution, les lois organiques et le code des juridictions financières confèrent à la Cour des comptes un rôle important dans le contrôle de l’exécution des lois de finances et de l’application des lois de financement de la sécurité sociale ainsi que dans l’évaluation des politiques publiques. Par leurs rapports la Cour et les chambres régionales et territoriales des comptes contribuent à l’information des citoyens.

 

 

2. Les missions des juridictions financières et leur rôle au plan national et international les conduisent à respecter les obligations d’impartialité et d’indépendance résultant tant des principes nationaux que de la convention européenne des droits de l’Homme et des principes et valeurs énoncés dans le code de déontologie de l’organisation internationale des institutions supérieures de contrôle des finances publiques (INTOSAI).

 

3. L’exigence déontologique, présente dès l’origine des juridictions financières notamment par l’obligation de prêter serment, s’est formalisée par une charte de déontologie qu’elles ont adoptée en 2006. La loi 2016-483 du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires consacre l’existence d’une telle charte précisant les valeurs et principes qui doivent inspirer les comportements au sein des juridictions financières. 

 

4. Ces valeurs et principes ont pour objectif de garantir que les magistrats et autres personnes concernées des juridictions financières exercent leurs fonctions en toute indépendance, avec impartialité, neutralité, dans le respect du principe de laïcité, avec dignité, intégrité et probité, et se comportent de façon à prévenir à cet égard tout doute légitime.

 

5. Le respect de ces valeurs et principes est un élément essentiel de l’image et de la réputation des juridictions financières et, comme tel, une condition de la crédibilité et de la confiance qui leur est accordée.

 

6. Pour les magistrats et les personnes citées à l’article 15 de la loi du 20 avril 2016 mais aussi pour les autres catégories de personnes qui doivent le prêter, le serment constitue un engagement personnel essentiel. Il fait appel à la responsabilité individuelle qui constitue le ressort le plus efficace pour assurer le respect de la déontologie. La plupart des engagements déontologiques sont résumés et contenus dans la formule du serment qui oblige à garder le secret des délibérations et à se comporter avec dignité et loyauté.

 

7. La déontologie ne se confond pas avec la fonction disciplinaire. Les dispositions de la présente charte constituent des repères destinés à procurer aux magistrats et autres personnes concernées une aide pour résoudre des questions d’ordre éthique auxquelles ils pourraient être confrontés dans l’exercice de leurs fonctions.

 

Elles ont également vocation à montrer aux autres institutions et au public que les magistrats et autres personnels des juridictions financières concernés, en contrepartie des prérogatives importantes dont ils disposent, agissent dans le respect de valeurs fondamentales garantissant la légitimité de leur action.

 

8. Les Conseils supérieurs de la Cour et des chambres régionales des comptes ont été consultés sur la présente charte, conformément au code des juridictions financières qui prévoient leur consultation sur toute question déontologique d’ordre général ou individuel. Le comité technique institué auprès du Premier président l’a été au titre de ses compétences en matière d’organisation des juridictions financières.

 

 

II.2. Personnels concernés

 

Texte actuel : « La présente charte de déontologie s’adresse à l’ensemble des magistrats de la Cour comme des chambres régionales des comptes, aux conseillers maîtres en service extraordinaire, ainsi qu’aux rapporteurs et aux experts recrutés à temps plein par la Cour, qu’ils exercent leur fonction à la Cour ou dans les chambres régionales et territoriales des comptes, tous rassemblés ici sous la dénomination « les personnes chargées de contrôle ».

Les personnes chargées de contrôle sont guidées par le respect des règles déontologiques énoncées dans la présente charte. »

 

 

La loi du 20 avril 2016 crée une situation nouvelle. Elle distingue en effet deux champs : Celui de la charte d’une part, plus restreint que celui couvert par la charte de 2006 ; celui des personnes qui peuvent saisir le collège de déontologie d’autre part. Il convient d’examiner en outre deux cas spécifiques : les magistrats honoraires et ceux en poste à l’extérieur.

II.2.1. Le champ d’application de la charte :

La loi d’avril 2016 restreint le champ d’application de la charte aux magistrats de la Cour des comptes et des chambres régionales et territoriales des comptes, et aux personnels de la Cour des comptes mentionnés aux sections 3 (2) et 4 (3) du chapitre II du titre Ier du CJF [les conseillers maîtres et référendaires en service extraordinaire et les rapporteurs extérieurs] et des rapporteurs auprès des chambres régionales des comptes mentionnés à l’article L. 212-5-1 (L. 212-7) » (nouvel article L. 120-6 (7)). Les experts qui concourent à l’évaluation des politiques publiques ne relèvent pas du champ de la charte proprement dit mais sont assujettis aux mêmes obligations (CJF article L112-7-2).

 

II.2.2. Les personnes à propos desquelles le collège peut être saisi :

 

  • Les vérificateurs et les greffiers n’entrent pas dans le champ de la charte défini par la loi. Les experts autres que ceux concourant à l’évaluation des politiques publiques  et les agents concourant à l’exercice de certification (dénommés experts en 2006) qui entraient dans le champ de la charte de 2006 n’y entrent plus désormais et la loi ne prévoit pas non plus qu’ils sont soumis aux mêmes obligations ». La restriction du champ de la charte ainsi défini par la loi contraste notamment avec l’extension de la prestation de serment aux vérificateurs désormais prévue par le code des juridictions financières et aux agents concourant à l’exercice de certification qui va prochainement y être introduite.

 

  • Dans les faits, le collège avait été saisi à deux reprises sur la situation des assistants (aujourd’hui « vérificateurs »). Dans un avis du 8 décembre 2014 concernant l’un d’entre eux, le collège a relevé que « les objectifs poursuivis par l’adoption de la charte ont valeur d’ensemble pour les juridictions financières » et que « l’activité d’un assistant peut affecter ou être susceptible de paraître affecter l’atteinte de ces objectifs », alors même qu’il s’agissait d’une activité à caractère professionnel que souhaitait exercer cet assistant à titre privé en plus de ses fonctions à la Cour. Le collège a constaté à cette occasion que « tout personnel de contrôle engage de fait l’image et la réputation des juridictions financières même si c’est de manière différente selon son grade ».

 

Pour leur part, les greffiers remplissent un rôle central dans le fonctionnement des chambres, ont connaissance de tous les rapports et suites, assistent aux séances et ont des contacts croissants avec l’extérieur, notamment pour organiser les auditions. Les agents contractuels concourant à l’exercice de certification jouent un rôle essentiel dans la qualité et l’image de cet exercice.

 

L’article L 120-9 du CJF tel que modifié par la loi du 20 avril qui définit les missions du collège de déontologie, dispose que celui-ci « rend des avis sur toute question déontologique concernant personnellement l’un des magistrats ou des personnels de la Cour des comptes ou des Chambres régionales ou territoriales de comptes ». L’expression « personnels de la Cour ou des chambres » pourrait dans une lecture restrictive, paraître renvoyer aux catégories visées par la loi pour la définition du champ de la charte. Cependant, le législateur n’a pas repris cette rédaction mais mentionné, sans cette restriction, les « personnels » de la Cour et des chambres régionales. Il faut donc considérer que, si ces personnels ne ressortissent pas du champ de la charte, ils entrent en revanche dans celui des personnes qui peuvent saisir le collège de leur situation ou sur lesquels le Premier président et les autres autorités habilitées à saisir le collège peuvent le consulter.

 

Cette solution assure au demeurant un meilleur recoupement entre les catégories de personnels assujettis à un serment et le champ de compétence du collège.

 

        II.2.3. L’arrêté du Premier président

 

L’arrêté du Premier président qui approuvera la charte, pourrait aussi, en se fondant notamment sur l’article 25 de la loi modifiée du 13 juillet 1983 qui confie à tout chef de service le soin de veiller à l’application des principes déontologiques,  prévoir que les vérificateurs, les greffiers, les experts autres que ceux concourant à l’évaluation des politiques publiques, les agents contractuels concourant à l’exercice de certification s’attachent (ou veillent) à respecter les valeurs et principes de la charte.

 

II.2.4. Les cas spécifiques

 

  • Pour les magistrats honoraires, la révision envisagée en 2013 retenait la rédaction suivante : « De même, les dispositions de la charte peuvent être appliquées aux magistrats honoraires, dans le cadre des fonctions qui peuvent leur être confiées au titre des juridictions financières ». Le principe ainsi posé et la formulation qui avait été proposée semblent appropriés : il serait en effet excessif que les magistrats honoraires qui remplissent des fonctions à l’extérieur au titre de la Cour soient soumis à la charte pour l’ensemble de leurs activités puisque le titre même d’honoraire montre bien qu’ils n’ont plus de lien avec la Cour. En revanche, même si, dans l’activité qui leur est confiée « au titre de la Cour », c’est-à-dire à raison d’une nomination par le Premier président ou d’une élection par la chambre du conseil, ils exercent leurs fonctions de manière indépendante et en tant que personne qualifiée et non en tant que représentant de la Cour, leur mode même de nomination entraîne que leur comportement ne doit pas nuire à la réputation de l’institution.

 

  • Pour ce qui concerne les magistrats en poste à l’extérieur, l’expérience montre que les parlementaires et les médias font fréquemment le lien entre les fonctions qu’exerce un magistrat à l’extérieur et son comportement dans ces fonctions avec son appartenance aux juridictions financières. L’image et la réputation de l’institution se trouvent de ce fait concernées, à la différence de ce qui se passe quand un magistrat a démissionné. Au demeurant, ces magistrats conservent à divers titres des liens avec la Cour, ont un droit à réintégration qu’ils peuvent exercer à tout moment et, pour ceux qui sont en détachement, concourent pour l’avancement.

 

A cet égard, le projet de révision de 2013 montre que les rédacteurs de l’époque n’entendaient pas limiter aux seuls magistrats en fonctions dans les juridictions financières l’application des valeurs et principes exprimés dans la charte.

 

Ce point de vue est partagé par le collège qui, ayant été conduit à se prononcer sur cette question, a fait la lecture suivante de la charte : « La charte exprime non seulement des règles mais aussi des valeurs et principes, qui, par nature, ne peuvent être suspendus pendant l’exercice de fonctions à l’extérieur.(..) Par le serment, le magistrat s’engage notamment à respecter le « secret des délibérations », obligation qui doit être considérée comme demeurant,  quand un magistrat est détaché, pour les délibérations auxquelles il a participé auparavant, mais aussi de « se comporter en tout comme un digne et loyal magistrat (..) ».  Le serment et la charte mettent (…) l’accent, notamment dans le souci de la réputation des juridictions financières, sur les valeurs et principes de loyauté, d’intégrité, d’honnêteté, de droiture et de probité. » Le collège a aussi relevé que le serment présente un caractère définitif, marqué par le fait que, à un retour de détachement, de disponibilité ou de position hors cadres, le magistrat ne prête pas à nouveau serment, et par l’affirmation, à l’article L. 120-3 du CJF, que le magistrat « ne peut en aucun cas être délié de son serment »7

 

Dans un autre avis, adopté le 16 mars 2015, le collège a été amené à constater, à l’occasion de la réintégration à la Cour d’un magistrat en disponibilité, que ses activités pendant sa période d’activité hors de la juridiction n’avaient pas été sans risques pour l’image et la réputation de celle-ci.

 

La rédaction actuelle de la charte précise, dans l’alinéa sur les postes occupés à l’extérieur (cf. infra II.6.2), que la nature de ces fonctions « doit être compatible avec le statut des magistrats, le serment qu’ils ont prêté et ne pas nuire à la réputation de l’institution ». Comme l’a relevé le collège dans son avis du 6 février 2015, le fait que la nature des fonctions exercées doit respecter ces exigences implique que la pratique de l’exercice de mêmes fonctions doive aussi les respecter.

 

Le paragraphe de la charte actuelle sur les personnels concernés pourrait donc être complété par le rappel que, pour les magistrats et les autres personnes qui le prêtent, ce serment revêt un caractère définitif et qu’ils ne peuvent en aucun cas en être relevés (articles L. 120-3 et L. 220-3 (L. 220-4) du code des juridictions financières) ; que la déontologie doit continuer à inspirer le comportement des magistrats en poste à l’extérieur, car dès lors qu’ils n’ont pas démissionné, et conservent ainsi un lien avec les juridictions financières, ce lien a nécessairement des conséquences aux yeux du public sur l’image et la réputation de celles-ci.

 

 

Proposition de rédaction

 

Personnels concernés

 

9. Conformément au code des juridictions financières, la présente charte s’applique aux magistrats, aux conseillers maîtres et conseillers référendaires en service extraordinaire ainsi qu’aux rapporteurs extérieurs auprès de la Cour et aux rapporteurs auprès des chambres régionales et territoriales. Ses dispositions s’appliquent également aux magistrats honoraires dans le cadre des fonctions qui leur sont confiées au titre des juridictions financières. Elles inspirent le comportement des magistrats lorsqu’ils exercent des fonctions à l’extérieur de la juridiction.

 

Les experts concourant à l’évaluation des politiques publiques sont, conformément au code des juridictions financières, soumis aux mêmes obligations.

 

Le serment revêtant un caractère définitif, les magistrats et les autres catégories de personnels qui le prêtent ne peuvent en aucun cas en être relevés.

 

II.3. Valeurs et principes généraux

 

La charte actuelle commence par énoncer quatre principes généraux : indépendance, impartialité, neutralité et intégrité.

 

La loi du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires mentionne pour sa part les principes de dignité, d’impartialité, d’intégrité et probité, de neutralité et de laïcité.

 

  1. Trois de ces principes coïncident avec ceux de la charte (l’impartialité, l’intégrité et la neutralité). Au principe d’intégrité posé par la charte, la loi associe celui de probité. Les principes de dignité et de laïcité ne figurent pas dans la charte actuelle. Toutefois celui de dignité figure dans les formules de serment des magistrats et des rapporteurs et d’ailleurs aussi des vérificateurs et des greffiers [5].

 

Le principe d’indépendance, quant à lui, est retenu en premier dans la charte de 2006. Il n’apparaît pas dans la loi de 2016. Cette différence est justifiée par la nature juridictionnelle de la Cour et des CRTC. Le principe d’indépendance devrait donc être repris dans la nouvelle charte et continuer à y figurer en premier.

 

  1. Pour mieux structurer la charte, ces grands principes pourraient être regroupés sous le titre global de « Valeurs et principes généraux ».

 

Cet ensemble pourrait commencer par une introduction reprise du projet de 2013 : les principes fondamentaux d’indépendance, d’impartialité et d’intégrité « exigent que chacun, en toute occasion, se détermine librement, sans parti pris d’aucune sorte, ni volonté de favoriser un intérêt particulier et sans céder à aucune pression. » Cette phrase constituait en 2013 le 3ème alinéa de l’introduction du chapitre « indépendance, impartialité et intégrité ».

 

 

 

Proposition de rédaction

 

les Valeurs et principes généraux

 

10. Les principes fondamentaux d’indépendance et d’impartialité exigent que chacun, en toute occasion, se détermine librement, sans parti pris d’aucune sorte, ni volonté de favoriser un intérêt particulier et sans céder à aucune pression.

 

 

  1. Les valeurs et principes généraux pourraient ensuite figurer dans l’ordre et selon les regroupements et rédactions ci-après :

 

II.3.1. Indépendance

 

 

Texte actuel : « La nécessité de garantir l’indépendance et la réputation de l’institution impliquent que les personnes chargées de contrôle évitent toute situation de nature à porter atteinte à son impartialité et à sa neutralité. »

 

Cet alinéa est immédiatement suivi d’un autre alinéa sur l’impartialité qui stipule que « l’impartialité de ceux qui délibèrent suppose que leur opinion est formée sans préjugé ni parti pris »

 

La rédaction actuelle justifierait notamment deux améliorations. D’une part, elle rassemble dans une même phrase, sous le chapeau « indépendance », la réputation, l’indépendance et la neutralité. D’autre part, l’impartialité est évoquée à la fois dans le principe d’indépendance et de manière autonome.

 

L’actualisation de la charte devrait reprendre l’ensemble des principes figurant dans la loi et maintenir, au premier rang, le principe d’indépendance qui caractérise la nature des juridictions.

L’indépendance et l’impartialité semblent au collège devoir être considérées de manière distincte. L’impartialité, si elle figure dans la loi pour l’ensemble des fonctionnaires, entraîne aussi dans le cas des juridictions financières des exigences, énoncées notamment par la CEDH [6] distinctes de celles qui fondent l’indépendance de la juridiction telle que prévue y compris dans le droit national.

 

Aucune définition de la notion d’indépendance n’existe aujourd’hui. Elle serait cependant utile pour guider le comportement des magistrats. La rédaction suivante peut être proposée :

 

Proposition de rédaction

 

Indépendance

 

11. L’indépendance des juridictions financières suppose que les magistrats et autres personnes concernées par les obligations de la charte ne sont soumis et ne doivent apparaître soumis à aucun lien de subordination de quelque nature que ce soit. Ils veillent à éviter toute situation qui entraverait ou pourrait paraître entraver leur liberté d’investigations dans le cadre des normes professionnelles ou la liberté de formation et d’expression de leurs opinions dans les délibérés. La seule limite apportée à cette liberté réside dans le respect des décisions collégiales.

 

 

II.3.2. Impartialité, neutralité, laïcité

 

Il est proposé de regrouper sous le même intertitre les principes d’impartialité, de neutralité et de laïcité. Ils se situent sur le même registre et se recoupent pour partie.

 

Seuls les principes d’impartialité et de neutralité faisaient l’objet de dispositions spécifiques dans la charte de 2006.

 

 

Texte actuel :

« L’impartialité de ceux qui délibèrent suppose que leur opinion a été formée sans préjugé ni parti pris ».

« Les personnes chargées de contrôle ne doivent pas mettre en avant leur appartenance à l’institution ou leur collaboration aux travaux de celle-ci, dans le cadre d’activités politiques, philosophiques ou confessionnelles. Dans l’esprit de cette règle, les personnes chargées de contrôle, dès lors qu’elles sont candidates à une élection nationale ou à celle du Parlement européen, sont invitées à demander à être placées en position de disponibilité pendant la durée de la campagne officielle.

Les présidents de CRTC peuvent s’exprimer ès qualité sur des sujets relevant de leur compétence ».

 

 

Le collège propose de commencer cette partie de la charte par un alinéa général rappelant ces trois principes.

 

Ensuite viendrait un développement sur l’impartialité et la rédaction de 2006 (premier alinéa de l’encadré ci-dessus) pourrait à cet égard être reprise. Cependant, cette rédaction ne porte que sur le délibéré. Un alinéa supplémentaire pourrait être introduit pour viser les autres phases du travail des juridictions financières et les obligations qui doivent s’y imposer : respect de l’expression des parties, des personnes mises en cause et des tiers ; objectivité dans l’analyse et la restitution des arguments et opinions.

 

Suivrait un alinéa sur la neutralité et la laïcité.

 

Pour ce qui concerne la neutralité, le deuxième alinéa du passage de la charte de 2006 sur la neutralité concernait en fait deux types de situations : d’une part l’expression publique et, d’autre part, la neutralité à respecter de manière plus générale dans l’activité. Le 3ème alinéa visait l’expression publique des présidents de CRTC. Le collège propose de maintenir l’esprit de la rédaction antérieure mais de ne maintenir que ce qui concerne le comportement général et de reporter la 2ème phrase du 2ème alinéa et le dernier alinéa dans le passage examiné infra (II.5.3 points 37 et 38) sur l’expression publique.

 

Il est aussi proposé d’intégrer dans celui sur la neutralité une mention du principe de laïcité, ces deux principes étant très imbriqués.

 

Dans cet esprit, la première phrase du 2ème alinéa du texte actuel (non mise en avant de l’appartenance à l’institution dans le cadre d’activités politiques, philosophiques ou confessionnelles) pourrait être reprise mais il conviendrait de la compléter en posant que les personnes concernées s’abstiennent, dans leurs fonctions, de toute manifestation ou comportement traduisant une appartenance politique, philosophique ou confessionnelle. Il serait en outre logique que cet aspect soit évoqué en premier.

 

C’est également dans le point neutralité et laïcité que devrait continuer à figurer  la disposition sur la mise en disponibilité pendant les campagnes électorales officielles (cf. aussi infra point 11 du II.5.3). Cette disposition devrait être complétée en y ajoutant la participation à une équipe officielle de campagne.

 

 

 

Proposition de rédaction

 

12 Les personnes concernées par la charte font en sorte, dans leurs comportements tant professionnels que privés, de ne pas se trouver dans une situation qui pourrait porter atteinte ou paraître porter atteinte à l’impartialité et à la neutralité de la juridiction à laquelle ils appartiennent. Elles veillent à respecter le principe de laïcité.

 

Impartialité

 

13. L’impartialité des membres des formations de délibéré suppose que leur opinion a été formée sans préjugé ni parti pris.

 

14. Dans l’exercice de leurs fonctions, les personnes concernées par la charte veillent à permettre l’expression des parties, des personnes mises en cause et des tiers. Elles analysent et rendent compte objectivement des arguments et opinions exprimés. Pour l’évaluation des politiques publiques elles s’efforcent de prendre en compte les opinions des principales parties prenantes.

 

Neutralité et laïcité

 

15. Dans leur activité professionnelle, les personnes concernées s’abstiennent de toute manifestation ou comportement qui pourrait traduire une appartenance politique, philosophique ou confessionnelle. Dans le cadre d’activités politiques, philosophiques ou confessionnelles, elles ne mettent pas en avant leur appartenance à l’institution ou leur collaboration aux travaux de celle-ci.

 

Dans l’esprit de cette règle, dès lors qu’elles sont candidates à une élection nationale, locale, ou à celle du parlement européen, ou qu’elles ont des responsabilités dans une équipe officielle de campagne, ces mêmes personnes sont invitées à demander à être placées en position de disponibilité pendant la durée de la campagne officielle.

 

 

 

II.4 La prévention des conflits d’intérêts

 

Texte actuel : « Les personnes chargées de contrôle s’abstiennent de prendre part à un travail de vérification ou à un délibéré concernant un organisme dans lequel elles détiennent des intérêts de nature à compromettre leur indépendance.

Elles ne doivent pas contrôler un organisme ou un service dans lequel elles ont exercé des responsabilités au cours des trois dernières années, sans préjudice des dispositions législatives et réglementaires du code des juridictions financières.

 

Elles apprécient la nécessité de se déporter dès lors que des éléments personnels sont susceptibles de porter atteinte à leur impartialité » [7].

 

 

 

Le conflit d’intérêts est explicitement défini par l’article 2 de la loi du 20 avril 2016 repris à l’article L. 120-5 (120-6) du code des juridictions financières.

 

Il ne parait pas souhaitable au collège d’entrer dans le détail des règles à appliquer qui relèvent plutôt d’une instruction du Premier président. L’objet des dispositions de la charte relatives aux conflits d’intérêts doit être de montrer que la prévention des conflits d’intérêts ne constitue pas seulement un sujet en soi mais découle de l’application des valeurs et principes de la charte.

 

Dans cette optique, il suffirait de reprendre, pour le reste, la rédaction actuelle de la charte.

 

Elle présente l’avantage d’indiquer aux lecteurs extérieurs l’esprit général dans lequel les juridictions financières veillent à éviter les conflits d’intérêts.

 

Le texte actuel pourrait cependant être retouché sur trois points. En outre deux sujets nouveaux pourraient être traités.

 

Le premier sujet à ajouter est la nécessité de s’abstenir de toute intervention qui pourrait être perçue comme un conflit d’intérêts.

 

Le deuxième est le périmètre des intérêts à prendre en compte. Celui-ci est nécessairement plus large que les intérêts qui doivent faire l’objet de la déclaration explicite rendue obligatoire par le décret du 28 décembre 2016, la déclaration-type ne pouvant prévoir tous les cas. La rédaction pourrait s’inspirer de celle en vigueur pour les autres juridictions.

 

Les trois retouches, pour leur part, concerneraient le deuxième alinéa du texte actuel mér :

 

  • En premier lieu, il utilise le terme contrôle : « elles ne doivent pas contrôler un organisme ou un service dans lequel elles ont exercé des responsabilités». Or, d’une part il ne doit pas s’agir seulement du contrôle mais également du délibéré et, d’autre part, les missions des juridictions financières se sont étendues à des missions comme l’évaluation des politiques publiques et la certification qui, en principe, n’entrent pas sous le vocable « contrôle » ;
  • En second lieu, la rédaction actuelle mentionne un délai de trois ans, qui existe fréquemment dans des textes législatifs ou réglementaires ou dans d’autres chartes de déontologie. Cependant le décret du 28 décembre 2016 pris pour l’application de la loi du 20 avril 2016 prévoit un délai de cinq ans sur lequel il convient en conséquence d’aligner le délai figurant dans la charte.
  • Le dernier membre de phrase du 2ème alinéa (« sans préjudice du CJF ») ne semble plus nécessaire à la suite de la loi du 20 avril 2016 et du décret du 28 décembre 2016.

Le collège propose au total de retoucher et compléter de la manière suivante le texte sur la prévention des conflits d’intérêts.

 

 

Proposition de rédaction

 

La prévention des conflits d’intérêt

 

16. Afin de prévenir les conflits d’intérêts et dans le respect des dispositions du code des juridictions financières en ce domaine, les personnes concernées par la charte s’abstiennent de prendre part à des investigations ou à un délibéré concernant un organisme dans lequel elles détiennent des intérêts, ou en ont détenu dans les cinq années précédentes, de nature à compromettre leur indépendance, leur impartialité ou leur neutralité.

 

Elles n’interviennent d’aucune manière sur un organisme ou un service où elles ont exercé des responsabilités au cours d’une période qui ne doit être en aucun cas inférieure à cinq ans.

 

17. Elles s’abstiennent d’intervenir en faveur d’un tiers même à titre amical dès lors que la situation s’apparente à un conflit d’intérêts.

 

18. Ces obligations s’appliquent également à elles lorsqu’elles sont appelées à exercer une activité accessoire ou occupent une fonction à l’extérieur des juridictions financières. Les règles propres à ces activités accessoires ou extérieures n’exonèrent pas les intéressés de respecter les valeurs et principes de la présente charte.

 

19. Dans l’appréciation de leurs intérêts et des risques de se trouver placées dans une situation de conflit d’intérêts, les personnes concernées par la charte considèrent que la notion d’intérêt privé s’entend d’un avantage pour elles-mêmes,  leur famille, leurs proches immédiats ou des personnes ou organisations avec lesquelles elles entretiennent ou ont entretenu des relations d’affaires ou professionnelles significatives, ou avec lesquelles elles sont directement liées par des participations ou des obligations financières ou civiles.

 

 

II.5. Principes de comportement

 

Les principes de dignité et de loyauté qui résultent à la fois du serment et de la nécessité qu’il ne soit pas porté atteinte à la réputation de l’institution, ont pour conséquence des principes de comportement.

 

La charte actuelle comporte d’une part un passage « discrétion et secret » et d’autre part un alinéa « relations professionnelles ».

 

La loi du 20 avril 2016 érige en principe la dignité, l’intégrité et la probité. La charte de 2006 mentionnait la probité. En revanche, si elle évoquait l’honnêteté, la droiture et l’honneur, elle ne mentionnait ni la dignité ni l’intégrité. Le serment, lui, fait expressément mention de la dignité. Il est proposé de regrouper ces divers principes sous un même intertitre : « dignité, intégrité, probité ».

 

Ces dispositions pourraient en outre être complétées par un paragraphe sur l’expression publique et un autre paragraphe sur les relations avec les contrôlés, venant après celui qui existe sur les relations professionnelles.

 

L’ensemble pourrait constituer une partie qui serait intitulée « principes de comportement » avec des intertitres.

 

En introduction de cette partie pourraient être rappelées les obligations de dignité et de loyauté qui résultent du serment et doivent inspirer l’ensemble des comportements.

 

 

 

Proposition de rédaction

 

LES PRINCIPES DE COMPORTEMENT

 

20. Les principes de dignité et de loyauté qui résultent à la fois du serment et de la nécessité qu’il ne soit pas porté atteinte à l’image et à la réputation de l’institution, ont pour conséquence des principes de comportement.

 

 

II.5.1. Dignité, Intégrité, probité

 

Texte actuel : « Les personnes chargées de contrôle exercent leur tâche avec honnêteté et droiture. Elles s’abstiennent de tout agissement contraire à l’honneur.

Elles refusent toutes formes de bénéfices, d’avantages ou de faveurs proposés par quiconque et susceptibles de jeter un doute sur leur probité. 

 

 

La nouvelle rédaction pourrait commencer par un alinéa sur la dignité et être suivi par un ensemble d’alinéas sur la probité et l’intégrité. L’alinéa sur la dignité ferait le lien avec le contenu du serment.

 

Pour ce qui concerne l’intégrité et la probité, la rédaction du projet de révision de 2013 est beaucoup plus détaillée que celle de la charte de 2006. Elle pourrait être reprise telle quelle sous deux réserves[8] :

 

  1. Le projet de 2013 ne reprenait pas le 1er alinéa du texte de 2006 : « Les personnes chargées de contrôle exercent leur tâche avec honnêteté et droiture. Elles s’abstiennent de tout agissement contraire à l’honneur ». Cet alinéa avait cependant le mérite de se référer à des valeurs qui sont certainement considérées par le public comme particulièrement nécessaires pour les membres des juridictions financières. Le collège s’y réfère et en dernier lieu dans son avis du 6 février 2015.

 

  1. Dans le même esprit, le mot de « probité », qui ne figurait pas dans le projet de 2013 mais a également été utilisé par le collège et qui figure dans l’ordonnance 2016-1360 du 13 octobre 2016, pourrait être inséré après celui d’honnêteté (« avec honnêteté, probité et droiture »).

 

Dans un souci d’être concret, le projet de 2013 comportait un alinéa final sur les invitations au restaurant. Sa rédaction était en elle-même pertinente et concernait une situation à laquelle se trouvent fréquemment confrontés les personnels de contrôle. Elle semble cependant relever de la jurisprudence plus que de la charte qui se situe au niveau des valeurs et des principes. Le collège a d’ailleurs rendu des avis sur ce type de questions pratiques, avis qui sont désormais consultables sur le site interne SESAM.

 

Il conviendrait plutôt de formuler un principe général qui pourrait être le suivant : « Ils ne doivent pas se placer ou se laisser placer dans une situation susceptible de les obliger à accorder en retour une faveur à une personne physique ou morale ».

 

Au total dans le souci d’être cohérent avec l’ordonnance, le titre de ce passage pourrait être complété en y intégrant le mot d’intégrité : « dignité, intégrité, probité ».et la nouvelle rédaction pourrait :

 

  • Reprendre le premier des alinéas ci-dessus du texte actuel en y intégrant la dignité, avec sur ce point une référence explicite au serment,

 

  • Puis comporter 5 alinéas sur l’intégrité et la probité : le premier poserait les principes généraux d’intégrité et de probité puis reprendrait la rédaction actuelle en adaptant simplement le champ d’application aux seules personnes visées par la loi du 20 avril, puis 4 alinéas tirés du projet de 2013.

 

 

Proposition de rédaction

 

Dignité, intégrité, probité

 

Dignité

 

21. Les personnes concernées par la présente charte exercent leurs tâches avec dignité, conformément au serment. Elles se comportent avec droiture et s’abstiennent de tout agissement contraire à l’honneur.

 

Intégrité et probité

 

22. L’intégrité et la probité inspirent l’exercice professionnel des personnes concernées par la charte ainsi que leur conduite dans leurs autres activités.

 

23. Ces mêmes personnes ne peuvent tirer de leur position officielle aucun avantage.  Elles ne sollicitent ni n’acceptent de quiconque, dans le cadre de leurs fonctions, pour elles-mêmes ou pour des tiers, aucun avantage qui puisse exercer une influence ou jeter un doute sur l’indépendance ou l’impartialité de leurs décisions, sur leur honnêteté ou sur la façon dont elles exercent leurs fonctions. Elles ne sollicitent pas pour elles-mêmes des distinctions honorifiques.

 

24. Elles n’acceptent pas, de façon directe ou indirecte, des cadeaux et libéralités dans l’exercice ou à l’occasion de leurs fonctions. Seuls peuvent être acceptés les cadeaux de faible valeur s’inscrivant dans le cadre protocolaire d’une visite ou d’un échange à caractère officiel.

 

25. Les invitations ne peuvent être acceptées que si elles ne sont pas, par leur valeur, leur fréquence ou leur intention, de nature à influencer ou paraître influencer l’exercice indépendant et impartial des fonctions.

 

26. Ces personnes ne doivent pas se placer ou se laisser placer dans une situation susceptible de les obliger à accorder en retour, dans l’exercice de leurs fonctions, une faveur ou une contrepartie à une personne physique ou morale.

 

 

 

 

II.5.2. Discrétion et secret

 

Texte actuel : « Les personnes chargées de contrôle respectent le secret professionnel, qui touche notamment les investigations et les délibérations.

Elles s’abstiennent de communiquer tous documents ou informations ayant un caractère confidentiel ou dont la publicité revient à la Juridiction.

Le secret des délibérations implique que les personnes chargées de contrôle s’abstiennent, en toutes circonstances, de faire connaître leur opinion personnelle et celle des membres délibérants.

Elles sont tenues au respect du secret de la Défense Nationale.

Elles doivent également faire preuve de discrétion professionnelle ».

 

 

  1. Le projet de 2013 précisait opportunément les dispositions succinctes de la charte de 2006. Il paraîtrait cependant souhaitable de reprendre, ce que ne faisait pas ce projet, la première phrase du texte de 2006 qui présentait l’avantage de poser le principe général du secret. Ensuite pourraient venir deux phrases inspirées du texte de 2013 « le secret professionnel s’applique à toutes les formes d’investigation[9]. Cette obligation vise tous les moyens de communication. Le secret est absolu et ne connaît ni modulation, ni division, ni dérogation ». Elles pourraient simplement être interverties pour mieux assurer la continuité du raisonnement.

 

  1. En revanche, il n’apparaît pas souhaitable de reprendre trois des dispositions envisagées en 2013 :
  • Dans les deux premiers paragraphes qu’il consacrait à ces sujets, le projet reprenait le code des juridictions financières et la loi n°83-634 du 13 juillet 1983. Pour les raisons précédemment évoquées (esprit de la charte, énumération inévitablement incomplète), il n’apparaît pas souhaitable de reprendre ces références ;
  • La phrase « Cette obligation impose une grande réserve dans la divulgation aux tiers d’informations non encore publiques » semble au collège pouvoir s’avérer dangereuse, et il propose de ne pas la retenir (il ne doit normalement y avoir aucune divulgation) ;
  • Le contexte de l’époque avait conduit à viser les réseaux sociaux, encore nouveaux, et à citer en note les noms de ces réseaux sociaux. Était considérée comme contraire à la déontologie l’utilisation des réseaux sociaux dans le but de « faire état à l’extérieur de l’institution des modalités et du contenu des investigations menées » et pour « diffuser des informations résultant des investigations ou des délibérés ». Il parait plus pertinent, compte tenu de la diversification croissante des formes de communication, de remplacer ces références aux réseaux sociaux par une mention plus générale : « sur quelque support que ce soit ». De plus, le projet de 2013 comportait un alinéa[10] qui relevait, sur le fond, du chapitre consacré à l’expression publique et au devoir de réserve. Il pourrait être repris dans cette autre partie.

 

La rédaction actuelle de la charte mérite par ailleurs trois améliorations :

  • Le quatrième alinéa du texte actuel, qui ne vise que le respect du secret de la Défense nationale, devrait être étendu à l’ensemble des secrets prévus par la loi. La rédaction pourrait être « elles respectent » plutôt que « elles sont tenues au respect ») les secrets prévus par la loi » ;
  • La rédaction du dernier alinéa (« Elles doivent également faire preuve de discrétion professionnelle »), qui présente un caractère normatif, pourrait être améliorée en disant « elles font preuve de discrétion professionnelle ». Elle devrait être complétée pour expliciter les obligations de confidentialité sur les documents, informations et renseignements connus ou échangé ;

 

  • Il devrait être précisé que ces différentes obligations de secret d’une part, de discrétion et de confidentialité d’autre part concernent tous les moyens et supports de communication.

 

 

 

Proposition de rédaction

 

Discrétion et secret

 

27. Les personnes concernées par la charte respectent le secret professionnel, qui touche notamment les investigations et les délibérations. Le secret est absolu et ne connaît ni modulation, ni division, ni dérogation. Le secret des délibérations implique que les personnes concernées par la charte s’abstiennent en toutes circonstances de faire connaître leur opinion personnelle et celle des membres délibérants. Elles respectent les secrets protégés par la loi.

 

28. Ces mêmes personnes respectent pour toutes leurs activités une obligation de discrétion professionnelle. Elles s’abstiennent notamment de communiquer tous documents ou informations ayant un caractère confidentiel ou dont la publicité revient à la seule juridiction dont elles relèvent. Elles observent la discrétion la plus complète sur tout renseignement, sur toute donnée de fait dont elles peuvent avoir connaissance directement ou indirectement à l’occasion de leurs fonctions présentes ou passées et qui ne peuvent être normalement connus qu’en vertu des pouvoirs dont disposent les juridictions financières. Elles prennent toutes dispositions nécessaires pour préserver la confidentialité des informations professionnelles échangées.

 

29. Ces différentes obligations visent tous les moyens et supports de communication.

 

 

II.5.3. Expression publique

 

  1. La charte de 2006 ne comportait pas de dispositions spécifiques sur l’expression publique. Le projet de 2013 créait un chapitre 4 consacré à cette question. Il reprenait plusieurs dispositions de la charte de déontologie de la juridiction administrative.

La loi du 20 avril 2016, codifiée à l’article L120-6 du code des juridictions financières aligne la situation des magistrats de chambre régionale des comptes sur celle des magistrats de la Cour : « Aucun magistrat des chambres régionales des comptes ne peut se prévaloir, à l’appui d’une activité politique, de son appartenance à son corps. Tout magistrat des chambres régionales des comptes, en service dans une chambre ou chargé de fonctions extérieures, doit s’abstenir de toute manifestation de nature politique incompatible avec la réserve que lui imposent ses fonctions. » Comme pour la Cour, ces dispositions ne concernent que les magistrats.

  1. Ce domaine est très sensible, car il touche à des droits individuels fondamentaux. Il existe en outre une extrême diversité de cas. Au demeurant, le recueil de la magistrature judiciaire se borne à une formulation générale : « Dans son expression publique, le magistrat fait preuve de mesure, afin de ne pas compromettre l’image d’impartialité de la justice, indispensable à la confiance du public ». Cette rédaction a cependant l’avantage de rappeler les exigences intrinsèques à la nature d’une juridiction. Pour les juridictions administratives, la charte de 2008 était également très générale. Celle du 14 mars 2017 développe davantage le sujet.
  2. Le collège estime que la meilleure solution serait :

    – De dégager des principes généraux susceptibles de constituer des points de repères, les cas particuliers pouvant, en tant que de besoin, faire l’objet d’une consultation du collège de déontologie.

     – De veiller à rattacher les dispositions plus précises qui seraient également introduites dans la charte à ces principes fondamentaux et aux attentes des citoyens vis-à-vis d’une juridiction.

  1. Le passage consacré à l’expression publique devrait ainsi s’ouvrir par un rappel du principe de libre opinion des fonctionnaires, principe qui ressort de la loi du 13 juillet 1983 mais aussi de la déclaration des droits de l’Homme.
  2. Le paragraphe essentiel pourrait ensuite exprimer l’idée qu’en revanche, quelle qu’en soit la forme, toute expression publique d’opinions politiques, philosophiques ou religieuses est soumise au respect de l’obligation personnelle de réserve, telle qu’elle résulte des principes généraux de la fonction publique. Elle doit respecter les principes de neutralité et de laïcité. Les opinions exprimées doivent être compatibles avec la nature et la dignité des fonctions exercées au sein des juridictions financières et ne doivent pas porter atteinte à leur image et à la leur réputation. D’une manière générale, quelle qu’en soit la forme, l’expression publique doit être conforme au principe de loyauté affirmé dans le serment.
  3. Le respect du secret des travaux et délibérés, posé précédemment, doit trouver une traduction dans les dispositions relatives à l’expression publique. Les personnes concernées ne devraient pas divulguer, à l’extérieur, ce qui touche à ces travaux et délibérés. Dans le même esprit elles ne devraient pas se livrer à des commentaires publics sur la vie interne des juridictions financières.
  4. Le projet de 2013 envisageait l’obligation de ne pas faire état de son appartenance aux juridictions financières sur les réseaux sociaux. Certes, cette préconisation semble difficile à mettre en œuvre et de peu de portée compte tenu de l’évolution actuelle des réseaux sociaux et de la capacité des moteurs de recherche. Il convient cependant d’inciter les personnes concernées à ne pas faire état par elles-mêmes de leur appartenance aux juridictions financières sur les réseaux autres qu’à caractère professionnel. Il convient, dans le même temps, de les inciter à la prudence dans leur expression, compte tenu de la diffusion potentiellement large de leurs messages.
  5. Lorsque l’expression publique concerne des travaux de la Cour, deux types de situations sont à distinguer : au plan général, compte tenu de l’importance du principe de collégialité dans les juridictions financières[11], la publication ou l’expression publique des personnes concernées par la charte ou les publications auxquelles elles participent, devrait respecter la position de la collégialité ; quand elles s’expriment publiquement sur les publications au délibéré desquelles elles ont participé, elles devraient respecter le message délivré dans ces publications et éviter tout message critique.
  6. Pour ce qui concerne l’expression dans les médias, le projet de 2013 comportait deux types de dispositions :

 

  • Les unes étaient relativement restrictives « Toute expression publique portant sur les publications des juridictions financières est soumise aux règles et pratiques internes, notamment à l’accord préalable des autorités compétentes pour s’exprimer publiquement[12], le strict respect du contenu de la publication et la compatibilité avec la stratégie de communication retenue en l’espèce » ;
  • Cependant, le 6ème alinéa reconnaissait ensuite un droit à publication dans des revues spécialisées et même la possibilité de faire usage de sa qualité sous la seule condition de la modération dans les propos (« Dans le cas d’activités d’enseignement, ou de publication dans des revues à vocation universitaire ou scientifique, il est possible de se prévaloir de sa qualité au sein des juridictions financières, ce qui implique de la modération dans les propos »).

 

L’articulation des deux dispositions n’était pas évidente. En particulier, les termes « toute expression publique » peuvent paraître englober la publication dans des revues spécialisées. Pour concilier le principe de l’obligation de réserve et celui de la liberté d’expression, il est proposé de distinguer deux domaines différents :

  • Celui des publications dans des revues à vocation universitaire, juridique, technique ou financière ou d’expression dans des colloques ou séminaires de ce type pour lesquels doivent s’appliquer seulement la modération des propos et, si la publication commente une publication de la Cour, le respect du message qui y délivré ;
  • L’expression publique sur des médias à vocation plus générale, quelle qu’en soit la nature, qui pourrait être soumise à l’accord préalable des autorités compétentes. Ce cas de figure recouvre deux situations : celle ou le magistrat s’exprime dans l’exercice de ses fonctions ou en qualité de membre des juridictions financières. Dans les cas autres, le magistrat doit prendre toutes dispositions nécessaires pour séparer son expression publique de sa qualité de membre des juridictions financières.
  1. Enfin, le projet de 2013 évoquait, outre le cas des candidatures à un mandat électif national ou européen, celui des candidatures à un mandat électif local et l’exercice de responsabilités au sein d’une équipe de campagne. Les instructions du Premier président publiées avant les campagnes électorales et en dernier lieu la circulaire du 8 mars 2017, se fondent sur la charte de 2006 pour inviter les personnes concernées à demander à être placés en disponibilité pendant la durée de la campagne électorale. Cette disposition de la charte de 2006 pourrait être reprise et étendue au cas des personnes dont la participation à une équipe de campagne est notoire ou susceptible de le devenir. Cette disposition trouverait plus logiquement sa place dans celle sur la neutralité (cf. supra II.3.2) que parmi celles relatives à l’expression publique.

En revanche, c’est dans l’expression publique que devrait prendre place l’alinéa relatif à l’expression des présidents de chambre régionale et territoriale des comptes sur des sujets relevant de leurs compétences, plutôt que, comme dans la charte de 2006, dans celui sur l’impartialité et la neutralité.

  1. Il convient enfin de traiter le cas où une personne concernée par la charte s’exprime publiquement dans l’exercice d’une mission qui lui a été confiée ès qualité à l’extérieur des juridictions financières. Il serait souhaitable qu’elle précise que ses propos et positions n’engagent pas ces juridictions.
  2. Le collège est d’avis de ne pas faire figurer dans la charte ce qui relève de la simple reprise de dispositions législatives, comme par exemple « l’usage irrégulier de la qualité de membre de la Cour des comptes » qui apparaissait dans le projet de 2013.

 

 

Proposition de rédaction

 

Expression publique

 

30. Les magistrats et autres personnes concernées par la charte disposent, comme tout autre fonctionnaire, de la liberté d’opinion, de la liberté d’adhérer à un parti politique, à un syndicat ou à une association.

 

31. Ces mêmes personnes respectent dans toute expression publique d’opinions politiques, philosophiques ou religieuses, quelle qu’en soit la forme, l’obligation personnelle de réserve, telle qu’elle résulte des principes généraux de la fonction publique ainsi que les principes de neutralité et de laïcité. Elles veillent à ce que les opinions qu’elles expriment soient compatibles avec la nature et la dignité des fonctions exercées au sein des juridictions financières. Elles veillent à respecter dans cette même expression leur obligation de loyauté et à ne pas porter atteinte à l’image et la réputation de ces mêmes juridictions.

 

32. Sauf nécessité professionnelle, elles ne font pas état à l’extérieur de l’institution des modalités et du contenu des investigations qu’elles mènent ou dont elles ont connaissance, ou des délibérés auxquels elles ont participé. Elles évitent tout commentaire sur la vie interne des juridictions financières.

 

33. Dans les messages qu’elles envoient sur les réseaux sociaux ou sur les messageries non professionnelles, elles ne font pas état de leur appartenance aux juridictions financières. Elles s’abstiennent de prendre part à toute polémique qui par sa diffusion, eu égard à son objet ou à son caractère, serait de nature à rejaillir sur l’Institution.

 

34. Lorsqu’elles s’expriment publiquement sur les publications des juridictions financières, les personnes concernées par la charte respectent le message délivré dans ces publications et évitent tout commentaire critique.

 

35. Dans le cas d’activités d’enseignement, ou de publication dans des revues à vocation universitaire, scientifique, juridique, technique ou financière, ou d’expression dans des colloques ou séminaires de même nature, il leur est possible de se prévaloir de leur qualité au sein des juridictions financières, ce qui implique de leur part une modération appropriée dans leurs propos.

 

36. Lorsque les personnes concernées souhaitent s’exprimer dans un média à vocation générale dans l’exercice de leurs fonctions ou en qualité de membre des juridictions financières, elles sollicitent au préalable l’accord de l’autorité compétente. Dans les autres cas, elles prennent toutes dispositions nécessaires pour séparer leur expression de leur qualité de membre des juridictions financières.

 

37. Les présidents de chambre régionale et territoriale des comptes peuvent s’exprimer es qualité sur les sujets relevant de leur compétence.

 

38. Dans l’exercice d’une mission confiée à un magistrat ès qualité, à l’extérieur des juridictions financières, la mention de son appartenance est autorisée, mais la précision que ses propos et positions n’engagent pas ces juridictions est souhaitable.

 

 

II.5.4. Relations professionnelles

La charte de 2006 comportait un paragraphe sur les relations professionnelles.

Texte actuel : « Les personnes chargées de contrôle amenées à participer à des délibérés doivent se comporter en tous actes à l’égard de leurs collègues de façon confraternelle, afin de garantir le bon fonctionnement de la collégialité et la sérénité des délibérations. »

 

 

Cette disposition était limitée aux personnes amenées à participer au délibéré alors que le sujet est plus global. Elle pourrait être conservée mais en ajoutant un alinéa précisant que cette exigence de respect doit être plus générale, y compris sur les réseaux sociaux. 

 

 

Proposition de rédaction

Les relations professionnelles

 

39. Les personnes concernées par la présente charte lorsqu’elles sont amenées à participer à des délibérés se comportent en tous actes à l’égard de leurs collègues de façon à garantir la sérénité des délibérations et le bon fonctionnement de la collégialité.

Elles adoptent de manière plus générale un comportement de respect vis à vis de chacun, y compris dans leur expression sur les réseaux sociaux, même privés.

 

 

 

II.5.5. Relations avec les contrôlés

 

La charte ne comporte actuellement aucune disposition sur les relations avec les contrôlés. Les normes professionnelles approuvées par arrêté du Premier président en décembre 2014 indiquent (points III.20 et III.21) que « le rapporteur veille au caractère équilibré et proportionné de ses investigations au regard de l’objectif considéré » et « fait preuve d’objectivité et entend les points de vue et les arguments des représentants de l’entité contrôlée en faisant abstraction de ses préférences ou convictions personnelles ». Il semblerait cependant souhaitable d’introduire dans la charte un nouvel alinéa sur les relations avec les contrôlés pour montrer, y compris à l’extérieur, que le respect des valeurs et principes ne concerne pas seulement les relations professionnelles internes aux juridictions financières. La rédaction pourrait indiquer que les personnes concernées par la charte adoptent un comportement respectant les personnes et une attitude d’attention et d’écoute lors des entretiens ou de tout échange avec les représentants des organismes contrôlés ; qu’ils s’abstiennent d’utiliser, dans leurs propos et leurs écrits, des expressions qui pourraient être ressenties comme déplacées ou vexatoires.

 

L’objectif de cet alinéa serait de se situer non pas dans le registre des normes (par exemple le caractère proportionné des investigations ou le respect du contradictoire) mais dans celui des valeurs et principes et des comportements qu’ils doivent inspirer.

 

 

Proposition de rédaction

 

Relations avec les contrôlés

 

40. Elles veillent constamment à adopter une attitude de respect et , d’attention et d’écoute lors des entretiens et contrôles, sans jamais laisser transparaître des sentiments personnels de sympathie ou d’antipathie vis-à-vis des personnes rencontrées dans l’exercice de leurs missions. Elles s’abstiennent d’utiliser, dans leurs propos et leurs écrits, des expressions qui pourraient être ressenties comme déplacées ou vexatoires.

 

 

 

    II.6. Activités accessoires et postes occupés par des magistrats à l’extérieur

 

Le projet de 2013 regroupait les dispositions sur les activités accessoires et celles relatives aux postes occupés par des magistrats à l’extérieur en un seul chapitre. Les deux sujets sont cependant différents. Il est donc proposé de les traiter sous un chapeau commun afin de mieux structurer la charte, mais de manière distincte, comme dans le texte de 2006.

 

II.6.1 Activités accessoires

Texte actuel : « Les activités extérieures rémunérées sont exercées par les personnes chargées de contrôle dans le respect de la dignité de leurs fonctions. Leur nature doit être compatible avec l’exercice de leurs fonctions et ne pas nuire à la réputation de l’institution.

A cette fin, les personnes chargées de contrôle font part préalablement à leur président de chambre ou, si elles ne sont pas affectées dans une chambre, à l’autorité hiérarchique dont elles relèvent, des activités extérieures rémunérées, qu’elles accomplissent à titre occasionnel ou récurrent.

En ce qui concerne les personnes chargées de contrôle affectées dans les chambres régionales et territoriales des comptes, le président de la chambre, et, pour les commissaires du Gouvernement, le Procureur général, prennent la décision d’autorisation après avoir requis, s’ils l’estiment nécessaire, l’avis du collège de déontologie.

En ce qui concerne les personnes chargées de contrôle affectées à la Cour, à l’exception des tâches d’enseignement qui relèvent de la décision préalable du président de chambre ou de l’autorité hiérarchique, la décision d’autorisation préalable est prise par le Premier président après avis du président de chambre ou de l’autorité hiérarchique. Dans le cas des personnes chargées de contrôle affectées au ministère public, cette décision intervient en accord avec le Procureur général.

Le Premier président peut requérir, s’il estime nécessaire, l’avis du collège de déontologie ».

 

 

Pour ce qui concerne ce premier type d’activités, celles qui sont exercées simultanément aux fonctions à la Cour, il est proposé, comme le faisait le projet de 2013, de remplacer, pour le désigner,  le terme « extérieures » par « accessoires ».

Ce chapitre pourrait s’ouvrir, comme dans le projet de 2013, par le rappel que les personnels concernés par la charte doivent consacrer l’intégralité de leurs activités professionnelles aux tâches qui leur sont confiées dans les juridictions financières. Certes, cette disposition figure dans la loi mais son rappel permet de mieux comprendre les développements qui suivent.

 

Le premier alinéa de la charte actuelle pourrait être conservé mais en précisant qu’il vise les activités tant rémunérées que non rémunérées, et non les seules activités rémunérées. Les activités non rémunérées peuvent en effet poser elles aussi des questions de déontologie.

 

Pour le reste, le texte de 2006 comme le projet de 2013 sont centrés sur la règle d’autorisation et la procédure à suivre. La rédaction de 2006 présentait l’avantage d’être assez précise tout en ménageant une souplesse d’application. Cependant, la définition des circuits d’autorisation ne semble pas relever de la charte mais plutôt d’une instruction ou arrêté du Premier président et ces dispositions pourraient donc être supprimées. En revanche, la rédaction actuelle pourrait être complétée par une précision envisagée en 2013 : « La rémunération tirée d’activités accessoires doit se situer à un niveau raisonnable ». Le collège a été amené à se poser cette question à l’occasion de plusieurs saisines.

Le projet de 2013 allait plus loin, notamment en précisant (3ème alinéa du chapitre 5) que, par exception, l’exercice d’activités bénévoles au profit de personnes publiques ou de personnes privées sans but lucratif ainsi que la production d’œuvres de l’esprit, ne nécessitaient pas d’autorisation préalable. Cependant, certaines activités, même au profit de personnes publiques et même bénévoles, peuvent par exemple être visées par des règles d’incompatibilité ou présenter un risque de conflit d’intérêt.

Il est proposé de traiter dans ce chapitre de la production des œuvres de l’esprit plutôt que dans celui consacré à l’expression publique. La rédaction pourrait être analogue à celle retenue dans la charte de la juridiction administrative.

 

 

 

Proposition de rédaction

 

Activités accessoires et postes occupés par des magistrats

à l’extérieur des juridictions financières

 

Activités accessoires

 

41. Les personnes concernées par la charte consacrent l’intégralité de leurs activités professionnelles aux tâches qui leur sont confiées.

 

42. Les activités exercées à l’extérieur à titre accessoire, qu’elles soient rémunérées ou non, le sont dans le respect de la dignité qui sied à l’appartenance aux juridictions financières. Leur nature doit être compatible avec l’exercice de ces fonctions et ne pas nuire à la réputation de l’institution. La rémunération tirée d’activités accessoires doit se situer à un niveau raisonnable.

 

43. A cette fin, les personnes concernées font part préalablement à leur président de chambre ou, si elles ne sont pas affectées dans une chambre, à l’autorité hiérarchique dont elles relèvent, des activités extérieures rémunérées ou non qu’elles accomplissent à titre occasionnel ou récurrent.

 

44. Elles respectent les procédures d’autorisation fixées par le Premier président et pour ce qui concerne les membres concernés du ministère public, par le Procureur général. L’avis du collège de déontologie peut être demandé par les autorités et personnes qui y ont qualité.

 

45. Les activités à caractère scientifique, littéraire ou artistique et notamment la production des œuvres de l’esprit sont libres. Toutefois les personnes concernées se doivent de respecter, y compris dans ce cadre, leur obligation de réserve, la dignité qui sied à leurs fonctions et leur devoir de loyauté.

 

46. Les personnes exerçant des activités accessoires s’abstiennent de participer aux délibérés sur les affaires dont elles ont à connaître à ce titre.

 

 

 

   II.6.2. Postes occupés par des magistrats à l’extérieur des juridictions financières

 

Texte actuel : « La nature des fonctions exercées par les magistrats à l’extérieur des juridictions financières doit être compatible avec leur statut, leur permettre de respecter le serment qu’ils ont prêté et ne pas nuire à la réputation de l’institution ».

 

Cette rédaction pourrait être conservée et laissée à cette place, en faisant le lien avec le point 9 sur les personnels concernés qui évoque le caractère définitif du serment.

 

 

Proposition de rédaction

 

Postes occupés par des magistrats à l’extérieur des juridictions financières

 

47. La nature des fonctions exercées par les magistrats à l’extérieur des juridictions financières doit être compatible avec leur statut, leur permettre de respecter le serment qu’ils ont prêté et ne pas nuire à l’image et à la réputation de l’institution.

 

 

 

  II.7. Le collège de déontologie

 

Extrait du texte actuel : « Il est institué un collège de déontologie, composé de quatre membres… »

Les personnes chargées de contrôle peuvent, à tout moment, demander conseil au président du collège au sujet de leur situation ou de leurs projets.

Ce collège est saisi, pour examiner des questions d’ordre déontologique telles que définies par la présente charte, par le Premier président, le Procureur général, le président de la chambre régionale ou territoriale concerné ou par les personnes chargées de contrôle concernées. Son avis est transmis au Premier président, au Procureur général et au président de la chambre d’affectation ainsi qu’aux personnes chargées de contrôle concernées. Il appartient, en tout état de cause, au seul Conseil supérieur de la Cour des comptes et au seul Conseil supérieur des chambres régionales et territoriales, saisis chacun conformément au code des juridictions financières, de se prononcer sur l’existence d’une faute disciplinaire et sur l’éventuelle sanction qu’elle appelle.

Le collège est également chargé de mener une réflexion sur les questions de déontologie et à partir, notamment, de son expérience, de soumettre au Premier président des propositions en vue de faire évoluer et d’adapter les principes de la présence charte.

Le collège adresse chaque année un rapport au Premier président et au Procureur général. Ce rapport est présenté au Conseil supérieur de la Cour et au Conseil supérieur des CRTC ».

 

 

La loi du 20 avril 2016 (CJF L120-8 et 120-9) décrit désormais la composition et le rôle du collège tout en les modifiant. Les dispositions de la charte de 2006 sont donc pour la plupart devenues caduques.

 

La charte actualisée pourrait contenir six dispositions : les deux premières porteraient sur le champ d’intervention du collège, une sur la procédure lorsqu’il est consulté et deux sur ses fonctions. Deux de ces dispositions seraient reprises du texte actuel.

 

  1. L’article 11-5 de la loi du 20 avril 2016 a introduit dans la loi du 13 juillet 1983 sur les droits et obligations des fonctionnaires, un article 28 bis prévoyant un « référent déontologue » dans chaque administration. Tout fonctionnaire a le droit de le consulter pour qu’il lui « apporte tout conseil utile au respect des obligations et des principes déontologiques mentionnés aux articles 25 et 28 de la loi».

 

La rédaction du décret d’application du 10 avril 2017 publié le 12 avril 2017 autorise le Premier président à désigner le collège de déontologie comme référent déontologue puisqu’il prévoit que ce dernier peut être une instance collégiale. Cette solution présenterait l’avantage d’éviter tout problème d’articulation entre les deux instances, le référent et le collège. Elle assurerait l’unité de doctrine quels que soient le grade ou la fonction de la personne qui demande conseil. Elle semble d’autant plus opportune que, on l’a vu, la loi du 20 avril 2016 donne compétence au collège pour répondre aux demandes de conseil des différentes catégories de personnels des juridictions financières (cf. supra II-2-3).

 

  1. La charte actuelle précise (cf. 3ème alinéa de l’encadré ci-dessus) qu’il appartient aux seuls Conseils supérieurs de la Cour et des CRTC de se prononcer sur l’existence d’une faute disciplinaire et sa sanction. L’expérience montre que la question de l’articulation entre déontologie et discipline est souvent posée par des membres des juridictions financières et à l’extérieur, et il semble donc utile de reprendre cette disposition.

 

  1. Un alinéa soumettrait les membres du collège de déontologie à la même obligation de déclaration d’intérêts que celle prévue par la loi pour les magistrats.

 

  1. La charte actuelle ne comporte aucune disposition sur la procédure suivie par le collège lorsqu’il est consulté. Lors des travaux de 2013, il avait été envisagé de prévoir dans la charte que, quand la question posée au collège concerne une situation individuelle, il informe de sa saisine et de la réponse qu’il y apporte la personne concernée. Dans la pratique, le collège a toujours, dans ce type de cas, informé la personne concernée. Il s’efforce en outre de toujours se situer, dans sa réponse, au plan des principes, même lorsqu’il s’agit d’un cas individuel. Il pourrait cependant être souhaitable, pour la clarté vis-à-vis des personnels des juridictions financières comme de l’extérieur, d’introduire dans la charte une disposition prévoyant l’information de la personne concernée.

 

  1. La loi du 20 avril 2016 n’évoque pas le rapport que, aux termes de la charte actuelle, le collège adresse chaque année au Premier président et au Procureur général et qui est présenté aux Conseils supérieurs de la Cour et des CRTC. Ce rapport permet d’informer ses destinataires de l’activité du collège, de la nature des questions qui lui ont été posées et des réponses qu’il y a apportées. Il est aussi, plus largement, un vecteur d’information des personnels sur la déontologie puisque, depuis plusieurs années, il est mis sur l’intranet après sa présentation aux Conseils supérieurs. Le collège propose donc de maintenir cet alinéa de la charte.

 

  1. La charte actuelle charge le collège « de mener une réflexion sur la déontologie et de soumettre des propositions au Premier président pour faire évoluer et adapter les principes de la charte ». La loi du 20 avril 2016 (article 15) prévoit que le collège peut formuler des « recommandations » mais utilise ce terme dans un sens différent : le collège est chargé de formuler des recommandations de nature à éclairer les magistrats et les personnels de la Cour et des CRTC « sur l’application des principes déontologiques et de la charte de déontologie ». Pour que les nouvelles dispositions n’apparaissent pas en retrait par rapport aux actuelles, une rédaction proche de celle de 2006 pourrait figurer dans la charte, à la fin des dispositions relatives au collège.
 

Proposition de rédaction

 

LE COLLEGE DE DEONTOLOGIE

 

48. Le collège de déontologie prévu par la loi du 20 avril 2016 remplit aussi la fonction du référent déontologue institué par cette même loi.

 

49. Le collège n’intervient pas dans les procédures à caractère disciplinaire.

 

50. Les membres du collège de déontologie établissent une déclaration d’intérêt même lorsqu’ils n’y sont pas tenus sur la base du code des juridictions financières. Cette déclaration prend la même forme que celle fixée pour les magistrats des juridictions financières. Le président du collège transmet sa déclaration au Premier président. Les autres membres transmettre la leur.

 

51. Lorsque la question posée au collège concerne une situation individuelle, il informe la personne concernée et lui adresse copie de sa réponse.

 

52. Le collège adresse chaque année un rapport au Premier président et au Procureur général. Ce rapport est présenté au Conseil supérieur de la Cour et au Conseil supérieur des chambres régionales et territoriales des comptes.

 

53. Le collège peut émettre de sa propre initiative, à partir notamment de son expérience, des recommandations précisant ou complétant la présente charte ou formulant toute proposition d’évolution qui lui parait opportune.

 

 

 

Conclusion

 

Le collège propose ainsi d’actualiser la charte selon les principes exposés dans la première partie du présent rapport de présentation et selon les principaux axes suivants :

 

  • Tirer les conséquences de la loi du 20 avril 2016 et des textes consécutifs ;

 

  • Prendre en compte, comme il avait été souhaité lors des consultations de 2010-2013, des apports des documents équivalents intervenus postérieurement à 2006 dans les autres types de juridictions ;

 

  • Compléter les sujets évoqués dans la charte actuelle notamment par deux points nouveaux, l’expression publique et les relations avec les contrôlés, pour répondre à des attentes qui se sont renforcées dans les années récentes ;

 

  • Rendre plus apparente la structure de la charte pour améliorer sa lisibilité ;

 

  • Apporter des clarifications, notamment en reclassant certains thèmes.

 

Les rédactions suggérées sont d’une part consolidées dans le document ci-joint («projet  charte de déontologie des juridictions financières – rédactions proposées par le collège de déontologie ») et d’autre part retracées dans un tableau qui les met en regard des dispositions actuelles.

 

[1]           Par exemple des références à Twitter, aux blogs ….

[2]          Cette notion de doute légitime a été formulée dans le rapport d’activité du collège de déontologie pour 2014 page 7.

[3]           Pour les magistrats, les CMSE et CRSE, les rapporteurs, les experts (le CJF en cours de révision leur étend le serment) les greffiers et les vérificateurs, le serment constitue déjà l’engagement individuel essentiel. » La plupart des engagements déontologiques sont résumés et contenus dans la formule du serment : pour les magistrats garder le secret des délibérations, se comporter en tout de façon digne et loyale. Le serment fait appel à la responsabilité individuelle qui constitue le ressort le plus efficace pour assurer le « respect de la déontologie » , expression qui se situe mieux dans l’esprit de la charte que celle de « règles déontologiques » envisagée en 2013.

[4]          Cf infra sur le collège de déontologie.

[5]          La formule du serment des agents concourant à l’exercice de certification n’est pas arrêtée.

[6]          Interprété par la CEDH, le principe d’impartialité comporte plusieurs approches : l’impartialité objective de la juridiction considérée collectivement, c’est-à-dire structurellement, ou individuellement, à raison de la situation personnelle d’un magistrat résultant des fonctions qu’il a précédemment exercées, et l’impartialité subjective résultant de celle, personnelle, de chacun des membres qui la composent lors de chaque formation de délibéré. Dans la première approche, la chambre sera considérée impartiale si son jugement n’est engagé par aucun acte antérieur par lequel elle serait juridiquement ou psychologiquement liée et qui traduirait un pré jugement. Si la situation personnelle d’un ou plusieurs magistrats est en cause, c’est à une récusation individuelle que le justiciable pourrait procéder s’il s’agit des fonctions antérieurement exercées, le justiciable peut également y voir une source de partialité viciant le jugement attaqué.

[7]          Suppression de cette mention notamment en s’inspirant des règles prévues par le code de procédure civile pour les magistrats judiciaires.

[8]          Il semble en outre préférable de ne pas retenir sur un autre point ce que proposait le projet de 2013. En effet, il comportait des dispositions sur les incompatibilités qui constituaient une section du même chapitre. Cependant, cette section rappelait simplement que « Les personnels des juridictions financières sont soumis aux incompatibilités d’ordre général applicables à tous les fonctionnaires, ainsi que celles prévues par le code des juridictions financières» et faisait le lien avec les dispositions sur les activités extérieures. Pour le reste, elle renvoyait au chapitre 5 du projet sur les activités accessoires (« En outre, pour l’exercice simultané d’activités, les règles et bonnes pratiques figurant au chapitre 5 s’appliquent. »). Il ne semble donc pas indispensable de reprendre cette section. L’objet de la charte n’est pas de rappeler des règles, rappel qui ne peut être qu’incomplet sauf à entrer dans une longue énumération.

[9]           Le texte de 2013 ajoutait « qui doivent rester confidentielles ». Ce membre de phrase semble redondant.

[10]         La diffusion par un personnel des juridictions financières d’informations résultant des investigations ou des délibérés dont il a pu avoir connaissance sur des réseaux sociaux ou tout autre moyen de communication constitue un manquement au secret professionnel. Plus généralement, il est recommandé, sur ces réseaux, de ne pas faire état de son appartenance aux juridictions financières. Ils évitent tout commentaire sur leur vie interne. Ces recommandations s’appliquent également lorsque les intéressés utilisent un pseudonyme.

[11]         La charte de déontologie de la juridiction administrative précise que « lorsqu’un membre de la juridiction administrative a siégé dans une affaire, il s’abstient de commenter la décision rendue dans des conditions de nature à porter atteinte au secret du délibéré. » Il s’ensuit a contrario qu’il peut commenter une décision rendue dans laquelle il a siégé dès lors que son commentaire ne porte pas atteinte au secret du délibéré.

 

[12]         Il s’agit du Premier président et du Procureur général, chacun en ce qui les concerne, pour les publications de la Cour des comptes, et des présidents de chambre régionale et territoriale pour les publications des CRTC.

 Projet de charte de déontologie des juridictions financières

Préambule

  1. Les juridictions financières exercent une fonction générale de contrôle de la bonne utilisation des fonds publics. La Constitution, les lois organiques et le code des juridictions financières confèrent à la Cour des comptes un rôle important dans le contrôle de l’exécution des lois de finances et de l’application des lois de financement de la sécurité sociale ainsi que dans l’évaluation des politiques publiques. Par leurs rapports la Cour et les chambres régionales et territoriales des comptes contribuent à l’information des citoyens.

 

  1. Les missions des juridictions financières et leur rôle au plan national et international les conduisent à respecter les obligations d’impartialité et d’indépendance résultant tant des principes nationaux que de la convention européenne des droits de l’homme et des principes et valeurs énoncés dans le code de déontologie de l’organisation internationale des institutions supérieures de contrôle des finances publiques (INTOSAI).

 

  1. L’exigence déontologique, présente dès l’origine des juridictions financières notamment par l’obligation de prêter serment, s’est formalisée par une charte de déontologie qu’elles ont adoptée en 2006. La loi n°2016-483 du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires consacre l’existence d’une telle charte précisant les valeurs et principes qui doivent inspirer les comportements au sein des juridictions financières.

 

  1. Ces valeurs et principes ont pour objectif de garantir que les magistrats et autres personnes concernées des juridictions financières exercent leurs fonctions en toute indépendance, avec impartialité, neutralité, dans le respect du principe de laïcité, avec dignité, intégrité et probité, et se comportent de façon à prévenir à cet égard tout doute légitime.

 

  1. Le respect de ces valeurs et principes est un élément essentiel de l’image et de la réputation des juridictions financières et, comme tel, une condition de leur crédibilité et de la confiance qui leur est accordée.

 

  1. Pour les magistrats et les personnes citées à l’article 15 de la loi du 20 avril 2016 mais aussi pour les autres catégories de personnes qui doivent le prêter, le serment constitue un engagement personnel essentiel. Il fait appel à la responsabilité individuelle qui constitue le ressort le plus efficace pour assurer le respect de la déontologie. La plupart des engagements déontologiques sont résumés et contenus dans la formule du serment qui oblige à garder le secret des délibérations et à se comporter avec dignité et loyauté.

 

  1. La déontologie ne se confond pas avec la fonction disciplinaire. Les dispositions de la présente charte constituent des repères destinés à procurer aux magistrats et aux autres personnes concernées une aide pour résoudre des questions d’ordre éthique auxquelles ils pourraient être confrontés dans l’exercice de leurs fonctions.

 

Elles ont également vocation à montrer aux autres institutions et au public que ces mêmes personnes, en contrepartie des prérogatives importantes dont elles disposent, agissent dans le respect de valeurs fondamentales garantissant la légitimité de leur action.

 

  1. Les Conseils supérieurs de la Cour et des chambres régionales des comptes ont été consultés sur la présente charte, conformément au code des juridictions financières qui prévoit leur consultation sur toute question déontologique d’ordre général ou individuel. Le comité technique institué auprès du Premier président l’a été au titre de ses compétences en matière d’organisation des juridictions financières.

 

 

Personnels concernés

 

  1. Conformément au code des juridictions financières, la présente charte s’applique aux magistrats, aux conseillers maîtres et conseillers référendaires en service extraordinaire ainsi qu’aux rapporteurs extérieurs auprès de la Cour et aux rapporteurs auprès des chambres régionales et territoriales. Ses dispositions s’appliquent également aux magistrats honoraires dans le cadre des fonctions qui leur sont confiées au titre des juridictions financières. Elles inspirent le comportement des magistrats lorsqu’ils exercent des fonctions à l’extérieur de la juridiction.

 

Les experts qui assistent la Cour des comptes pour l’évaluation des politiques publiques sont, conformément au code des juridictions financières, soumis aux mêmes obligations .

 

Le serment revêtant un caractère définitif, les magistrats et les autres catégories de personnels qui le prêtent ne peuvent en aucun cas en être relevés.

 

 

LES VALEURS ET PRINCIPES GENERAUX

 

 

  1. Les principes fondamentaux d’indépendance et d’impartialité exigent que chacun, en toute occasion, se détermine librement, sans parti pris d’aucune sorte, ni volonté de favoriser un intérêt particulier et sans céder à aucune pression.

 

 

Indépendance

 

  1. L’indépendance des juridictions financières suppose que les magistrats et autres personnes concernées par les obligations de la charte ne sont soumis et ne doivent apparaître soumis à aucun lien de subordination de quelque nature que ce soit. Ils veillent à éviter toute situation qui entraverait ou pourrait paraître entraver leur liberté d’investigations dans le cadre des normes professionnelles ou la liberté de formation et d’expression de leurs opinions dans les délibérés. La seule limite apportée à cette liberté réside dans le respect des décisions collégiales.

 

Impartialité, neutralité, laïcité

 

  1. Les personnes concernées par la charte font en sorte, dans leurs comportements tant professionnels que privés, de ne pas se trouver dans une situation qui pourrait porter atteinte ou paraître porter atteinte à l’impartialité et à la neutralité de la juridiction à laquelle ils appartiennent. Elles veillent à respecter le principe de laïcité.

  Impartialité.

 

  1. L’impartialité des membres des formations de délibéré suppose que leur opinion a été formée sans préjugé ni parti pris.

 

  1. Dans l’exercice de leurs fonctions, les personnes concernées par la charte veillent à permettre l’expression des parties, des personnes mises en cause et des tiers. Elles analysent et rendent compte objectivement des arguments et opinions exprimés. Pour l’évaluation des politiques publiques elles s’efforcent de prendre en compte les opinions des principales parties prenantes.

 

 Neutralité et laïcité

 

  1. Dans leur activité professionnelle, les personnes concernées s’abstiennent de toute manifestation ou comportement qui pourrait traduire une appartenance politique, philosophique ou confessionnelle. Dans le cadre de leurs activités politiques, philosophiques ou confessionnelles, elles ne mettent pas en avant leur appartenance à l’institution ou leur collaboration aux travaux de celle-ci.

 

Dans l’esprit de cette règle, dès lors qu’elles sont candidates à une élection nationale, locale, ou à celle du Parlement européen, ou qu’elles ont des responsabilités dans une équipe officielle de campagne, ces mêmes personnes sont invitées à demander à être placées en position de disponibilité pendant toute la durée de la campagne officielle.

 

 

LA PREVENTION DES CONFLITS D’INTERETS

 

  1. Afin de prévenir les conflits d’intérêts et dans le respect des dispositions du code des juridictions financières en ce domaine, les personnes concernées par la charte s’abstiennent de prendre part à des investigations ou à un délibéré concernant un organisme dans lequel elles détiennent, ou ont détenu dans les cinq années précédentes, des intérêts de nature à compromettre leur indépendance, leur impartialité ou leur neutralité.

 

Elles n’interviennent d’aucune manière sur un organisme ou un service où elles ont exercé des responsabilités au cours d’une période qui ne doit être en aucun cas inférieure à cinq ans.

 

  1. Elles s’abstiennent d’intervenir en faveur d’un tiers, même à titre amical, dès lors que la situation s’apparenterait à un conflit d’intérêts.

 

  1. Ces obligations s’appliquent également à elles lorsqu’elles sont appelées à exercer une activité accessoire ou occupent une fonction à l’extérieur des juridictions financières. Les règles propres à ces activités accessoires ou extérieures n’exonèrent pas les intéressés de respecter les valeurs et principes de la présente charte.

 

  1. Dans l’appréciation de leurs intérêts et des risques de se trouver placées dans une situation de conflit d’intérêts, les personnes concernées par la charte considèrent que la notion d’intérêt privé s’entend d’un avantage pour elles-mêmes, leur famille, leurs proches immédiats ou des personnes ou organisations avec lesquelles elles entretiennent ou ont entretenu des relations d’affaires ou professionnelles significatives, ou avec lesquelles elles sont directement liées par des participations ou des obligations financières ou civiles.

 

 

 

LES PRINCIPES DE COMPORTEMENT

 

  1. Les principes de dignité et de loyauté qui résultent à la fois du serment et de la nécessité qu’il ne soit pas porté atteinte à l’image et à la réputation de l’institution, ont pour conséquence des principes de comportement.

 

 

Dignité, intégrité et probité

 

  Dignité

 

  1. Les personnes concernées par la présente charte exercent leurs tâches avec dignité, conformément au serment. Elles se comportent avec droiture et s’abstiennent de tout agissement contraire à l’honneur.

 

  Intégrité et probité

 

  1. L’intégrité et la probité inspirent l’exercice professionnel des personnes concernées par la charte ainsi que leur conduite dans leurs autres activités.

 

  1. Ces mêmes personnes ne peuvent tirer de leur position officielle aucun avantage. Elles ne sollicitent ni n’acceptent de quiconque, dans le cadre de leurs fonctions, pour elles-mêmes ou pour des tiers, aucun avantage qui puisse exercer une influence ou jeter un doute sur l’indépendance ou l’impartialité de leurs décisions, sur leur honnêteté ou sur la façon dont elles exercent leurs fonctions. Elles ne sollicitent pas pour elles-mêmes des distinctions honorifiques.

 

  1. Elles n’acceptent pas, de façon directe ou indirecte, des cadeaux et libéralités dans l’exercice ou à l’occasion de leurs fonctions. Seuls peuvent être acceptés les cadeaux de faible valeur, s’inscrivant dans le cadre protocolaire d’une visite ou d’un échange à caractère officiel.

 

  1. Les invitations ne peuvent être acceptées que si elles ne sont pas, par leur valeur, leur fréquence ou leur intention, de nature à influencer ou paraître influencer l’exercice indépendant et impartial des fonctions.

 

  1. Ces mêmes personnes ne doivent pas se placer ou se laisser placer dans une situation susceptible de les obliger à accorder en retour, dans l’exercice de leurs fonctions, une faveur ou une contrepartie à une personne physique ou morale.

 

 

Discrétion et secret

 

  1. Les personnes concernées par la charte respectent le secret professionnel qui touche notamment les investigations et les délibérations. Le secret est absolu et ne connaît ni modulation, ni division, ni dérogation. Le secret des délibérations implique que les personnes concernées par la charte s’abstiennent en toutes circonstances de faire connaître leur opinion personnelle et celle des membres délibérants. Elles respectent les secrets protégés par la loi.

 

  1. Ces mêmes personnes respectent pour toutes leurs activités une obligation de discrétion professionnelle. Elles s’abstiennent notamment de communiquer tous documents ou informations ayant un caractère confidentiel ou dont la publicité revient à la seule juridiction dont elles relèvent. Elles observent la discrétion la plus complète sur tout renseignement et sur toute donnée de fait dont elles peuvent avoir connaissance directement ou indirectement à l’occasion de leurs fonctions présentes ou passées et qui ne peuvent être normalement connus qu’en vertu des pouvoirs dont disposent les juridictions financières. Elles prennent toutes dispositions nécessaires pour préserver la confidentialité des informations professionnelles échangées.

 

  1. Ces différentes obligations visent tous les moyens et supports de communication.

 

 

Expression publique

 

  1. Les magistrats et autres personnes concernées par la charte disposent, comme tout autre fonctionnaire, de la liberté d’opinion, de la liberté d’adhérer à un parti politique, à un syndicat ou à une association.

 

  1. Ces mêmes personnes respectent dans toute expression publique d’opinions politiques, philosophiques ou religieuses, quelle qu’en soit la forme, l’obligation personnelle de réserve, telle qu’elle résulte des principes généraux de la fonction publique et notamment des principes de neutralité et de laïcité. Elles veillent à ce que les opinions exprimées soient compatibles avec la nature et la dignité des fonctions exercées au sein des juridictions financières. Elles veillent à respecter dans cette même expression leur obligation de loyauté et à ne pas porter atteinte à l’image et la réputation de ces mêmes juridictions.

 

  1. Sauf nécessité professionnelle, elles ne font pas état à l’extérieur de l’institution des modalités et du contenu des investigations qu’elles mènent ou dont elles ont connaissance, ou des délibérés auxquels elles ont participé. Elles évitent tout commentaire sur la vie interne des juridictions financières.

 

  1. Dans les messages qu’elles envoient sur les réseaux sociaux ou sur les messageries non professionnelles, elles ne font pas état de leur appartenance aux juridictions financières. Elles s’abstiennent de prendre part à toute polémique qui, par sa diffusion et eu égard à son objet ou à son caractère, serait de nature à rejaillir sur l’institution.

 

  1. Lorsqu’elles s’expriment publiquement sur les publications des juridictions financières, les personnes concernées par la charte respectent le message délivré dans ces publications et évitent tout commentaire critique.

 

 

 

  1. Dans le cas d’activités d’enseignement, de publication dans des revues à vocation universitaire, scientifique, juridique, technique ou financière, ou d’expression dans des colloques ou séminaires de même nature, il leur est possible de se prévaloir de leur qualité au sein des juridictions financières, ce qui implique de leur part une modération appropriée dans leurs propos.

 

  1. Lorsqu’elles souhaitent s’exprimer dans un média à vocation générale dans l’exercice de leurs fonctions ou en qualité de membre des juridictions financières, elles sollicitent au préalable l’accord de l’autorité compétente. Dans les autres cas, elles prennent toutes dispositions nécessaires pour séparer leur expression de leur qualité de membre des juridictions financières.
  2. Les présidents de chambre régionale et territoriale des comptes peuvent s’exprimer ès qualité sur les sujets relevant de leur compétence.
  3. Dans l’exercice d’une mission confiée ès qualité à un magistrat, à l’extérieur des juridictions financières, la mention de son appartenance est autorisée, mais la précision que ses propos et positions n’engagent pas ces juridictions est souhaitable.

 

 

Relations professionnelles

 

  1. Les personnes concernées par la présente charte, lorsqu’elles sont amenées à participer à des délibérés, se comportent en tous actes à l’égard de leurs collègues de façon à garantir la sérénité des délibérations et le bon fonctionnement de la collégialité. Elles adoptent de manière plus générale un comportement de respect vis-à-vis de chacun, y compris dans leur expression sur les réseaux sociaux, même privés.

 

 

Relations avec les contrôlés

 

  1. Elles veillent constamment à adopter une attitude d’écoute lors des entretiens et contrôles, sans jamais laisser transparaître des sentiments personnels de sympathie ou d’antipathie vis-à-vis des personnes rencontrées dans l’exercice de leurs missions. Elles s’abstiennent d’utiliser, dans leurs propos et leurs écrits, des expressions qui pourraient être ressenties comme déplacées ou vexatoires.

 

 

LES ACTIVITES ACCESSOIRES ET LES POSTES OCCUPES PAR DES MAGISTRATS A L’EXTERIEUR

 

Activités accessoires

 

  1. Les personnes concernées par la charte consacrent l’intégralité de leurs activités professionnelles aux tâches qui leur sont confiées.

 

  1. Les activités exercées à l’extérieur à titre accessoire, qu’elles soient rémunérées ou non, le sont dans le respect de la dignité qui sied à l’appartenance aux juridictions financières. Leur nature doit être compatible avec l’exercice de ces fonctions et ne pas nuire à la réputation de l’institution. La rémunération tirée d’activités accessoires doit se situer à un niveau raisonnable.

 

  1. A cette fin, les personnes concernées font part préalablement à leur président de chambre ou, si elles ne sont pas affectées dans une chambre, à l’autorité hiérarchique dont elles relèvent, des activités extérieures rémunérées ou non qu’elles accomplissent à titre occasionnel ou récurrent.

 

  1. Elles respectent les procédures d’autorisation fixées par le Premier président et pour ce qui concerne les membres concernés du ministère public, par le Procureur général. L’avis du collège de déontologie peut être demandé par les personnes concernées et par les autorités qui y ont qualité.

 

  1. Les activités à caractère scientifique, littéraire ou artistique et notamment la production des œuvres de l’esprit sont libres. Toutefois les personnes concernées se doivent de respecter, y compris dans ce cadre, leur obligation de réserve, la dignité qui sied à leurs fonctions et leur devoir de loyauté.

 

  1. Les personnes exerçant des activités accessoires s’abstiennent de participer aux travaux et aux délibérés sur les affaires dont elles ont à connaître à ce titre.

 

 

Postes occupés par des magistrats à l’extérieur des juridictions financières

 

  1. La nature des fonctions exercées par les magistrats à l’extérieur des juridictions financières doit être compatible avec leur statut, leur permettre de respecter le serment qu’ils ont prêté et ne pas nuire à l’image et à la réputation de l’institution.

 

 

LE COLLEGE DE DEONTOLOGIE

 

  1. Le collège de déontologie prévu par la loi du 20 avril 2016 remplit aussi la fonction du référent déontologue institué par cette même loi.

 

  1. Le collège n’intervient pas dans les procédures à caractère disciplinaire.

 

  1. Les membres du collège de déontologie établissent une déclaration d’intérêts même lorsqu’ils n’y sont pas tenus sur la base du code des juridictions financières. Cette déclaration prend la même forme que celle fixée pour les magistrats des juridictions financières. Le président du collège transmet sa déclaration au Premier président. Les autres membres transmettent la leur au président du collège.

 

  1. Lorsque la question posée au collège concerne une situation individuelle, il informe la personne concernée et lui adresse copie de sa réponse.

 

  1. Le collège adresse chaque année un rapport au Premier président et au Procureur général. Ce rapport est présenté au Conseil supérieur de la Cour et au Conseil supérieur des chambres régionales et territoriales des comptes.

 

  1. Le collège peut émettre de sa propre initiative, à partir notamment de son expérience, des recommandations précisant ou complétant la présente charte ou formulant toute proposition d’évolution qui lui parait opportune.

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