La question de l’indépendance des magistrats judiciaires devant le Conseil d’État

Acteurs publics, 16 juin 2017, par Bastien Scordia

L’Union syndicale des magistrats (USM) a déposé devant le Conseil d’État une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) au sujet de l’indépendance statutaire des magistrats du parquet. La procédure s’inscrit dans le cadre plus global d’un recours contre la réforme de l’administration du ministère de la Justice. 

D’une pierre deux coups. À l’occasion de son recours contre la réorganisation du secrétariat général du ministère de la Justice, l’Union syndicale des magistrats (USM) a aussi déposé devant le Conseil d’État une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) sur l’indépendance statutaire des magistrats du parquet, jeudi 15 juin.

Majoritaire dans la magistrature, l’USM se demande si des dispositions prévues dans une ordonnance de 1958 portant statut des magistrats sont conformes ou non aux principes de l’indépendance de l’autorité judiciaire et de la séparation des pouvoirs. L’ordonnance en question stipule notamment que les magistrats du parquet (les procureurs) “sont placés sous l’autorité du garde des Sceaux, ministre de la Justice”.

Contrôle des magistrats

La question que soulève l’organisation syndicale s’inscrit dans le cadre d’une procédure plus large, celle de son recours (en référé-suspension) contre la réforme de l’administration de la Justice. En mai dernier, l’USM avait décidé d’attaquer la réorganisation et le renforcement du secrétariat général de la Place Vendôme [cliquez ici pour consulter notre article : “Des magistrats attaquent la réforme de l’administration du ministère de la Justice”].

Les magistrats remettent notamment en cause des dispositions, inscrites dans un décret et un arrêté du mois d’avril, qui actent la réforme en question et permettent à la direction de la protection judiciaire de la jeunesse (DPJJ) d’“anime(r) et contrôle(r) l’action du ministère public en matière de protection de l’enfance”. Les textes prévoient aussi que cette direction “contribue, en relation avec la direction des affaires criminelles et des grâces, au suivi de l’action publique exercée auprès des juridictions dans les dossiers impliquant les mineurs”. En somme, la DPJJ serait autorisée à contrôler le parquet dans le cas où ce dernier engagerait des poursuites pour délinquance juvénile.

Examen le 21 juin

Le recours en “référé-suspension”, dans lequel s’inscrit la QPC, sera examiné par le Conseil d’État le 21 juin prochain. Les magistrats du Palais-Royal pourront soit rejeter la question prioritaire de constitutionnalité, soit la transmettre au Conseil constitutionnel.

Quoi qu’il en soit, la question soulevée par l’USM sur l’indépendance des magistrats du parquet reviendra sur le devant de la scène dans les prochains mois. Le gouvernement d’Édouard Philippe souhaite en effet modifier la Constitution pour renforcer l’indépendance des procureurs en alignant leurs procédures de nomination sur celles des magistrats du siège (les juges).

Jusqu’à ce jour, le Conseil supérieur de la magistrature (CSM) ne rend qu’un avis consultatif sur les nominations des membres du parquet, avis auquel le président de la République n’est juridiquement pas obligé de se plier. Pour les magistrats du siège, en revanche, un avis conforme est obligatoire, poussant donc l’exécutif à ne pas imposer tel ou tel candidat.

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